Archives de catégorie : Année 2025

Fine danse à l’orée du ciel

Fine danse à l’orée du ciel
Et Finette l’aimait
Ce cadet tout droit venu de Palestine
À conter larmes et morts
Par les ruines accumulées
Poussière à soulever du doigt
Le béton hérissé de ferrailles.

Une couche grisâtre
Couvrait les ruelles étroites
Reflet d’une beauté passée
Hors des moucharabiés
Hornant façades fissurées
Dentelles creuses d’une bouche édentée
Bombifiée par Lucifer.

Quelque morceau de plâtre
Avait permis le tracé d’une marelle
Où des petites filles aux robes déchirées
Virevoltaient princesses messagères
Sur un terre-plein inondé de lumière
Soumis au surgissement de l’alerte
Plongeant les lieux dans un silence odieux.

Soudain un craquement sec
Faisait s’élever des volutes de poussière
Puis des cris et des gémissements
Des crissements de pneu sur la terre battue
Suivis de sirènes hurlantes
Que les murs déchirés faisaient rebondir
Comme ballons de baudruche.

Face à face
Les vélos posés contre les palissades
Ils eurent le temps
De contempler l’avancement des travaux
Puis se dire comment ça allait chez eux
S’ils avaient suffisamment à manger
Et que les petits ne pleuraient pas trop la nuit.

Dans les rues désertes
Un vieillard tirait sa misère
D’un pas mal assuré
Avec un grand cabas noir
Pendant qu’un chat couleur sable
Suivait à bonne distance
L’homme au visage baissé.

Une pincée de matière friable
Coulait grise dans une fissure
À l’ombre de ce qui fût une échoppe
Je m’approchais pour voir surgir
La tête d’un reptile
Un tout petit reptile
Balançant sa langue d’un côté l’autre.

Nous avions déjà couvert d’autres lieux
De désolation et d’inimaginables destructions
Sans que notre respiration ne s’épuise
Sans que notre sang brûle
Mais jamais n’avions rencontré de telles souffrances
Que même la maigre végétation sinistrée
Comptait ses dernières traces de verdure.

Plus de muezzin n’appelle à la prière
Du haut d’un minaret
Encore debout mais chancelant
Pendant qu’une ombre traverse la rue dévastée
Enjambant les gravats
En soulevant sa gandoura
D’un geste mesuré.

Plus d’oiseau dans l’azur brûlant
Les rues dégagées au bulldozer
Semblaient des tranchées ouvertes après un cataclysme
Des carcasses de véhicules
Portes défoncées
Étaient de rares touches de couleurs
Dans un univers de fièvre suspendue.

Un chien passa
Semblant pressé de rentrer chez lui

Le museau au raz du sol
Langue pendante
Contournant les blocs de pierre
Queue rabattue sur son corps décharné
Il allait vers le soleil levant.

Quand nous reverrons-nous ?
Quand nos mères se rencontreront-elles ?
Quand notre père se retournera-t-il ?
Quand nos enfants joueront-ils ensemble ?
Quand parmi les cendres
Pourrons-nous construire un campement ?
Où déposer la feuille blanche du poète.


1638

En bord de route

En bord de route
Cette histoire de poule morte
À battre sa coulpe
Devant l’incivilité de l’avoir tuée
Cette poule morte
Gisante dans le fossé.

Quelques jours plus tard
Plumes éparpillées
Ce fût tendre mélopée
En la forêt de Laroussière
Les parents attendant
Le passage de l’épicier.

Se jouer des larmes
Aux Dames-des-églises-romanes
Vêtues de leurs habits noirs
Lapineaux dans l’herbe grasse
Provocant le plaisir
À petits cris de souris grises.

Cuisses ouvertes
Bourgeons turgescents
Entreront dans la danse
Par vie crépusculaire
Un chapelet d’impétrants
Faisant tinter l’angélus.

Ailé élan
Des gentes personnes
Écran superbe
Sous la soupente des amours
À mourir de rire
Quand tête flotte comme un lotus.

Les jeunes filles joignent bols et casquettes
Mains menues
Embrasant le mouchoir rouge
Des rentes menstruelles
Pour qu’un jour
Claque du doigt la flute des vertèbres.

En rond
Ces poupées incassables se redressent
Barbie de réalité feinte
Écartant du hasard
L'indocilité
Des frondaisons de l’à-plomb.

Éludées pommadées
Tenant quelques brindilles
Elles secouent en cadence
Au niveau de l’eau
L’impermanence d’une aurore en crépuscule
Belle Ophélie au demeurant.

La bulle était fine
Pour à la pelle
Recouvrir de terre
Le Miroir
Humiliant la Planèze venteuse
De marques de tendresse.

Au panier plein de victuailles
Au bien-aimé d’une paupière fermée
Rajoutons le vinaigre
À grands coups de marteau
Dans la flaque d’eau
De tant de vies à chérir.

La Dame devint grande
La soie de sa traîne
Frôlant les épineux
Des chaudes journées d’été
À recueillir le suint des bêtes
D’une seringue de bouillie blanche contenue.

Je fis chauffer les fers
Dans le brasero
Pour d’un geste fumant
Infliger la douleur
Sur le sable blanc
Des dunes d'avenir.

1637

Une nuit parfaite

Une nuit parfaite
J’écope une dernière fois
Les marches du palais
Pupille dévorant l’iris
Devant le sang
Déposé à la louche
Sur une mince couche d’ombre.

Fuite stéréoscopique
Des chiens lapent les traces noirâtres
Sous un soleil décollant paupière lasse
Les cils arbustifs d’un regard de rien
Enclavé dans la mangrove
Parmi des singes fripant compulsivement
Les feuilles de bananier.

Narcisses pantelantes à leurs mains terreuses
Les mendiants défilent lentement
Soulevant la poussière des siècles venue
Au son d’une flûte carnassière
Faisant sauter les insectes
D’un bord l’autre
Le long de la sente oblongue.


Prunelles des pruneliers
Aux bassinoires noires de charbon
Saisies en saillie par de raides queues
S’accrochent les chardons
Mirobolants cancrelats
Sapant à coups de serpe
Les tiges fermes des blés mûrs.


De grosses pierres barrent le site
Comme choux à même les galets
Caressant jusqu’à la démesure
Le pelage des chiens roux
J’ouvris la voie
Arpentant dans les étoiles
Les traces scalaires de l’Univers.

Des débris rappelaient le naufrage
D’Ursula aux dents ébréchées
La patronne des récifs
Que le soleil rouge des incendies
Harcela d’un sourire navré
Epaisse couche de brumes
Signée par les mouettes égrillardes.

Culminant par-dessus la futaie
Du tréfonds de la forêt
Un hunier de circonstance
Agitait ses draperies pourpres
En toutes directions
Fomentant méli-mélo
Des jours de colère à venir.

Dégoupillant l’âme
De son œuvre de chair
La voie était tracée
Palpitante
Au retour des basses eaux
Par l’empilement des coquilles
Dégorgeant leur mousse bulleuse.

Cétone écorniflé par le passage d’un crabe
Morsure grandeur nature
La vaguelette
Déplaçait l’algue verte
À la merci des falaises
Tombant telles des serres d’aigle
Sur l’éponge aux poils urticants.

Quelques gouttes de pluie
Coulaient sur la paroi
Abreuvant les ridules de la roche
Posées de toute éternité
Sous l’entrelacs d’une végétation
Admise par mousson d’été
En fin de soirée.

Zygomatiques effleurés
Des doigts fins de la camarde
L’envol des mouettes fût de courte durée
Laissant au ciel clair
La mémoire des roselières
Jadis déposées au sortir de l’aber
Par des mains viellissantes.

Sagacité propitiatoire
Ecologe permissive
Laissant suinter coulures d’esprit
Par monts et par vaux
Saga africa
Face à la tendresse
D’un jeté de nuisette par matin propret.


1636

Roses éclats

Roses éclats
De tremblements
L’ éternel accueil
Colorant de poix
Les portes de chêne
Qu’entraînent en fond de poème
Les plongeurs d’avenir.

J’ouvre le ciel
Je ferme le ciel
S’effacent les pas
Sous une cordée de nuages
Pour en dernière instance
Allumer bougie de l’âme
Au ressaut de la confrontation.

Puisatier
Au regard attendri
Contemplant l’arrêt du train
En rase campagne
De la Mayenne l’élu
Jusqu’au pont de Nantes
J’opérai un tourniquet.

Crépue chevelue
La pensée étranglée
Dans le cœur des horloges
J’ai accepté par dérision
D’allumer le trait de nuit
De noircir le jour
Juste pour un silence.

Un petit bouquet de fleurs des champs
Disposé contre les vibrations
Des étoiles nos sœurs
Errantes passagères
Sitôt écrites
Lettres étranges
Jetées au panier.

S’il te plaît
De me tendre la main
M’oblige à tourner la page
Du grimoire en peau de veau
Pétales de rose jonchant le sol
Comme recueillir l’enfant
Révélé en catimini.

Ta main
Agitée dans une touffeur de vapeur
Egrène le mimosa
À portée d’une enveloppe
Serrée contre ton cœur
Alors qu’une dernière hirondelle
Cligne de l’œil.

J’attendrai de te revoir
Pour lever mon verre
À hauteur de regard
Puis cogner le talon sur l’embarcadère
Quand passe le chant des peupliers
En pleine couvaison
Des chatons de l’enfance.

Enorme écouvillon
Drainant par la soie du sanglier
Les poussières de la veille
Membres repliés
Dans l’alcool de poire
Retour de couches
D’un coup de machette décochée.

Ferme les yeux
Puis ouvre-les
Pour perles de rosée
Couler d’abondance
Rayon de lune cherchant codicille
À suivre rapetassage
D’un linceul chiffonné.

Fleure bon l’échappée vernaculaire
De ton souffle
Foulard autour du cou
Ô femme arc-en-ciel
Mirlitonnant quelque chant
Au déplié élevé de ta voix
De grande tenue cathédrale.

Egalement complices
Une multitude d’êtres affluèrent
Portant hauts les faisceaux de la guerre
Là où tombèrent dans le Trou
Jadis pour faire vite
Les guerriers de l’oubli
Au risque d’aller ailleurs.


1635

Ne pas savoir qui il est

Ne pas savoir qui il est
Ce passé présent
À renaître
Où tout se dit
À hue et à dia
Dans ce monde de syncopes.

La bougie brûle des deux bouts
Et m’éclairent à la fois
L’adieu et le jour qui point
Devant la gargote
Sans regarder en arrière
Sans être le héros magnanime.

Médaille et tout le tintouin associés
Feront reptile d’un bout de corde
Vision sainte
Nourrie d’une maigre chair de lumière
À tout ce qui sied
De vivant sur cette terre.

L’un d’eux se tient
À la pointe
Attelé sans l’être
Juste penché sur l’éperon
Au sein même de toutes choses
Fier de sa prestance.

L’autre, dépourvu de tous principes
Sanglote et personne ne le blâme,
Refusant son corps de sagesse
Il omet de rendre grâce
Pour façonner son cœur
Lèvres pincées à même le charivari.

Un jour viendra
Fait de sang et de peine
À ramer par la traverse
Jusqu’aux terres oubliées
Que suivent à petites bordées
Les marcheurs du douanier.

Pleurez bonnes gens
Devant cette âpre lutte
Qui soudain coquilles rêches
Empilent inconsidérément
Les lieux-instants de vie
De la marée montante.

Filent les mots de messe basse
Sagesse superficielle
Sonnant à la volée
Sur la voie ferrée des frustrations
Que les charges de dynamite
Peinent à soulever.

Se rencontrer
Lune et soleil confondus
Discernant le réel
En grande acuité
Mains jointes
Par la vulcanisation du quotidien.

L’idée de naître
M’est venue par temps de pluie
Et de versatilité
Au creux des goules carnassières
Pincée de sel élégamment posée
Sur le mufle canin.

Passage obligé
Remémorant l’offre principielle
D’avoir à émettre
À l’heure dite
Les dix mille louis d’or
De l’extase en Bretagne.

Et de remettre le couvert
Pour que rien ne se perde
De cette étreinte consentie
Sur le sable blond d’une ultime douceur
Eviscérée par le rostre
D’un catéchumène de circonstance.

1635

L’un tenant l’autre

L’un tenant l’autre
Par la main
L’autre tenant l’un
En sous-main
Les feux s’éclairent
Bougie à brûler
Dans l’ultime volute.

Partir dans la nuit sidérale
Prière sans écho
À deux
Toucher le fond
Au crépuscule
S’abandonner
Au gré des vagues de l’instinct.

Nom de la durée :
« Inattendue abondance »
Un don de la vie
Âme singulière rencontre âme singulière
Unique accès à la transformation
D’un amour inachevé
Gardant l’esprit du lieu.

Fissure méridienne
Juste le souffle du vide
En traverse des herbes sèches
Où décapiter la nuit
Promesse de sang
À faire sortir de l’alcôve
Les djinns de la louange.

Regard à propos
D’un silence
Que jamais les paroles imaginèrent
Sur les quais de Seine
Pour un secret
Qu’aucun oracle ne délia
Pas même l’unique instant.

Le vieux cheval au milieu du champ
S’est immobilisé
Parcouru par de noirs frissons
Oublieux des pâtures d’antan
Hors-temps
Sans se douter
Que tout arrive à point.

1634

La grille équanime

Crispation d’un sourire
En pleine efflorescence
La grille équanime
Enregistre ce qu’il faut dire
Et puis compare
Avec le ciment compacté.

Energie pure
Atmosphère nettoyée
La matière pénètre toute chose
Tant que lumière noire
Communique l’ineffable frisson du rien
Sans autre dénomination.

Affaire indicible
À chasser la poussière
Dans le jour naissant
Là où ondule la cellule
Simple cellule
Donnée à la volée.

Un jet de cauris
Endimanche les causalités
Dans un ciel élevé
Contre les balustrades de l’épopée
Tôt lancés
À contrechamp de qui rassemble et nourrit.

Murmure du poème
À la porte du temple
Chasse les chatons de l’esprit
Chatons velus déposés
Entre les monts bleutés
De tes seins de lune.

Ventre bien rempli
Nu dans la fange
Il eût été permis
De boire et de chanter
Jusqu’à point d’heure
Dans un éclat de chair voilée.

À nouveau ensemencée
La végétation s’est parée
D’un peu de temps
Pour déployer les pensées superficielles
Du pauvre hère en péril
Poing levé d’imprécations féroces.

Les grandes écritures
Blanchissent le tableau vert des parturients
Enchaînant toute vie
À l’étalage du malappris
En vers alternés
De quatrains et prophéties déclamés.

Voire les apparences
Modifie la saignée
Quand refuge éloigné
À la merci d’une réalité de pacotille
Le non-attachement se pare des laitances
Venues de la source.

Evitant le poivre et le sel
Poisson désossé
À la purée d’ail destinée
Nous eûmes bouillon de viande à profusion
En ces temps de forte instruction
Sans coups de règle sur les doigts.

Ne nous cherchons pas
Soyons le déjà vu
Aux terrasses du ciel
D’une concentration exsangue
Le jeûne avec soupe d’oignons
Permettant le son des phonolites.

Les nuages partent en lambeaux
Il pleut
À mille pieds de haut
Les sommets disparaissent
Restent pour aujourd’hui encore
Quelque divagation à pointe de diamant.



1633

Au patrimoine spirituel de la tradition

Dans le carénage d’un ciel bleu
Soutenu en haute protection
J’ai plongé dans l’insécurité
Par la voie des nuages.

Et de m’appuyer sur les certitudes terrestres
Avoir, pouvoir
En renonçant à l’autorité naturelle de la création
Être ainsi détrôné.

Dans l’ultime détresse d’une ouverture sans fenêtre
J’ai touché le fond
Et ma vie s’est réjouie du séjour des morts
Par la comparution devant l’ange.

Animalcule végétal
En bas d’encadrement
Privé de terre et sans bagage
Je me suis souvenu.

Que mes valises étaient emplies de reliques
Qu’il existait un fil dans notre lignée
Et qu’à l’extrémité du fil
Il y avait flambeau et flamme ravivée.

Humus couvert des feuillages du passé
En prenant l’air
Il s’est agi de puiser à nos sources
Au patrimoine spirituel de la tradition.


1632

Étrange lunaison

Étrange lunaison
Parole et Silence
Encore séparés
Attendent et espèrent se rassembler.

Vient le rite de l’ouverture de la bouche
Un flot incontrôlé bouillonne
La floraison première trop vite prononcée
S’échappe tout aussi vite.

Par le silence
Les voix subtiles communiquent les messages essentiels
La parole devient muette
Le silence parle de lui-même.

Entre le haut et le bas point de rupture
Il y a transmission de la légèreté
Sentiment de communication continue
Avec l’invisible.

Rêvons
C’est l’heure où la burle pleure
Quant l’amitié en sa délicatesse
Met à table les étoiles.

Lune parole et silence
Regroupent les géants de l’air
À Moudeyres mon frère
Comme de grands lacs de lumière.


1631


Opacité des écluses du ciel

Opacité des écluses du ciel
Lors le calife fût prince
Il reçut en partage
L’œil aux couleurs de palissandre.

Sans bousculade
Dans la fraîcheur d’une aube finissante
S’offrait par le travers du jour
La remontée des oies sauvages.

L’accalmie remédia
Aux soucis de l’âme
Pour petit arbre des abysses
Engendrer pensée ultime
.

Trilogie du fond de l'Univers
Le vieil homme narra colères et querelles
Qu’un coup de griffe assassine
Avec du sang jusqu’aux chevilles.

Retour aux origines
À piétiner l
'endroit où s'étendre
Histoire commune
Chargée de paillettes devant les yeux.

Lune soleil
Importe peu
Aux enfants volés
J’accorde fin regard.


1630