Archives de catégorie : Avril 2020

Soyons de mèche

Si peu étendus    
les projets de la nuit    
en cette continuité des choses dites    
que la mer    
retirée    
laisse perler des larmes de sel.        
 
Au petit jour    
il y aura grabuge    
entre les tenants de la cause nuptiale    
sous un cosmos    
dégageant le bélier    
des pâtures de l'infini.        
 
Ne les marions pas    
sur le timon du char divin    
soyons de mèche    
avec le promeneur   
qui nez au vent    
gravit la Sainte Victoire.        
 
Posons le bât de l'âne    
sous les oliviers sombres    
griffons le fonds du ciel    
apostrophons les enfants du village    
grattons de l'ongle noir du peintre    
la parure des mésanges alentours.       
 
A l'heure toutes    
le message est clair    
sous les simagrées de la crise    
il y a la fréquence des ondes    
en prise directe    
avec les turbulences de l'Esprit.        
   
 
 
586
 

Le confinement

Le confinement faisait désert
de ce tissu des habitudes
la forêt bruissait d'aise
avec les chants d'oiseaux
l'air était pur
et les gens malheureux.
 
Sûr que ce n'est pas là
ce n'est jamais ça
le compte n'y est pas
où nous mène-t-on ?
y'a qu'à
faut qu'on
ils ne savent pas
mais cette marche elle-même
nous constituait et nous libérait.
 
Pensée d'exode
respiration nomade
le chaud et le froid en instance
soif de transhumance
soif des grands espaces du Souffle .
 

 
 
585
 

plume d’équilibre


Plume d'équilibre    
dans le cercle des Égaux    
à mesure    
d'un corps d'Esprit contenu    
la voix crachote des mots    
en instance d'un ricochet    
que la pensée accueille.        
 
Érection d'un squelette d'amour    
sous les lambris de la nuit    
construire    
déconstruire    
la hutte des origines    
du pied    
la coutume égarée     
entre caresse et joie.        
 
 
584

Un trou en montagne



J'avais laissé mes parents faire la route
j'étais descendu de voiture
pour me dégourdir les jambes.
 
Les montagnes étaient proches et très hautes
en fond de vallée j'étais comme écrasé.
 
Ils sont partis
et ne les ai plus revus.
 
Les neiges de fin de printemps
se disputaient la pente
à grands renforts d'eaux torrentielles
que l'encavement du lieu rendait bruyantes.
 
Des pierres et des rochers ponctuaient le regard
comme autant de points d'accroche
à la lecture des lieux.
 
Je me suis approché du pont
qui enjambait un torrent furieux.
 
Dans la pile du pont
il y avait un trou
d'où sortait une corde.
 
J'ai tiré.
 
Des cailloux sont venus,
de petits fragments
qui ne demandaient qu'à sortir.

J'ai laissé la corde
qui a reflué vers l'intérieur.
 
J'ai retiré la corde
et de nouveaux cailloux sont sortis.
 
Après plusieurs allers et venus
de ce travail de déblayage
des voix rauques de paysans
se sont fait entendre.
 
J'ai arrêté mon action 
pour continuer en imagination.
 
Il y avait un passage
un trésor
une cassette
une bourse de cuir
de l'or en pépites.
 
Le temps a passé.
 
Je me retrouvai dans le village près du pont
des maisons basses de pierres sèches tout autour
marié avec enfants
et ma tâche d'éleveur paysan
me prenait tout mon temps.
 
Les montagnes toujours hautes
devenues familières
encadraient les saisons
la piste caillouteuse avait fait place
à un étroite route goudronnée.
 
Le trou était toujours là
une vie ne suffisait pas à éclairer le mystère
c'est moi qui avait la voix rauque
les cheveux blancs
la démarche vacillante.
 
 
583
 

Sourire guitare

 
 
 
 Visage chiffonné    
 des rideaux de la nuit    
 amorce d'un silence.        
  
 Vierge caudine    
 aux menus bras blancs    
 sous la veste d'épeautre.        
  
 Sourire guitare
 aux lèvres purpurines
 et voix de miel.
  
 Phylactère anisé
 de notes aux yeux de braise
 sous le halo bleu
  
 Gorge franche
 aux tendons effilés
 elle est unique.

 Unité de soi 
 unité du monde 
 unité de l'invisible. 
  
  
  
 582 

Au trait d’abyssinie

 

Au trait marqué    
d'Abyssinie    
sur ton front fripé par la sueur     
cheminant    
vers celui t'attendant    
sensation irisée    
sur la braise    
lumières ceintes    
d'une torche    
en beauté    
dis-moi    
le tout de ta musique    
bel ange d'amour    
fougue convertie    
d'esprit en son souffle    
cavale coronale    
d'ambre marin    
sans que se perdent    
les perles    
lueurs d'opale    
au reflet du jour    
sans que finisse    
la nuit    
dans l'entrelacs de nos bras.              
 
 
581

Les doigts de tante Jeanne

 

Un galet roule     
sous le torrent des mots    
entre lèvres et sourire    
telle corne de brume    
écueil évité    
au risque d'éveiller la caresse permise    
le fruit tombe sur l'herbe    
baiser d'une rencontre furtive    
en accord avec le passage des nuages    
d'un ordre échancré    
sans regret de fine fleur    
sertie d'une larme    
posée déposée    
sur le bois de potence    
agreste entrée en matière    
d'une caresse douce    
faites de miel    
juste le temps de la conversation    
qu'il était convenu de poursuivre    
en cette station des attentes    
debout    
au centre millésimé    
d'un labyrinthe sans contrepartie    
façon de concevoir l'échappée    
à travers bois    
voiles déchirés    
par les doigts de tante Jeanne.        
 
 
580
 

De grâce élevée

 

De grâce élevée    
le corps empli    
du glissement des notes claires    
au sortir du silence    
à l'entrée du silence    
sachant capter le vent    
la voilure glisse    
le long des berges    
un frisson de sons    
dans l'élan de nos dents    
croquant la parure    
d'ailes séraphiques    
entre pouce et majeur    
au clapot de la source.        
 
 
579
 

La mésange bleue

 

De la cage de fer   
graines embastillées    
la mésange bleue    
fripe l'air    
de son aile éventail.        
 
L'horizon vibre    
entre blanc et noir    
de jour et de nuit    
l'offre entre ciel et terre    
allie séparation et unité.        
 
Le mur tranche    
et propose de droite à gauche    
l'aventure elliptique    
d'une écriture hébraïque    
propitiatoire tout autant que soudaine.        
 
 
( photo de Caroline Nivelon )
578
 



De nuit sur le parvis

 

De nuit    
sur le parvis    
notes grises au lever du jour    
la rose éclot    
des doigts de l'âme    
esprit tutélaire    
au pépiement d'un moineau    
sans que le gravier crisse    
en cris et rodomontades    
chasse les brassées    
du haut des campaniles      
élevés aux siècles de misère    
de nos ancêtres recouverts    
d'une terre affleurant    
les paniers d'osier    
en remontée de la fontaine    
corbeilles pleines du linge de maison    
séché sur le grand fil du Pradou    
dont le bâton en son milieu    
soutenait le son des sabots    
métronome de mes mots    
sitôt le cerisier passé    
à l'ordre du jour    
d'un amour    
de nounours éploré.        
 

 ( photo de Caroline Nivelon )
577