Ĉiuj afiŝoj de Gael GERARD

Heurtoir sur la porte

 Heurtoir sur la porte
 Ma maison est en bois
 Que le gong allège .

 Soif de dire le son
 Des oraisons en pâmoison
 Hors l'ordre vitupéré .

 Mâchure de l'esprit
 Sous le ciel d'un cœur
 Impact des balles fraîches .

 Corridor essentiel
 Pour de plus amples promenades
 Sans rambarde pour devoir .

 Au creux des encensoirs
 Filtre le doux regard
 De l'enfant en devenir .

 Prune écrasée entre deux doigts
 Gant de crin mouillé
 Offrande aux mille bouddhas .


 262 

Tu ouvres l’œil, vi fermas la okulojn

 Vi malfermas viajn okulojn
 vi fermas la okulojn
 kaj via sankta fingro
 montru la vojon
 ĝis nun, tiel proksime
 objekto sen objekto        
 absoluta nudeco
 la kolorigo kiu inspiras vin
 estas nepenetrebla dikeco .

 Lernanto - vi
 estu la krianta aglo
 pluki la vinberojn el la vito
 viŝu vian frunton
 karesas la preterpasantan hundon .

 Ho homo,
 ho virino
 radiante kune
 la mandorla de la sezonoj . 

 sonoriloj, okaj notoj,
 al la sono de la tamburino
 ni estu la verbo de la oficantoj
 kareno de la procesia onidiro
 rubando klako
 sub la lintelo de la enirejoj
 kutima ĉeesto
 de la paladino sub la kupolo
 serĉante lumon .

 Ĝi estas realigota
 ol la akrobato
 levita de huraoj
 ĉe la supro de sia ludo
 ĉagreno antaŭ la peto
 disŝirita de anĝelaj voĉoj
 preta etendi sian konkavan spegulon
 al tiu, kiu, frumatene 
 faros la inversigon .

 ( Detalo de pentraĵo de Manon Vichy ) 

 261

Oui, ensemblo, diru al vi, kiel estas la vivo

 Oui , ensemblo
se dire comment c'est la vie
là simplement devant soi
entre étonnement et gravité
profondeur et légèreté
en sourdine ou avec éclat
comme ça vient
en son cœur
être au plus prêt de soi .

Oui , ensemblo
sur terre , à cheminer
de chair et d'esprit ,
se lever le matin
se coucher le soir
participer à la répétition des chants sacrés
lire quelques pages de poésie
s'échapper par de belles pensées
donner sa pâtée au chat sans oublier ses médicaments
guetter le temps qu'il fait
faire quelques pas le nez au vent
observer la nature qui se déploie
voir si la mangeoire aux oiseaux est fournie
prendre le petit déjeuner à deux
soutenir l'autre dans sa parole
échanger pour pousser plus avant
la réflexion sur les choses de la vie
puis méditer
rentrer les poubelles
aller relever le courrier
se dire ce qu'on va faire cette journée
les courses à l'Intermarché , à Botanic , chez le boucher ,
penser aux coups de téléphone
" Il va falloir que j'aille chez le coiffeur " .

Prendre soin de son corps ,
de cette tête migraineuse ,
du voile devant l'œil ,
de ces dents de Cadmos
de ces mains Dupuytren ,
de ce bassin engoncé ,
de ces jambes opérées .

Oui , ensemblo
descendre comme vous vers la mer
les charges occupationnelles s'estompent
nul n'est indispensable
être désengagé professionnellement
le pré carré devient essentiel
fleurissent les images
des brassées d'idées convergent
d'où émergent des arrangements
des cadres où poser les œuvres
en déconstruction et construction de là où on est
la quête du sens des choses se précise
rêvasser ,
de douces et fulgurantes émotions
montent du ventre et du cœur ,
obligé que je suis de tendre vers le grand Mystère .

Oui , ensemblo
tirer sa révérence
grapher sur le papier
des mots de sang , des mots d'esprit
dans le petit carnet
à la page d'aujourd'hui
au jour nouveau
de fraîches lunaisons attendent encore
telle une éternité offerte
bien au dessus de soi
mais visibles par temps de brume
entre chien et loup
quand la flamme se reflète au plus profond de l'âme
mia amiko , mon cœur , ma déraison , ma déférence ,
ma dérobée , ma merveilleuse échappée ,
l'offrande consentie
ĉe tagiĝo
d'une tendresse à promouvoir.

Oui , ensemblo
il y a ces souvenirs , surtout ceux de l'enfance
brouillamini d'un passé révolu
et qui néanmoins collent à nos basques
immense conglomérat de traces
qu'organisent
à petite montées de bile
l'intelligible nostalgie du veilleur .

Oui , ensemblo
et puis tant de choses , encore ,
à se retourner dans tous les sens
à faire lever la poussière de notre espace ,
séjour des morts avant la lettre ,
à fixer les points géodésiques forts ,
repères pour les futures générations ,
à ne pas manquer la cible des pertinences .

Devant moi la terre devient aride
les hêtres et les chênes de nos forêts
ont laissé place à quelques buissons épineux
le sable pénètre les anfractuosités de nos tours de Babel .

Avec mes mains , ma voix , mon regard
j'écris ton nom
toi le Futur Venu
vi , Liberté , Lumière et Mort
Nuit et Jour .

je mange les derniers fruits
ces baies rouges , nigra , jaunes et vertes
j'habite tel un arlequin les couleurs de l'amour
je suis émerveillé par le passage
de la nuit au jour
et du jour à la nuit
surtout en nature , par temps frais
quand au petit matin
le soleil se lève , repoussant ses draps de miel
pour embraser l’entièreté de la voûte céleste
clameur de bien plus que soi
aux confins de l'espace
de l'accompli
et puis y'a la pluie
cette pluie toute neuve d'après sécheresse
qui fait se lever les fragrances endormies
et fouette le visage d'un éventail d'odeurs
promesse de rencontres inouïes .

Oui , ensemblo
en promenade
sur le plateau battu par les vents d'ouest
je m'arrête et repars quant je veux
au gré d'une douleur à la jambe
au gré d'une blessure sur un tronc du frêne
les hautes branches dansant dans un souffle
aux effluves vigoureuses .

Oui , ensemblo
c'est un sémaphore
aux fleurs de coquillages
que les yeux du néant
perçoivent
immense élan des vagues éternelles
frappant sans relâche
les rocs de l'avenir
et les maigres barrières
tout autour de cet objet si doux
que l'on pousse
devant soi et derrière soi
de tous les côtés à la fois
en ordre et en désordre
vivo
Sa Vie
cette béance de commencement en commencement ,
ce creuset des opportunités ,
cet appel de l'aube ,
Jes , mais ensemble .


260

Rigardo tiel dolĉa

 Rigardo
 Du côté des marguerites
 Aux tiges longues
 Des coccinelles remontantes .

 Rigardo 
 En haleine d'être
 Du frais partage
 Des mots de tous les jours .

 Rigardo 
 De toi vers moi
 À pieds joints dans la flaque d'eau
 De moi vers toi .

 Rigardo
 Venu d'ailleurs
 La trace d'un passereau
 Fuyant sa signature .

 Rigardo 
 Qui embrasse sa vie
 Et prend conscience de sa mort
 Comme le matador dans l'arène .

 Rigardo 
 De l'entre-deux
 Avec sa condition spirituelle
 Et infiniment mortelle .

 Rigardo 
 En sa solitude
 Dans ses limites
 Dans son ouverture .

 Rigardo
 Qui n'a rien à faire
 Pour se contenter d'être 
 Ce qu'on est .

 Rigardo
 Qui permet de vivre
 Malgré les ignorances
 Grâce à son innocence .

 Rigardo
 Qui adhère sans savoir
 Au souffle le vent
 D'où procède la lumière .

 Rigardo
 Qui sauve
 En équilibre
 Du risque des cris et des pleurs .

 Rigardo
 Un premier pas
 La foi du charbonnier
 Comme en passant .

 Rigardo
 Si présent 
 Qui sauve et s'expose
 Le temps d'une métamorphose .

 Rigardo 
 Qui transmet
 Le sable du désert
 À petites goulées de mystère .

 Rigardo
 D'une vie l'autre
 Une force
 À soulever les montagnes .

 Senpaga aspekto
 Comme la lune en plein jour
 Dans l'exaltation
 Des paupières battantes .

 Rigardo
 Disponible dans l'instant
 Disponible à tout jamais
 Comme ultime ressource .

 Rigardo
 Qui ne fouille pas
 Mais rassemble
 Les étoiles du matin .

 Rigardo
 Tel un soleil levant
 Enturbanné 
 Dans ses draps de miel .

 Rigardo tiel dolĉa
 Une merveille
 Du bout du doigt
 Nu retenu vécu .


 259 

malgranda etendita mano

 malgranda etendita mano
 Se leva vers les cieux
 Pour capter le nuage errant
 Sans s'affubler du passé
 Sans les pleurs de l'arbre aux fines écorchures
 Sans le pas menu du chevreuil sur la feuille sèche .

 Tiam , 
 Devenu cornemuse
 De ses doigts de fée
 Laissa passer
 La moelle d'un son
 Frappant de son aile
 Le paralytique de la relation .

 Mirliton de miaj pensoj
 Face à la haine
 L'amour et la foi se rejoignent
 Joie dépouillée
 De toute définition
 Entre doute et fidélité
 D'une intense émotion
  À parcourir le chemin intérieur .

 Ne turnu min en svingantan pordon
 Qui s'ouvre et se ferme à tout va
 Alors que le temps presse de séparer le subtil de l'éther
 Avant de bénir ses enfants  .

 Estu certa
 Au parapet des circonstances
 Le visage de sortie d'holocauste
 Reflète un bonheur 
 Grandeur du feu essentiel
 Sauveur de l'oubli de soi
 Sauveur de la confusion d'avec soi .


 258 

Letero Pirueto

 Letero Pirueto
  À l'arrivée de celle qui ne vint pas
 Aux commémorations des mots mordus par la dent principielle
 Aux safran sachant chasser les vents mauvais
 Aux callunes courbées sur la lande de l'enfance
 Aux fresques enrubannées
 Que dis-je ?
 Si je ne fabrique l'au-delà
 Que fais-je alors de si parcimonieux
 En tenereco baletistinoj
 Aux creux des vagues amoureuses
 À se fâcher avec la bête
 À s'élever au matin gracieux
 Par dessus l'hypertexte des attentes clamées
 En chasse-patates derrière le peloton moutonnier
 J'erre en carême d'Être
 Et produis le déficit
 Estuaire frémissant
 D'un mascaret de circonstance
 Au marquage des dauphins
 En vacance du tout venant
 En acceptation du tout venu
 Griffant d'un ongle acéré
 Sur l'orgue basaltique
 Les errances parcheminées
 Ces questions froides 
 En avidité de connaître
 Au désespoir d'avoir connu
 Le simple effet d'un son
 Au point chantre de l'église
 Ma jungle
 Mon Guernica des causes perdues
 Ma vaillance
 Ma basilique Saint-Ferjeux
 Mon enfant de terre et de ciel
 Unique élan du savetier
 Près de sa galoche centuriale
 À décrépir les monts et merveilles
 D'un horizon éloigné
  À force de rames
 Sur la mer Morte
 Et de coups de menton
 Contre le mur des lamentations .


 257 

Chromosomes farfadets de l’aube

 Kromosomoj
 Farfadets de l'aube
 Alter ego s'évertuant
 À caresser de leurs os
 Les murailles lasses
 De nos châteaux endormis .

 La asfodelo miksiĝas
 Fanges et végétations ourdies
 Aux luxures de l'esprit
 Fenêtres ouvertes
 En pâmoison d'Etre
 Mia animo , mia malgajo .
 
Noĉigita
 De moellons parcimonieux
 Montent des tours barbares
 L'énuclage des ouvertures
 Gémissements se prolongeant
 Aux flexures du temps .

 Raison dernière
 Des contes de la mère l'Oye
 S'écroule l'orgue
 Des vestiges blasonnés
 Fêlure matricielle 
 Au centre du baldaquin .

 Memoro mia kara
 Recouvre de voix hilares
 Au déplié de l'écho
 La chaste offrande
 De nos lézardes pantelantes
 Ma peau mon unique .

 Ralo de infanaĝo for 
 Craque la chaîne générationnelle
 En ses espoirs ses projets
 Ces jets de pierres
 Contre l'histoire
 Aux maillons rouillés .

 Saĝa estas nia lando
 Alourdie de forêts profondes
 Sous l'échauguette
 Ĉu vi memoras
 De la douceur des soirs de moisson
 Ma bien-aimée .

 La levitaj slaboj
 Apparaissent
 Rosissante rosace du néflier roi
 Prudent propagandiste
 Des fruits offerts
 Au meilleur d'entre nous . .

 Elĵetado de ombro al ombro
 L'épée de lumière
 Dans l'imbroglio des poutres enchevêtrées
 D'avec les murs pantelants
 Les oiseaux piaillent 
 Sous les effluve d'une pluie odorante .

 sangavidaj noktoj
 Entre nous traversées
 Les parures s'écaillent
 Par delà le zeste d'une frise 
 Ma main contre ta joue
 Ma pomme d'été .

 Ĝi estas laŭ la strateto 
 Que nous sommes arrivés
 Entre les arbres encorbellés
 Le pied léger
 Le menton en godille
 Nous les danseurs d'une passacaille .
 
 ( Photo de Bernard Lépinay ) 

 256 

Ajna indentaĵo meritas ramaĝon

 Ajna indentaĵo meritas ramaĝon   
 kanabaj fingroj
 larĝigi plenigan pajlon
 tia estas la linio de permeseco .

 Rememorigilo de aŭgusto
 farita el alta katedro
 kolorita de malgrandaj infanoj
 do iru la paŝtistoj .

 Sidante aparte
 en akcepto de la nedirebla
 la Merveille pleure son sautoir
 perdita en la labirinto de vortoj .

 La kantoj sekvas la andantes
 kun anomia statuso
 ombroj de la jarcento
 trairante la dimanĉan gruzon .

 Leviĝu poste falu 
 la parolantoj , signoj kaj lipoj
 la fingro ripozanta sur la ikonoĝi estas
 laŭ la ĉantitaj alegorioj .

 Unuflanke leviĝas la sciantoj
 sur la alia tero la vivantoj
 kondutoj de la menso
 inklina al kreskoŝancoj .

 Filtrilo ĉe la kruciĝo de la transepto
 rilate al la rompita koro
 ĉi tiu potenca deziro ami kaj esti amata
 en plenumo de la granda salto promesita .


 255 

La vagantoj de la ontologia afero pasas

 La vagantoj de la ontologia afero pasas
 laŭ la longdomo kun blankaj ŝtonoj
 haltu , salutu unu la alian , poste parto
 iuj portas dorsosakojn
 aliaj trenas ruleton
 au soleil point de plantes aux feuilles ternies .

 Li ne pasas
 ol la mezo de la floroj de la kampoj
 kaj trilogio
 lekantoj , papavoj kaj mirteloj
 proksime de la fosaĵo kie morta blanka kokino
 en restaĵo de akvo
 atendu la denton de la vulpo .

 blua estas la ĉielo
 kun tulipoj da sango
 virino trinkas sian teon 
 per etaj glutoj
 sen brili
 sub la lunlumo 
 La fingroj de Viviane .

 Fosu la vagadon
 blankaj plastaj seĝoj 
 hazarde de petita intervjuo
 sur la pelouse douce 
 piquetée du roussi des feuilles mortes.

 Li devas rememorigi min pri tio
 omaĝi
 al tio, kio estas donita al ni
 mia animo
 mia alia vivo
 ma romance .


 254 

Le nouvel être

 Ĉi tiu muro el malmoliĝinta sablo  
de delikva heleco
kun implikitaj sulkoj
kaŝante tutan urbon
kaj mi estas ĉe liaj piedoj
ombro sen korpo
registrita tuj .

Ĉirkaŭ mi
dezerta pejzaĝo
neniu vegetaĵaro
nuda tero
fendi rokojn
plata lumo .

La ĝenata horizonto
nuanco de Leonardo da Vinci
sen kodicilo
nenio rekonebla
nenio sciante trankviligi la okulo
d'avant la catastrophe .

mi estas sola
punkto de vivo ĉirkaŭe
neniu vento
daŭra raŭka spiro
for
la sono de marŝanta homamaso .

La besto estas ĉi tie
grandega malantaŭ mi
kaj mi estas kvazaŭ neniigita
antaŭ ŝi .

Ŝi metas sian manon sur mian kapon
Mi ne havas plu harojn
liaj fingroj sur mia vizaĝo
kaj mi ne plu havas vizaĝon .

Surradiita
Mi estas detruita
kaj tamen ankoraŭ viva
kaj montru al mi vespere
manĝante manĝpecetojn
falis de la supro de la muro .

Ĉu mi estis malakceptita ?
Ĉu mi konstante forigita el la urbo ?
Ĉu klappordo ne malfermos
ĉirkaŭ roko
et cet être énigmatique m'enjoindra-t-il de le suivre ?
Je le suivrai
en la labirinto
lumigita de lumo de nenie .

Rapidigante la ritmon
je trébucherai sur les aspérités du sol
timas perdi lin de vidon .

longa longa longa tempo
ni promenis
laŭ la renovigitaj montetoj
senĉesa
kiel ondoj de dunoj
pour au détour
perceptu la urbon de la elektitoj
ĝia ŝtala enfermaĵo
brilanta sur ĝia promontoro
super la ebenaĵo ĉirkaŭita de krepusko .

Mia amo !
ne retenu viajn larmojn,
plori .

" Vi scias
estis tempo pasinta
kaj nun estas la infano,
la nova estulo . "


253