Tous les articles par Gael GERARD

Effeuillage.1

De sable et de sang mêlés   
enfreindre la porosité des soumissions.      
 
D'une cuiller accueillant les fadaises   
ouvrir la fenêtre des outrances.      
 
Passer la tête dans l'encoignure   
paraphrase la surprise.      
 
Surdité devant le miroir   
fiche un coup de poignard.      
 
Il n'est de guerre en raspoutitsa   
que le piétinement d'une harde de sangliers.      
 
Se frotter les mains sur le bois pulvérisé   
sèche les pleurs.      
 
Un baiser de paix mouillé   
à offrir au firmament des amants.      
 
Eviter le compagnon permanent   
pour ourler de tendresse la fuite des jours.      
 
Flasque vidée à même le veston tâché   
à quoi bon cet entregent.      
 
Brume légère frisant les prés   
matellase l'élan de vie.      
 
Le gravier des mots parfois   
arbore le gai savoir.      
 
Au sécateur des urgences   
un doigt de trop sur la patère.      
 
L'arbre graphique vers l'abîme   
mise en orbite d'une éclosion.      
 
A se demander s'il est temps   
d'égoutter les couleurs avant la nuit.      
 
Jamais Beauté ne pût brasser l'émotion   
que par la Voie des choses dites.      
 
Œil ouvert et cœur battant   
le poète au vide médian.      
 
Rencontre entre le monde et un regard   
dévisage le flétri de l'esprit.      
 
Un calme étrange fait de nécessités   
il est temps de donner sens.      
 
Blesser la Beauté   
le papillon redevient chenille.      

Solitude et concentration à bout de bras
portées jusqu'au ciel.
 
Au cartel des écarts, silences et brisures   
advenue du plein.      
 
 
1152

Le pas du Géant

Qu'est-il ?
qui il est ?
qui il est celui là ?
pas le rat des champs   
sûrement pas   
le rat des villes.      
 
A mesure de la main   
effleurant le parapet   
qu'eût-il fallu de plus   
en songeant aux enfants   
qu'un pas du Géant   
se déplaçant élégamment.      
 
La robe de feutre s'est ternie   
de par les rues froides du VII ème   
pas même rue du Paradis   
à contempler les pigeons d'amour   
sur les cheminées du petit Savoyard   
noir de suie au cœur blanc.      
 
Plomber les marrons chauds   
d'une main l'autre   
à éviter le feu qui couve   
entre nous de la veille   
depuis l'origine   
où se maquiller de silences.      
 
Il rappliqua au galop   
fit tourner le cerceau   
une dernière fois   
au touché coulé de la relation   
aux ombres de l'Errance   
point de considération.      
 
Vie aux bifurcations abouties   
en quête de la Source   
caressée par les rochers de nuit   
il eut fallu du courage   
le passage posé là   
et de la pluie le posé de la légende.      
 
1151

Le temps en bandoulière

Attache des années lumière   
taille de guêpe
poudroiement de quelques romances
sur feuilles mortes d'antan.

Rassembler les soirs de frime
en faire un feu pour la rime
augure du vent venant
le salut de l'instant.

De fines coulures d'esprit
font œuvre d'échancrures
sur le cuir des souvenirs
le rire en cale sèche.


Brille au doigt de ma mère
la lourde chevalière
d'or et d'un rubis affublée
mémoire de Saint-Nazaire.

Dans la lande jappe la Riquette
aux lunes d'avenir le refrain
du pain sorti de la panière
de rotin chanfreinée.

Flanelle ajourée
romance des soirs d'été
dansent sur la margelle
les lutins de la fontaine.

Sous l'unique lampe
l'eau de vaisselle refroidie
mains dans l'écume jaunie
les doigts croisés.

Tranches fines
le passé se délite
heurtant comme à l'accoutumé
le clapet des remembrances.


Il n'est que de vivre seul
d'une pincée de sel
du rivage à la dune
s'effacent les traces de l'enfance.

Visage las
les traits tirés par le sourire
accrochés sur la patère
les habits mouillés de la veille.


Des entrées souterraines
vers l'escalier et que la porte grince
tinte le pas lourd du grand-père,
s'éteignent les violons.

Vitrail des pluies dégoulinantes
à grand renfort d'un souffle rauque
s'emplit la maisonnée
d'ordres et de contre-ordres.


Coquille écrasée devant l'entrée
poules piaillant d'aise
en ribambelle sont montées du Pradou
les bacchantes de juillet.

Serrant contre soi
l'agneau de la veille
avons comparu devant l'avaloir
en innocence de la souffrance.

Grimpant à la cime du frêne
agitant l'ombrelle de la feuillée
elles ont rempli les seaux de zinc
d'un lait aux rides poisseuses.


Remonte peu à peu
de l'encoignure le frisson
des étoiles au sortir le soir
d'une camisole de sueur séche.

Sur la route dans la flaque d'eau
les bateaux de liège
frisent leurs moustaches
de fin de fête.


Echos noués par la froidure
les doigts gourds la bouche sèche
avons rempli de petits bois
le poêle du grenier.

Rencontre singulière
dans la courbe de Rezentières
au bas côté des sentiments
Hermann Hesse.

Avons vécu serons vécu
images et sons
brinquebalant la chanson
du bien aimé toute honte bue.

Fermez le ban
recouvrez l'esprit de famille
le temps brûlant les planches
annonce fin de représentation.


1150



Tendre frayeur

Tendre frayeur   
de la robe aux ajoncs
à Carpentras le nougat
se pavaner dans l'allée des Alyscamps.

Murmurer
pour s'entendre dire
qu'il faut partir
avec armes et bagages
entre dextre et senestre
retrouver un peu de vigueur
pour que lune pleine
prendre un aller simple
à la closure des Lilas.

Plonger dans la déréliction
aux tréfonds de soi
sur le pont du vaisseau
une trappe
y descendre et farfouiller
longtemps encore
parmi les hardes abandonnées.

Puis sortir
mâchuré par la grande lessive de la veille
d'avoir monté la garde en limites du limès
les pieds dans la raspoutitsa
à contempler le ciel étoilé
bien prêt de lui
ce grand soir
sous les lumignons de la guinguette
attendre que la poitrine éclate.

Au matin
la joie douce d'être en vie
genoux endoloris et tête libre
étonné d'être
à regarder l'azur
dans l'écarté
d'un feuillage
pour ensuite s'immiscer
par-delà les barbelés
jusqu'à ce que le vent l'emporte
et nous ramène à la source.

1149

Pleine lune enfantée

Cinq doigts de lune   
à la voix crayeuse   
sur la guitare sèche   
clapot des eaux dormantes.   
 
Les pleurs se figent   
sur l'astre ébloui   
pleine lune enfantée   
par le vieil océan.      
 
Sable où se fiche la flèche   
joyau de la gangue   
le paysage de l'âme   
s'ouvre sur l'unique point.      
 
L'aube se lève   
se taisent les oiseaux   
au vent brûlant   
d'une aube assoiffée.      
 
La terre roule   
l'espace est immense   
le noir intense   
force cruelle.      
 
Tirons la Merveille    
à courte paille   
du clairon doré   
la réponse sera.      
 
L'écartement des lèvres   
livre sa fibre   
fissure initiale   
pour primitive conscience.      
 

1148

Quand passent les grues cendrées

Chien et chat se sont rencontrés   
sur le trottoir d'en face
et ça faisait longtemps
qu'ils ne s'étaient pas vus
aussi jappements et miaulements
ont enjoyé la maisonnée
jusqu'à ce que balai saisi
le maître des lieux
leurs suggère d'aller faire ça ailleurs.

Fable des profondeurs
en accueil de notre animalité
il en a fallu des vertes et des pas mûres
pour que passent les armes
à se nuire s'abrutir se détruire
nous les hommes et femmes de couleurs
de l'enceinte arc-en-ciel
couronnée d'olivier et de médailles
aux fins de magnifier la concorde
sous la vasque de paix.

Bêtise assumée
à portée des matins clairs
où le ciel en toilette
sort des replis de la nuit
à se demander quelle absurdité
sera fourguée aux prestataires de notre Terre
la douce la propice passementière
prête à broder le ruban de tulle fraîche
sur le museau des animaux réconciliés.

Un siège rouge
au paradis des écrits
écorne les assis levés couchés
des phases de la vie
à émailler d'un revers de pensée
la conque céramique recelant le breuvage
quand traversant l'horizon

les grues craquettent
avant que neige vienne.


1147

La voie de l’arbre

A peine lumière tamisée   
que de noirs nuages accumulés
sur l'arbre aux ailes déployées
ont fait leurs, du visage, les pleurs.

Une voix pure
palpitait et chantait
le cœur en émoi
extase assumée.

Par les frisures de la mousse
à parcourir les brèches
et croiser le fer
le vent taillait crayon de vocation.

Se revoir porte grinçante

le groin offrant mystère
à saisir la bûche rugueuse
des instincts, le feu du poète.

Le jour se lève le ciel est grand
les rochers sont par le silence
la menue monnaie des anges
d'une légende l'autre, la voie.


1146


Rêve primevère

Cette fleur en équilibre
à quai de l'enfance
s'est refermée brève et claire
dans le cri de Merlin.

Destin sévère sans le père
éloigné en quête de sa voie
la notice biographique
en errance d'être.

Les ressorts intimes se sont affinés
pour fidélité sans faille
au vertige du dialogue
substituer la poésie.

S'égarer est tendre incertitude
à faire quelque chose
embrasement cataclysmique
de l'attelage du prince pharaon.

Le sphinx garde la pause
le sourcier sa source
devant la couche des mots d'amour
primevère d'un rêve.

( détail de l'atelier de Sylvain Gérard )

1145

Conscience nue

Cette main sur l'arbre   
appuyer le papier   
pour trait de fusain assigné   
obtenir distinction.      
 
Marié secrètement   
au visage de l'écorce   
te faudrait-il à la une à la deux   
enfoncer le clou du charpentier.      
 
Se retirer de l'ouvrage   
vider ses poches   
geste d'ombres fragiles   
en marche vers sa source.      
 
Pomme ou poire   
sait-on jamais   
ce que rencontre augure   
sur le quai d'une gare.   
 
Au point de fuite   
des faits accomplis   
saisir le bon épi   
de la conscience nue.      
 
( œuvre de Sylvain Gérard )


1144

Engoulevent

Devine qui farfouille   
dans l'auguste bassine
des désirs endormis
à même de frémir.

Sous le ciel la montagne
ceinture que berce
le flot des pensées confidentes
d'un assentiment céans.

S'élever
paraître pyramide éternelle
puis se lover
dans l’anneau des noces.

Ami des souples évidences
au chuchotis de la rose ardente
sur la crête à contre-jour
j'ai vu battre ton cœur.

Engoulevent au vol effrayé
de ta parure extraire
le trait de plume
radieuse écriture fine.


1143