Tous les articles par Gael GERARD

Recension d’avant l’éveil

Alors le Verbe se fit pénétrant   
Aux roses de Damas   
Était la recension   
Des pleurs d'aimer.      
 
Simple jalon posé sur le Chemin   
Que déjà la native innocence   
Déchirait la vêture   
Aux marges du voyage.      
 
Sont venus   
À la ressemblance   
Les signes de la Terre   
De s'arracher du Tout.      
 
Nous les mendiants   
Caressons les nuages   
En retombée de pluie   
Pour être pluie soi-même.      
 
Creusons les ornières   
Pour laisser passer le charroi   
De l'errance d'avoir à Être   
À même la joie et l'éclat de la Vie.      

Ouverture de l'âme   
Dans son manuscrit   
À petites retouches   
Sur les lèvres fiancées.      
 
La feuille est tendre   
Devant la saillie   
À rendre les colonnes du temple   
Palpitantes jusqu'à l'instant.      
 
Vague puissante   
Au cœur du Soleil   
Quant l'autre source s'alimente   
À l'écho du plus que Soi.      
 
Et l'Enfant lumineux de s'étendre   
À côté du Vieillard   
Magnifique pantin malicieux   
En parfait état pour la représentation.      
 
Douce déchirure   
Contemplée le soir à la veillée   
Quand se calme la vie tumultueuse   
Des conditionnements obtempérés.   
 
Pour ne pas marcher   
Sur les blessures de l'an venant   
Invitons l'arc-en-ciel   
Du beau après l'orage.      
 
À retenir du mirage   
La pulpe endormie   
Il est passage divin   
Pour le baiser du lendemain.      
 
1391

Mélusine la rouquine

Frais neigeux   
À la mode des perce-neiges   
Que rencontre le coutre charmant   
Du bleu des terres lointaines.      
 
Chaude brûlante   
Aux assises portée pâle   
La longue capeline   
Comptait ses interludes.      
 
Non loin non voulu   
Le déversoir aux rases sèches   
Restait bloqué à Pierre Blanche   
Au nom de la raison.      
 
Furent-elles de mèche   
Les mines anti-personnelles du Laos   
Perçaient jusqu'à l'os   
Le frêle enfant du bord de l'eau.      
 
Mêlant la sueur et la terre rouge   
Le fleuve jaune coulait   
Rapides à fleur d'écume   
Sur la peau rose de l'ami d'Oz.      
 
De la voix   
D'un tour de main   
Le pagayeur ramena la clarté   
Le long de la berge apaisée.      
 
Épousant du regard   
La jungle silencieuse   
Les morts pouvaient attendre   
Leur sépulture.      
 
Et de narguer la pleine lune   
Les officiants des cultes anciens   
Couraient pieds nus sur le chemin   
À peine caressés par la poussière.       
 
Piquetant quelque rare nourriture   
Les volailles se mêlaient aux entrailles   
Du porc tué la veille   
En Souvenir du Grand Esprit.      
 
La guerre roulait ses souvenirs   
Un ciel rapeux   
Empreint des cisailles de l'hélico   
Portait haut le fléau éternel.      
 
Main posé sur le front   
Il fallait le regarder   
L'homme blond au sourire de misère   
Saisissant la vie de sa harpe irlandaise.      
 
Il y avait rumeur au château   
Près des coteaux aux pampres roux   
À la fenêtre Mélusine   
Laissait voguer sa musique.      
 
( Peinture de GJCG )
 
1390

Belle infante

Gamine des prés sacrés    
À l'étamine courbe   
Que danse et brûle   
La parure du soleil   
Dans ses yeux doux amers   
Luit Lumière   
Et se cache   
Ô surprise   
Le chant des anges    
Ombrant de leurs rondeurs   
Palme océane   
En souvenir des morts   
Ce qui nous rassemble   
Nous les petits hommes de bien   
En Esprit   
Compagnons de voyage   
Suivant légion disciplinée   
Le bourdonnant vol de la Reine   
Que le jour accompagne   
D'un plaisant apparat   
Pour barbes rêches   
Et scories des chemins secs   
Contempler   
D'un baiser d'amour imaginé   
L'évanescence   
Du cou penché   
Jeune fille couronnée   
Déprise de parentèle   
Jaillie comme une fleur
Dans la coudée du coudrier   
Belle infante   
Évaluée au bruissement du chêne   
Brassant ce que le vent dérobe   
Sur les plateaux sableux   
Pour diriger   
Chef oscillant d'une tendre manière   
Les moutons et chèvres de l'Aveu   
Vers les sources de la Vérité.      
 
1389

Silouane et Élise

Silouane   
De loin paraissait   
Le dernier sapin de la lignée   
Pour qu'un peu on le plaigne.      
 
Songeant à la terre noire   
Qu'il quittait à petits pas   
Son bâton toucha la pierre   
Des derniers passants déposée.      
 
Ne jamais admettre   
Que le mal sévissait   
Pour aller quérir    
Le rire et la joie.      
 
Filant grand train   
Dans les halliers   
Le sanglier froissa sa méditation   
D'une bouffée de souffle chaud.      
 
Ne demeurer pas   
Sur le passage de la Bête   
Les poils et la souille étant glyphes sacrés   
Pour le compagnon des terres grasses.      
 
Collines et vallées se succédaient   
Avec parfois un torrent à traverser   
Sous les rais de lumière   
Des feuillages de la rive.      
 
Remonter la pente   
En évitant racines et  branchages   
Augurait du point de vue proche   
Déjà là dans l'effort consenti.      
 
Préférant l'heure qui vient   
À l'avenir à tout prix   
Il demeurait devant les portes d'airain   
Cet inconnu à l'âme assoiffée.      
 
Aux frontières du désordre assumé   
Lui, l'indompté des terres basses   
Ne pouvait reprendre haleine   
Que dans un aveuglement circonstancié.      
 
Et de rencontrer le bâtisseur   
Et de guider voiles serrées   
La barque vers le doux savoir   
Du langage des êtres purs.      
 
Pleine et délicate   
La lune en montée graduelle   
Gardait par devant elle   
Quelques nuages de défiance.      
 
Pour maintenant   
Charmante Élise   
Boitiller bas derrière le dernier fils   
Silouane, de céleste portée.      
 
1388

Trois doigts trois pattes

Trois doigts trois pattes   
En perdition   
Sur la table de frêne   
Ont enjambé la barrière   
Juste pour rigoler, par erreur.      
 
Prosper l’épinard   
En ses errances   
Avait commis pareille incartade   
Celui d'avoir souri   
Plutôt que de parler.      
 
Lumières jointes   
Rassemblant les origines   
Sans flotteur attenant   
Il fût décidé d'expédier les âmes seules   
Par dessus le bastingage.      
 
La vie est même   
Mémento des mots levés tôt   
Marmoréennes pensées    
Tribulations de cache-misère   
Émiettées à la sauce gribiche.      
 
Murons-nous    
À Murano ou ailleurs   
Derrière la vitre fumée   
Barrant de nœuds invisibles   
Les soupirs de l'air.      
 
Et la buse de descendre    
De son perchoir   
Repérant le mulot   
Dont le museau frémissant   
Bénit l'herbe épaisse.    
 
Marche athlétique   
Singeant parade militaire   
À mesure de la montée en puissance   
Des contrôles de la Haute   
Sur la Basse-cour des Sans.       
 
Tiens-toi bien   
Ne demande rien, excuse-toi   
Soit la charnière silencieuse entre les générations   
En t'affranchissant   
De l'impasse de tes pulsions.      
 
Ne franchis le Rubicon   
Qu'au salon des intentions   
La Bête guettant le faux-pas   
Du fantôme, le petit gars   
Qu'il fût jadis.      
 
Dans les parages    
Il ya le mage   
Des forêts les premiers occupants   
Sachant porter secours   
Aux enfants égarés.      
 
Point de cris   
Dans cette vastitude   
Dont les souvenirs multiples   
Barre d'une danse en rond   
Le cache-pot des remontrances.      
 
Bravant le Vide   
Soyons la houle du Vieil Océan   
Et les yeux qui jamais se ferment   
Devant l'assise adventice   
De la femme, de l'homme, ayant grandi.      
 
1387

Ne négligeons pas le cyclone

Ne négligeons pas le cyclone   
Au sortir du bastringue   
À se trémousser du croupion   
En se pendant aux élingues.      
 
Un grand bazar nous attend   
Assis aux bordures   
De la courbure du temps   
À s'emparer de la machine hurlante.      
 
Se creuse à la main   
Le passage inaugural   
À faire sécher la mandoline   
Fleur des herbes frissonnantes.      
 
Élevons le taux du saumâtre   
Sans que le rebelle envahisse la page   
Et se permette d'infatuer   
Le pommeau d'argent.      
 
Sur le pavé luisant   
Frappent les sabots des chevaux   
Âme des lavandières   
Chantant en bord de l'eau.      
 
Névrites allégées   
En ces lieux de coques déposées   
Effleure du bout des doigts   
L'entrée en ville des malfrats.      
 
Seront accueillis   
Comme stigmates de la rougeole   
Les bubons de l'hiver   
À s'étendre sur le quai de la Râpée.      
 
Niches noircies   
Aux portes de l'octroi   
Nous fûmes référés   
Au bouillant banc du désespoir.      
 
Cil à cil   
En brassant le houblon de la veille   
Les gens de plaine nous avertirent   
Que les cordes étaient tendues.      
 
Breuvage insensé versé le soir à la veillée   
La Colombine était au centre   
Des formes du panier d'osier   
À la descente de calèche.      
 
Ne barguignons pas   
Pourpoint dépenaillé   
Au risque de perdre casquette   
Devant le clapotis sec des souliers à clous.      
 
Nous reviendrons pendre le linge   
Nous les sales mômes de la Cité   
Puis décoller les vieilles affiches   
Du dernier rassemblement des offices.      
 
1386

Le loup rôde

Entre les mots le loup rôde   
Tout de sagesse acquise
À calmer, à réfuter, à rebondir  
Quelques trouvailles d'avenir.      
 
Ton arbre est plus haut que le mien   
Mais le mien est plus beau   
Par ses inextricables boursouflures   
Grappes de la houppe terminale.      
 
Les koris de la vie   
M'ont livré la réalité   
Pour tête contre la poitrine   
Boire à la source.      
 
Les jours cesseront d'aboyer   
En quête d'un drap   
La ténèbre tombant d'un coup   
Terrible catastrophe.      
 
À suer la tête vers le ciel   
La palanche sur les épaules   
Le bruit glacial des crochets   
Augurait d'un frisson de toute extrémité.      
 
1385

Lire par petites lampées

Lire par petites lampées   
Amnistie la galerie  
Celle des glaces   
Partant à la débâcle   
Le long des pensées inconcevables.      
 
À la une, à la deux   
Les pendus de Villon   
Se sont affalés sur le quai   
En accomplissement du temps   
Qui les avait élevés.      
 
Du sureau plein les doigts   
Rougissait les lèvres   
Expérience visionnaire   
À la portée des enfants   
Parrainés par les anges de l'effarement.      
 
Couperose détectée   
Saillie d'une coupe franche   
Édulcorée des choses de la chair   
Caillebottis des cailloux de l'esprit   
En connaissance du tout venant.      
 
Passées la fantaisie des images   
Griffées en bord de plage   
La musique du vent   
Traçait sur le sable   
Des visions de lumière.      
 
La source jamais ne tarit   
Entre veille et sommeil   
Adviennent les sept planètes   
Dans le cercle d'éther pur   
Pétales d'un doux regard.      
 
1384

Prévenir n’est pas jouer

Prévenir n'est pas jouer   
Jouer n'est pas ternir   
Ternir c'est atterrir   
Atterrir c'est en rire.      
 
J'ai pas les codes   
Je suis pas à la mode   
Et quand la mort rôde   
Je me régénère.      
 
Et puis ça arrive   
Là, sur l'autre rive   
À riveter les pièces métalliques   
Jusqu'à en faire la Tour Eiffel.      
 
J'accède à la réalité   
Sans voir ce que l'autre voit   
Comme on boit un coup de trop   
Sans devenir un chameau.      
 
Sage jusqu'à passer la tête   
Par la fenêtre guillotine   
Mains sur la vitre   
Visage dans le vent.      
 
Je perçois donc je suis   
Je parle aux arbres   
Des informations m'effleurent   
Les émotions fleurissent.      
 
J'ai du respect   
À m'en clouer le bec   
À coups de mandibules   
Prêtes à faire des bulles.      
 
Je prélève   
En me levant tôt   
Les mots de tout, les mots de rien   
La signature du terrain.      
 
Je me transforme   
Sans que le loup me prenne   
Sans que l'énigme m'atteigne   
Au palais de la Reine.      
 
Je me décale   
Touche la clavicule   
Hors l'euphorie du bol   
Blessure à retrouver à moindre mal.      
 
Je modifie mon cerveau   
Sans me fier aux mots   
Mais en serrant très fort   
L'anse du seau à eau.      
 
Je disserte en l'occurrence   
Sur le prêt-à-porter des années   
Sachant poser l'aiguille
Où la vision est en couleurs.      
 
1383

Mêler la flamme à la tourbe

Mêlant   
La flamme à la tourbe   
Ils eurent tôt fait   
D'empanailler le cercle de feu   
D'une brume suspecte   
Chargée d'escarbilles   
Crépitantes et odorantes.      
 
Puisant à même le sol   
La terre de bruyère   
Ils franchirent la passe   
Pour se retrouver devant le grand mur   
Au visage incrusté   
De celui qui nous attend   
Sorti tout droit de la matrice   
Gluante échappée à l'encan de la nuit.      
 
J'atteste   
Qu'en repoussant les limites   
La pierre sculptée ouverte   
Poussières de lumière propulsées   
De l'ordre de l'extase   
Sans réevaluer ce qui est   
La justesse vérifiée   
Aux mains de l'espoir.      
 
Cette demeure   
À la pergola incertaine   
Devant les yeux   
D'un corps arc-bouté   
Les membres agités   
Hors du langage   
Raclait un brouet de mots   
Chuchotés dans la foulée.      
 
Père m'a mis à l'oreille   
Cette drôle de pendeloque   
De végétaux rassemblés   
Alors que broutaient les herbivores   
Dépoluant à foison   
Le fond de la vallée   
Écarquillée entre les lèvres de la montagne   
Pouffant d'un rire de circonstance.      
 
Mère m'a pris la main   
Effeuillant au passage des hongres   
Les feuilles chargées de tanin   
Pour qu'ensemble   
Régler les comptes   
En collaboration avec les tenants de la solidarité   
Nous qui avons arraché la menthe et la jonquille   
Pour faire plus propre.      
 
Le noyau perdure   
Ultime liberté   
D'un au-devant de la mémoire   
Pour cette dame   
Le chat sur les genoux   
Le jardin merveilleux à dessein   
Colmatant de possibilités ultimes   
Les justes gestes de la création.      
 
( Peinture de GJCG )
 
1382