Des mots de cliques et de claques signent le ciel d'ordures clinquantes. Les errances sont légitimées par les propagandes baveuses. Les attaques aériennes abreuvent la nuit du sifflement des bombes. Des tombes retournées fleurissent les fêlures de l'esprit. Il n'y a d'espoir que la petite main poétique clouée sur la porte des granges. Les insectes même se suicident sur les plages abandonnées. Au matin le sol sera recouvert de fiel. Gesticulations entretenues d'êtres dénués d'amour. La mort est là, tenancière cuivrée des cymbales apocalyptiques. L'arbre dresse son squelette sur les plaines suffoquées.
Manon est une jeune femme lunaire Dont l’âme va à la vitesse de la lumière Elle est joyeusement désinhibée Sans mental Sans jugement Son rapport au monde est un fait de nature Sa maturité artistique relève de la pure nécessité Comme elle sent ce qu’elle vit Dans le moment Ses valeurs sont étrangères à ce qui se fait Sa Vérité est celle de l’instant D’une sensibilité en prise directe avec le geste Elle est irrationnelle selon un flux continu Elle est le principe fondamentalement Juste Celui de l’humain qui est de s’extraire de l’animal Ce n’est pas Manon qui conduit la peinture C’est la peinture qui se fait à travers elle.
( œuvre de Manon VICHY )
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Elle peignait la nuit sur une toile blanche bâtissant son royaume d'invisibles touchesaux vertèbres de son arbre. Lentes et fluides les coulures de l'esprit proposaient leurs sucres au vertige des songes entre l'air et le monde.Le vent se leva la Bête vint en catimini sous la lanterne donner le mot de passe terreau pour un sol pur. Le mufle soyeux du bleu charrette fit trembler l'instant marqué d'une flamme que l'œil au trait d'union fît danser sous les étoiles. 415
Au plus fort des choses périssables le piano se fait trompette sur le frisé de ses cheveux regards croisés vers le visage aux rayons ailées. Soutenir le langage pareil au papillon de nuit coulent les notes vers la chambre des romances afin qu'il se souvienne. Les bras révélés sur cette robe noire traversent la Vie au canevas des fluttes agasses le chant soudain jaillit sur la table des tourments.
Ne nous dédaignons pas à l'ombre des tamaris si aveuglé de lumière je te blesse s'échappe le cri d'un lien pour renaître. 414
Haute horloge des montées de sève, sur les dalles la marche rompt le souffle de la bête. Se recueillent les frères sous leurs capuches de bure près du baptistère, refuge des chrismés. Suppliantes, les âmes volettent entre les piliers de la nef abeilles bourdonnantes en crépuscule la nuit bientôt de silence présente. Les ancêtres seront honorés le pain rompu sur les dalles propitiatoires des mondes soupirants. A même le sol vivante lumière accordée à celles des autres elle reste là quand rien ne reste. 413
Près de l'ombre des choses premières chercher la vareuse qui nous protégera du grain, porter sur le chemin désentravé le panier d'osier des travailleurs.
Les arbres mes frères, être le vent d'un dessein secret dans l'immobilité du saisissement, être l'Ouvert.
Ne pas se résigner, un pas de côté et ce serait la fin.
Langage et silence en toute franchise, élever nos cœurs vers l'autel des rencontres, accueil de nos œuvres, accord avec l'âme du monde.
Frotter sa pierre contre la pierre de l'autre sans que le chagrin nous éloigne, nous, nullement attachés au confort, nous, dans l'espace, aperçus, balancement du roseau, par le périscope de nos amours.
Cette prise de bec à secouer le géranium peut amener l'autre à la déréliction. Passe les montagnes enjambe les vallons le ronron du moteur à explosion se mouche et meurt. En soutenant l'âme océane en avant de l'action tombe la pensée systématique de l'oubli et ses errements. Par la méditation par le dépassement s'ouvrent les lèvres se balançant entre mystère et présence.
Arrive la voie élue le soleil en acmé cet accord profond avec le Monde notre franchise immémoriale.
Éthiquement prélevée, ensemencée d'or, la lettre d'alphabet par assemblage forme ses mots et ses phrases. Pixels de l'esprit, mystère du cerveau, la vision se fait vraie fleur, étoile, papillon, sans que l'image paraisse sur l'écran.
Au creux de l'âme dans l'ombre du vertige se glisse le paradoxe, oiseau cambré devant l'appel. Franchir nos limites, rassembler les bleds, graines en instance d'émergence, offrandes d'Apollon. D'un côté l'autre de l'espace les étoiles se rassemblent et s'opposent si vivement que les pensées prolongent nos rêves. De gré à gré au firmament passent les nuages, alternance syncopée en fond d'univers, effraction dans la teneur du chant. Sur l'acrotère du temple les anges acrobates orientent leur miroir vers la Source originelle. Ensemble, geignent les monstres de nos entrailles écornant les ficelles sociétales de l'entendement. Marche lente, au fronton de nos approches demeure la mandorle invariante éloignant l'air vicié des attachements. Se lovent au sérail de notre imaginaire les ordres de la commanderie, effort consenti à défaire les liens de la discorde. Lumière infrangible de février, la besace pleine de renoncules déverse ses mémoires d'au-delà sans explication ressentie.
Un œil derrière l'arbre à crocs et museau frémissants, le loup s'épanouit en rase campagne. Évaluant l'espace il fend la prairie vers le replat d'avant talus, le pourvoyeur des songes. A mi-carême repu il dort, fricassée de poissons en mémoire des jours passés. Bas sur l'horizon fenêtres ouvertes le soleil flamboie, traces des gens de bien. La ruine attenante en son écrin de framboisiers tresse l'aventure adresse des petites mains volantes. Filage du temps en remontant le cercle des saisons les pleurs se font rares quand vient l'absence. Tout lui ressemble dans cette grande chambre qu'honore l'armoire grinçante aux vieilles fripes odorantes. Passe et nous reviens au village des sabots ferrés place de l'église la tourte de pain brûlante. Voyageur en chemin été venu croque les baies arbustives en souvenir de cette vie.