Aussi léger qu'une plume
un ange passe
en lisière de forêt .
Au creux de l'attente
le pas se fait précis
le souffle court
le vide est là .
Le licol se délie
la bête pointe son mufle .
Un vol d'oies sauvages
soulève les nuages .
Le risque se fait pressant
le cœur cogne contre les côtes
une lourde pluie calme nos ardeurs .
Il se pourrait que succède
à l'élan terminal de nos appels
le chant de notre infaillible loyauté .
229
vivre à l’ombre de ce qui est

Vivre à l'ombre de ce qui est
Vivre sans tête
en abscisse douce
contre l'ordonnée élégante
de la courbe croissante
l'espace d'un souffle .
Ouvrir le placard
Entrer en déliement d'être
les objets montant la garde
hors de leur utilité méticuleuse
sans que l'offre ne se fasse .
Ne mangeons pas notre pain blanc
laissons les pigeons descendre dans l'arène
entre les murs de béton
à becqueter les miettes viennoises
à croiser l'inquiétude
le téléphone collé à l'oreille .
Enceinte
sa main contre ses cheveux
elle cause
puis se rassoit
de dos
cachée par le montant métallique de la verrière .
Je me désaxe
cette torsade
assise
la main contre la tempe
le sac en bas de chaise
immobile .
Elle rangera
les fioles et les bocaux
sans omettre les sachets de thé
puis fermera la porte
dans un silence d'après-midi de printemps .
Qu'une vapeur recouvre la vitre
que surgisse le suint d'une vision
que le maître éteigne la lumière
nous pourrons alors
vivre dans l'ombre
la calme délectation d'un jour sans fin .
228
étirer un quart d’heure d’attente
Étirer un quart d'heure d'attente
du carrelage à la fresque bleutée
lèvres chaudes refroidies à la craie
De bain
brosse à dents
galipette des reflets
au ressaut de l'Inconnaissable
le bulbeux du faussaire hante de sa patte rêche
les blessures du mur
nonchalante banalité
source bruissante du graphisme
Afficionados des songes
par un soleil printanier
où le bus vieux-rouge me frôle
d'ombre et de lumière
entre le chien et le lapin du tableau de bord
le feulement des autos
immobilise le geste
des parents traversant la rue
leurs petits à la main
une femme pousse le landau
des soupçons de voix derrière les vitres fermées
cette tendinite à la base du cou
me contraint à ne pas reculer
un scooter rugit
un couple marche en se tenant le bras
un garçon sur sa trottinette
et puis le silence, quelques secondes
sinon rien
L'enseigne de la pharmacie clignote sa croix verte
jadis la croix fût rouge
un mur peint en trompe l’œil
avec le clocher d'une église
J'y vais
227
le sourire de la plaque de fonte
Les passants qui passent
achètent l'objet ,
passent la porte
puis disparaissent
le temps d'un temps qui s'épaissit ;
~ tentation d'une clé à tourner .
Gifle ,
réponse inflexible ,
la peau simplement désignée ,
langue de velours ,
épelle du char de carnaval les consonnes advenues .
La plaque d'égout
là ,
en son goudron ,
décatie ,
une échancrure de gaieté sur sa face de lune .
Ne l'imitez pas ,
Ne transformez pas son habit de ciment
en identité céleste .
Soyez le réceptacle de son chaos .
Entrez en dissidence .
Ayez la démarche courtoise d'un salut de hasard .
Respectez son silence ,
de ce que raconte les contes
ne choisissez pas .
Sachez être courtois .
Ayez le mot de paix .
Soyez le bon .
Soyez le lumineux .
Ayez le sourire croque-pupilles
derrière la vénitienne .
Et si le pas presse ,
n'accordez d'importance qu'à votre corps qui pense .
Soyez pied à pied le raccourci de l'âme .
Grimpez la pente ,
pour juste regard porté à l'encan ,
exploser de beauté .
Il se pourrait que vos jambes ,
sans se couper de votre être ,
sortent du piège d'un espace changeant .
Divine rose descendue du plafond .
Etre l'esprit de ce lai d'amour .
Qu'un passant passe ,
l'ombre se déplace ,
le souffle rassemble les énergies ,
une voix indique le chemin .
" Marchez entre ciel et terre "
226
quel âge as-tu mon fils ?
Pour me dire que l'enfant a bien grandi
Qu'il est éternel
Comme l'éternelle jeunesse du monde .
D'une autre contrée
Tu vins
Et je m'enquis de te retenir
Hors des chimères
Hors des moments où la force ne s'imprime plus .
Tu me pris par la main
Sans question
Sans certitude
Avec juste le besoin de vivre ton époque .
Tu n'avais pas besoin d'aide
Pour affirmer ton identité
Une dose d'absolu t'animait .
J'avais déjà accompagné tes hésitations
Ton hétérodoxie me semblait inextinguible
Sans domaine attribué
Tu pouvais mettre à mal les institutions .
Tu pouvais te moquer de ma sénilité
Des choses en place tu n'avais cure
Tu élargissais le fossé existant
Entre la société officielle
De l'homme bardé de médailles
De l'homme au secret des cachots de l'esprit
Élaborant au risque d'être blessé
L'avenant des fausses protections
Le passe-murailles du chaos stellaire .
Ce n'était pas la première fois
Qu'il y avait désaccord
Tout était histoire de racines
De celles que conforte l'ordre établi
De celles qui passées au crible de la crise
Méritent de resurgir .
Toi mon enfant-apprenti
Des tessons de l'esprit
Tu graves la symbolique de notre relation
Sur la terre du Croissant Fertile
Tu épelles à jeun
Le texte des nourritures à venir
Où se rencontrer .
Tu savais lire le chiffre ésotérique
Du quotidien révolu
Tu savais déchiffrer le cri des enfants
D'entre les sonnailles de la rhétorique sociétale .
Tu étais arrogant
Mais sans arrogance point d'accès au royaume .
Tu savais faire jaillir la gerbe d'étincelles
Sur la pierre des sacrifices
Et brandir l'épée de décision
Individuelle et collective .
Tes mots étaient simples
Ceints de cette capacité
A faire sortir la littérature de ses ornières
Pour épeler les données fondamentales .
Tu savais
Et pourtant
Humble
Tu nous invitais à la retenue
Sur cette terre d'entre les ruines
Où recueillir l'humus immémorial des cryptes dévastées .
Tu relevais ce qui était couché
Toi l'incarné
Soucieux de découvrir l'alphabet
Dans la palmeraie d'un oasis sans blessure .
Tu as été embarrassé
Par le carcan des certitudes
Toi
Cette lumière de fin d'orage
Portant loin le propos de ton voyage
Marqueur initiatique
Imprimant au fronton des temples
la tolérance .
Mon avenir
Mon fils
Ma congruence
Mon enfant éternel
Tu vins
Et te tins
En rébellion
A me dire
La désinvolture
De cette époque laminée
Par de grandes douleurs .
Ma force
ma ruse
A même de rassembler
L'épars de nos haillons
Au coeur du discernement .
Tu renouvelles le secret des créateurs
Tes pérégrinations sont l'injonction fracassante
D'être l'entièreté de l'être .
Toi le pont
Toi la porte
Toi le passage
Toi la nécessité
Tu sus trouver la trace
Pour débarquer par effraction
Messager d'origine inouï
Et vivre entre ces parents improbables
Le reste de ton âge .
Remue
Sors de ta grotte
Et me viens tordre le bras
Sur l'enclume des mondanités .
Sois l'inflexible transgression .
Des vagabondages libertaires .
Sois en célérité
La comète émerveillée des nuits d'été .
Sois le bond hors de la tranchée
Atteint d'une flèche acérée
Ivre d'une stupeur sépulcrale .
Et si parfois tu fus l'enfant-apprenti
Ce n'était que pour rire
Penché sur la margelle
Ardente épiphanie
Hors des eaux outrenoires de la fontaine .
Mon enfant des soirées passées à la bougie
Tu es manifestation de l'invisible au sein du visible
Occurrence d'entre les apparences
Expression nourricières de l'ouverture .
Toi le fondateur des labyrinthes
Des courants d'air
L'horizontalité blanche de tes cris à fond de cale
Évoque et contamine
L'énigme flottante
De la vie de l'instant
Échappant aux flashes nucléaires de la désorganisation .
Tu n'as plus de limites
Tu es sans prix
Délié
Immaturément replié en ton havre de souffrances
Échancrure rougeoyante dans le rationalisme étriqué .
Tu es raison et émotion
En lettres brûlantes
Inscrites sur la porte des granges
Entre la chauve-souris et la patte de lapin
Ton feuilleté végétal
enjambe les codicilles .
Tu es le ventre saillant
De ces rituels
Décors
Agapes
Où fondre l'airain de notre fulgurance .
Tu t'es mis en chemin
Toi en aparté
Cliquetant de ton corps défait
Toi qui est parti
D'ailleurs
Un peu
A qui perd gagne
Tu es l'enjeu des possédés de la tradition
Cherchant le germe originel
Tu es hors tout .
Tu es mort et renaissance
Spiralement destiné
Au contournement de l'épreuve
Offrande sur l'autel des destinées .
Je ferais bon usage de tes crises
Je saurais m'abreuver aux sources murmurantes
Comme aux premiers jours
En mon errance camarade
Indéfectible thuriféraire de notre quête
Ma conque marine et mon point d'orgue .
Mon frère
Mon dieu
Ma disparition
Ma blessure éternelle
Ma mangue fraîche
Sous le figuier de notre attente
Je commencerai et recommencerai
D'amour et de douleur
A fourbir
L'élan de fraternité joyeuse
De toute existence
Ô mes compagnons .
225
la poésie en sourdine

La poésie cabre les mots Elle L'écheveau multicolore Déchiré par sa propre énigme Elle fleurit et se tait Elle ondule Rouleaux d'écume Elle s'amuse ruse abuse Elle fuse Elle ricoche Elle ricane Elle rit jaune Sans se renier Elle ouvre Elle offre Elle ne saurait se soumettre à l'ordre établi Elle batifole Elle encarte par sa fragilité Le clair-obscur des œillades thuriféraires Son organisation est implacable Elle est liberté Elle repère Elle ponctue Elle s'accroupit devant le tout petit Elle lévite par-delà les convenances Elle ne saurait se satisfaire de la courbure du temps Elle dégringole de l'échelle L'éternité des commencements Elle coiffe d'une mitre papale l'enfant des rues A gorge déployée elle se rit des nuances Elle contient les trolls et les farfadets Elle érige les calvaires d'une caresse de plume Elle incarne à mi-mots Le méli-mélo quotidien Elle est flamme jaillie du froissement du crépon Elle est silence Et puis Là Patatras Elle est fourmi A rendre besogneuse la réalité Elle est cigale Par son aptitude à s'émerveiller Du soucis du lendemain Par grand vent Les cheveux déliés Elle est piste sableuse en bord de mer Sur un vélo bringuebalant Elle se construit le long du chemin En errance d'être Elle L'herbe folle des no man's land L'acclamée du bourgeon au printemps En bord de route Elle accueille les déchets Elle recycle les plastiques Du brame guttural de ses tuyaux Elle orgue le cervidé aux bois du Roy Elle est musique Et si la nuit la surprend Elle devient vers luisant dans la coquille d’œuf Elle aboutit aux points de suspension de fin de vie Elle fluidifie le grumeau des regrets Elle Qui de fleurs vêtue Encombrait les greniers de ses émotions Devient sourire Dans la lumière d'un jour ultime Elle craque et rebondit A la fois regard et vécu Perchée sur l'arbre maître A guetter les traces de vie Sous la mousse Elle est écureuil Vive et contemplative Devant l'écueil des amandes sèches Elle est passage obligé De l'avant de l'après Hors des ombrages sécuritaires Exposée à l'ivresse caniculaire Des cavalcades visionnaires Elle est neige au soleil Envergure brune aux ailes de géant Elle raye d'un cri inouï Le cristal infernal Des mélopées hors d'âge Elle modèle De ses caresses arbustives Les traits du visage de l'aïeule Elle lève le rideau de sève Par dessus les brumes matinales. Il est des rencontres Sous le varech apporté par la marée Où le fumet des décompositions prospère Du germe au renouveau La clameur de la foule vers la solitude Et la chose dernière vers le mystère. Elle fût et sera Ma femme reconnue Mon chantre des nuits évaporées Ma distance Mon manquement D'entre le trépied des dieux A creuser le déraison En sourdine d'âme Alors déposée Crûe sous l'ombre d'un soleil exsangue Mon front ceint des dernières sueurs. Palme sera la poésie du retour à l'esprit De mes doigts gourds J'écarterais la terre Un insecte montera sur l'ongle Agile et inquiet . Ce sera le matin . 224
L’écran de l’âme

Sur l'écran blanc En sortie de scène Le Barbare arrache la gaine dorée de l'idole . Ignorant les menées vénéneuses Il peint et dépeint le processus de création À grandes lampées désirantes . Il fait craquer les coutures du décor , Inconnaissables limites De la piété mise à nue . Reculant devant la lente montée des eaux Il intériorise le regard Jusqu'à l'hallucination . Les pierres du sentier craquent sous ses pas , L'herbe libérée rayonne de photons , Les bourgeons pulvérisent leur pollen . La fausse paix Arbore son ventre aux syntaxes suaves Sur fond de perspective échappée. Le fourmillement de la présence Fait tâche de sang Sur la toile des commencements . Les saintes écorchures se referment Sous le souffle du pinceau Sans que l'encrier se renverse . S'élève le long des barreaux de l'échelle Le Cadre noir des nuits traversières , Ce chercheur d'équilibre . 223
Par l’autorité de sa main

Le seigneur de guerre devient prince de paix . Passeur du double des choses il délivre la lumière recluse dans la boîte des songes . Doutant de sa propre vision il met des œillères à son pur-sang . Le hasard accepté d'une bavure révèle un bleu diaphane . Il hâte imperceptiblement la chute de l'Occident . Il côtoie l'énormité de la tâche à venir . Il franchit le carroyage de l'espace céleste . Aux marges du monde , dans la manade de son atelier sa gestuelle de cape et d'épée dompte les écrouelles . Il est peuple des menhirs . Parfois en lassitude ses yeux vairons fertilisent les paresses de l'esprit . Il est ardente digitale posée aux flasques des serrures . Il est veilleur de l'échauguette , immobile en son attente . Il signe furtivement d'un spasme taurin le biais des choses dites . Il est le légiste inflexible de la liberté infinie des combinaisons . Il ouvre à coups de hache le deux fois béni de la blondeur de l'ange . Sur les faces endeuillées par la rupture des apparences il est l'ardent vandale d'une exigence barbare . Il courtise les crachats blancs de la ressemblance . Sur le visage perlé d'un mica de pacotille il desquame encore et encore le rire des atomes . Il rend visible l'Apocalypse , lui , le prophète aux prunelles de Voyant . Il offre son visage aux inquisitions esthètes lui , l'artiste des pleurs immédiats , l'énucleur en instance . Et si le découvreur en ses croisillons cloutés calque l'enténèbrement de la clarté, lors , tout s'enflamme , des yeux de l'aigle , au souffle noir des bisons de la pensée , tel le cœur du Beau impeccablement distingué , telle la marge d'un cahier obliquement souillé de sang . Les persiennes claquent , la jointure des dualités explose , un éclair de vie clame l'éblouissement de la présence , les poussières dansent dans le rai de lumière , tout se rejoint d'une amble véritable . Quittant la caverne des errants il se soumet au tremplin des serviteurs lui , le prêtre des sorties d'exil . ( d'après une œuvre de JC Guerrero ) 222
le papa de mon papa il s’appelait Henri
Il vint au monde à Reims le 11 octobre 1886.
Devenu très jeune orphelin de père et de mère, il fût recueilli par un oncle d’Epernay .
A treize ans il travailla comme souffleur de verre .
Avec sa femme Lucie, ma grand’mère, ils eurent cinq enfants, dont l’aîné prénommé Jean devait décéder durant sa première année .
Après la Grande Guerre il fût embauché au Métro, à la RATP, où il restât jusqu’à la retraite.
Lui l’enfant des Ardennes descendu en Champagne était devenu parisien.
Après avoir habité rue du Chemin Vert à Boulogne, durant les années trente le couple et ses quatre enfants déménagèrent boulevard Murat, dans un grand appartement qu’ils durent abandonner pour faits de guerre , après le bombardement des usines Renault toutes proches qui endommagea l’immeuble.
La famille fût relogée rue de la Corrèze près de l’emplacement des anciennes fortifications dans le XIX éme arrondissement .
C’est là, rue de la Corrèze, que je fus impressionné par un camion poubelle tombé dans une gigantesque excavation qui s’était ouverte en pleine chaussée .
J’avais peur de ce grand’père qui me faisait les gros yeux et me grondait .
Comme cette fois où j’avais déchiré le papier peint de la salle de séjour en petites lanières, cette pièce où maman devait accoucher de ma sœur le 13 février 1945 .
J’admirais le carillon Westminster qui sonnait toutes les demi-heures au dessus du fauteuil de grand’père .
Car il était souvent dans son fauteuil, pépé Danube, comme je l’appelais parce que la station de métro la plus proche était Danube, ce qui me permettait de le différencier de mon autre grand’père, pépé Frugères .
Et il était dans son fauteuil, pépé Danube, parce qu’il avait mal aux jambes le 18 mai 1955.
On devait d’ailleurs lui couper une jambe peu de temps avant qu’il ne meure .
J’étais allé à son enterrement avec mes parents. Au retour du cimetière dans le bus qui nous ramenait porte de Pantin, j’ai ressenti la présence de pépé Danube. Cétait comme s’il me faisait part de choses importantes que je ne comprenais alors pas ; ça m’avait donné des frissons et une trace de cet événement demeure aujourd’hui en moi. J’avais alors neuf ans , et je n’ai jamais plus oublié sa présence d’homme bourru avec lequel je n’ai pas pu échanger .
Sur les photos il a un bon regard dans un visage aux traits doux, lui le taiseux qui néanmoins pouvait entrer dans des colères qui me terrifiaient.
Ici, il est photographié à Jouy dans l’Eure , avec son gilet de laine et son éternel béret qui cache sa calvitie il montre une attitude affable devant la maison de Louise , la sœur de sa femme , Lucie ma grand’mère , et de Léon l’ancien garde chasse, mari de Louise .
Quelque temps auparavant, au retour des grandes vacances passées comme chaque année à Frugères, nous étions rentrés par le train, maman, ma soeur et moi, au 75 rue Saint Charles à Grenelle.
Et là, surprise ! Le papier peint de notre cuisine, qui était en même temps salle de séjour et salle de bains, avait été refait. Et c’était mon papa qui avait fait ça, et il l’avait fait avec son père, pépé Danube.
La pièce irradiait de soleil en cette journée de fin d’été ….. et encore aujourd’hui une lumière persiste à cœur joie.
221
deux parapluies

Le vent souffle ,
échine lasse ,
chante quelque part
l'oiseau des étreintes hivernales .
Je ne t'oublierai pas ,
tu ne m'oublieras pas ,
pour ensemble
dire merci à ceux qui nous extirpent,
nous les parapluies de la sortie de liturgie
à ne pas choir en fond de vasque ,
inhalant les odeurs de cuisine
mi-chèvre mi-choux
mi-reille mi-figue
jouant à colin maillard
d'une narine l'autre .
Il est permis de se dire
que même par temps de traîne
la poignée se dresse
en confiance
vers les mains de Charlie, David, Ahmed
mais qu'une rafale de kalachnikov peut effacer ,
mascarade dérisoire ,
sombre venue des terreurs
que la bête immonde interpelle
naseaux fumants
l'entre-cuisse béante
engouffrant en fond d'entrailles
nos suaves irresponsabilités .
Il est temps de convoler
l'un vers l'autre
dans le bleu de nos pliures ,
d'endimancher de sourires
le passage des officiants
sur l'allée de graviers
défilant à pas comptés
vers le lieu sacré ,
beauté , amour , paix partagés,
au-delà du numineux ,
en l'incandescence de la transparence .
220




