Tous les articles par Gael GERARD

Il vint sans mot dire

 En toute légitimité
il vint sans mot dire
au plus charmant moment
dialoguer de l'astucieux charpentier
paré de sa colombe .

Mon âme en exaltation
de conciliations en actes propitiatoires
répand sur la tourbe des moissons noyées
le voile des hypothèses
que l'engagement concède aux peurs .

Écartant toute chair
je m'enquis d'une rivière souterraine jaillissant à l'air libre
œuvre de joie hors le cloaque du monde létal
pour méditer sur la passementerie
tissage des sillons blonds de l'esprit .

Ne pleure pas
sois le doux écart
entre le chant du troglodyte mignon
et la perle de rosée posée sur la campanule
ma belle éphémère
de l'éphéméride quotidien.


285

La herse abrasive

 La herse abrasive  
 Coupa court au crâne pelé .  
 Puis agrippé au mur   
 Pétrifia les ressources migratrices .  

 Pommelée d'or  
 elle enfreignit la règle  
 ne conservant de la crème acrylique  
 que quelques moignons hiératiques . 
 
 Nous ne pouvions rester là  
 aussi ,   
 pupilles dilatées ,  
 nous approchâmes de la jugulaire  
 pollens en suspens  
 des stèles coopérant  
 à la dégringolade  
 vers le pourpre des nuits fauves  
 du couteau d'Abraham .  

 Flanqués de notre armada  
 il se fît que le minerai des origines  
 soit extrait des sources ardentes  
 de nos vitrifications .  

 Ô brillance !  
 sous tes sabots demeure la sécheresse de l'oubli  
 sous la fourrure des nuits , un jour blafard  
 sous ta lèvre , l'inimitable esprit  
 sous ta plume , le bourgeon johannique  
 sous les minéraux calcinés , l'avenir émergé  
 sous les baies énuclées , l'architecte du souffle .  

 Ma déchirure !  
 cette plaie où refléter nos visages   
 cette volée de cloches  
 rappelant la fumée des bûchers  
 d'une cosmogonie du temps passé .  

 Notre futur ,  
 la résine épiphanique  
 résiliant les frisures de l'épiderme  
 le pas de deux   
 sur l'horizon arc-en-ciel  
 telle une balle perforant l'Absolu   
 notre enjambement  
 cette énigme  
 où se fondre dans la vision . 


 
 284 

Elle marche en plein jour

 Elle marche en plein jour
 la logorrhée ductile
 patte duveteuse
 et peau bouillonnante
 elle ombre l'asphalte
 de sa quenouille d'Arc .

 Ennemie des perfections
 le baiser des visiteurs
 noircit le chambranle de sa porte
 bouleversante caverne
 où trône le Dieu
 que son profil aguiche .

 Désinence d'une substance infrangible
 elle monte méditante la colline aux trois potences
 aspect hésitant des coutumes de l'esprit
 elle remise le sabre des amants
 aux champs des Intouchables
 rasant
 fuligineuse
 l'ombre du néant .



 283

La vérité en villégiature

 Ne pouvant supporter
d'être en villégiature de la Vérité
je m'efforce
en face d'une vie mienne
de ne pas profaner
les tendres et sagaces
crinières du chant de l'obscur .

Je plonge et fouille
les magnificences de la nuit cathédrale .

J'accompagne les gerbes de terre et de sang
giclant hors des tranchées .

Je filtre et laisse passer
les pesantes pensées de l'espoir .

J'arrache à la mort ce qui n'est pas né
et dresse sur le bûcher des circonstances
les grandes rosaces de lumière .

Ombre
Cécité progressive
Graduellement j'éclate
et parsème d'une myriade de fragments
l'énigme des jours à venir
éblouissement ultime d'un crépuscule
à l'orée d'une dernière visitation .

Mains tendues 
j'implore le vaste ciel
et féconde notre terre
ultime élan à revenir vers soi
éternel retour du pourceau fabuleux
vers la source où se taire .



282

mystère du verbe

 A contrario du mystère du verbe
Il y eût l'illumination d'un soleil spirituel
Écartement des données primesautières
Splendeur reconstituée du désir
Sans que la phrase se dégrade .

Mienne est la tâche
Au passage inattendu de l'obscurité
Eclipse d'une vision première
L'énigme s'interpose
Sans que négligence fasse loi .

Fort de lumière
L'obscur vitrail révèle son envers
Martyre devant la porte des anges
S'ensevelissent les trésors de l'appartenance
S'enfle la transcendance du point final .



281

Conscience d’être cerise

 Conscience d'être cerise   
 Souffrir de tant de conscience   
 Sourire du noyau à la pulpe   
 Que me soit donnée l'âme   
 Irradiante âme   
 Au sortir de cette déchéance   
 Parfois souffrance   
 En illusion de tant d'absences   
 Coagulées au mirliton des afflictions   
 En rachat d'une tristesse humiliée   
 Puis vivre éternellement   
 Chêne liège naisseur de peaux parfumées   
 En sudation   
 Traces de laves pétrifiées   
 Au soleil qui verse la nuit   
 Au cœur même de la beauté   
 Rencontrer l'ours du pays des graminées souples   
 Puis disparaître  
 La partie saine propagée en épilogue   
 Au filtre du silence .   



 280

pensée errante d’une force terre à terre

 Pensée errante
d'une force terre à terre
précipitant l'imperceptible 
de l'action réalisée .

Révolte du fondamental
à rendre l'homme plus fort ,
sursaut de l'évolution ,
juste perception du pic d'amour .

Ouvrir les vasques du mental ,
briser l'illusion ,
craquer l'avant-tracé de nos désirs ,
paroxysme des morales .

Finie la transmission des choses dites ,
nous sommes en marche vers l'ère pleine ,
affouillant la grève des mers refluantes ,
sur les pas des bâtisseurs .


279

ne pas s’attacher

 


Ne pas s'attacher
en vibration
danser le feu
les bras ouverts
le silence pour transmission
chaque battement de cœur échangé
à découvrir la science et le beau
en fermant les yeux
ces images qui nous assaillent
sans comprendre absolument
frappé en intériorité
fasciné
engoncé
la pensée libérée
par étapes
sentir la présence 
écarter le faux 
sans abstraction
sans peur
sans question
avec vigueur
au gré des circonstances
se consacrer à l'étude
se nourrir de pain et d'eau
la joie ouverte
en intégralité
supprimer les barrières
par ondes développées
sans fragmentation d'avec la courbure
le sens du bien confié à tous
en conversation avec l'un 
de quête et de signe avec l'autre
nous faire décoller
en l'œuvre
par l'émerveillement
prononcer la parole
en intimité
accueillir l'évidence
tel éclat de rire
partir
ne pas faire l'intéressant
être le pauvre en don de soi
être le moi et toi
être le souffle
être la plume entrant par la fenêtre .


278

celle qui passait

 Celle qui passait   
de ses pas roses   
sous la glycine .
  
De son évangéliaire   
pendait la fibre marque-pages ,   
à l'auriculaire une blessure .   

Le gravier foulé   
raclait la gorge nénuphar   
de quelques gouttes de nectar .   

Prenait-elle plaisir   
à ouvrir ses papilles   
hors de nos ruches ?   

Sera-t-elle éclose ,   
cette tristesse ,   
contre la nostalgie de nos pensées ?   

De quoi s'agit-il ?   
la vie a-t-elle un sens ?   
la logique peut-elle fleurir ?
  
Vaille que vaille   
nous fûmes conviés   
à briser les barreaux de nos cages .   


277

Larmes, alarme, en armes

 Larmes
 violon de l'âme
 attente du savoir .

 Alarme 
 contre celle qui ment
 ce peu de semence .

 En armes 
 versé dans ce siècle
 stupide diktat .

 Larmes 
 en regard caméra
 l'arbre tremble .

 Alarme
 de vengeance point
 juste l'éloignement .

 En armes
 fondamentalement froides
 déposées sur le seuil .

 Larmes 
 par manque de chaleur
 une gelée sur le sol .

 Alarme
 sans que derrière la colline 
 montent les officiants .

 En armes
 passe le train de la mine
 que les vélos suivent .

 Larmes
 devant le mausolée
 fleurent les années surannées .

 Alarme
 sans lumière ni musique
 claquent les oriflammes .

 En armes
 l'épilogue gloussé
 se change en mystère .

 Larmes
 d'une naissance sans rides
 tourne la Grand-Roue.

 Alarme
 rentrer au pays des morts
 herbes vertes dans la main ouverte .

 En armes
 l'Oeil tranche l'ombilic
 d'un regard virginal.

 Larmes
 déjà grosse
 d'un abaissement des paupières .

 Alarme
 fuligineuses herbes enflammées
 la mort bulles d'argent .

 En armes
 le rêve d'un enterrement
 sans clair de lune .

 Larmes
 de gravats répandus
 sous nos pas de plomb .

 Alarme
 tôt entrée
 avec casquette siglée .

 En armes
 ceint d'une large ceinture
 dévaler la pente .

 Larmes
 au soleil paradis
 les mots se toisent .

 Alarme 
 sans repentance
 au creux des terres blanches .

 En armes
 au bord du trou
 pelleter cette manne .


 276