Tous les articles par Gael GERARD

ta main légère grignote les cordes

 Ta main légère  
grignote les cordes  
chapeau soulevé  
d'habits noirs revêtue
mon outrance marine
mes doigts longs  
sur la sagaie terminale  
sans qu'opère l'instinct .

Jeux d'eau  
en légère déclivité  
papillotes et caramels  
de leur cristal dépouillés  
pour dents de devant  
étreindre le mou  
des nuits millésimées .

Décoction de ton sourire  
sous la couette chaude  
peuvent tourner les galaxies  
portées musicales  
en haleine de fuite feinte  
saltimbanque  
qu'une nuée efface  
si tôt si tard  
la mèche de cheveux sur l’œil  
trouble l'infini .


314

ma fleur, ma vie, ma vibration

 Dès que j'entendis le mot "amour" .   

Vive voix et cœur énamourés d'une braise ardente,   
se délièrent les fibres de l'ennui    
plongèrent en leurs eaux d'origine   
l'accord essentiel des notes graves et douloureuses 
ma fleur   
ma vie   
ma vibration   
ma pantelante adoration   
bouche en haleine du souffle   
ma grâce sur herbe tendre   
écartelée aux quatre membres de ton corps si doux .   
"Je vous aime, il faut apprendre à dire je." (Christian Bobin)    


310
( En hommage à Saint Jean de la Croix)   

caresse de la note

 Caresse de la note  
échancrure du corsage  
la mer à l'horizon  
un ciel de traîne.  

Cheveux défaits  
saisissante nuitée  
présence vacillante  
l'oiseau passe.  

L'épaule dénudée  
l'ombre des pins  
le visage tourné vers le ciel  
un collier de perles fines.
 
De la tristesse dans l’œil  
les lèvres gonflées  
la lune virgule mon âme  
d'une guitare coquillage.  

La ville au loin  
frémissante sarabande  
rentre ses chats  
il fait déjà trop tard.  

Si lente si parfaite  
qu'au petit jour  
tout retient l'ordre  
écru de mémoire.


311

une île d’ailes élevées

  Une île d'ailes élevées   
hors voyage   
de ciel et d'eau   
tel un enfant qui dort . 
 
 Souvenir en place de Grève   
le col tranché   
aux vociférations des pauvres hères   
cherchant saigneuse remontrance . 
 
Insulte gommée   
au carré de l'oubli   
couverts mis   
à la brume montante . 
 
Émargent en toute légèreté   
les oiseaux errants   
que le profond du ciel   
éparpille .   

Situer sur la carte   
cet immense souvenir   
de rires et de pleurs affublé,
la romance des jours heureux .   

Futile passante   
partie revenue   
destination inconnue   
bras dessus bras dessous .   


312

du signe à la lumière

 Passage fulgurant
du signe à la lumière,
encastrement des épaules 
dans le chas de l'aiguille .
 
 
L'invisible et le visible
s'entretissent à la faveur
de la vérité,
bouche d'ombre ouverte .
 
Branchages en couronne,
servitude qui se nourrit
du mal et change l'or en plomb
en tombée de nuit, inexorablement .
 
Le chant éveille les vertus du silence,
le silence vertical fait incantation,
l'encerclement s'acharne sur la raison
en quête du germe premier .
 
Les moines guerriers et contemplatifs
combattent la veulerie et le mensonge
faisant place aux vertus imaginaires
de l'Utopie .
 
Ici point de normalisation,
juste le mauvais rêve du voyage
où nous détruisîmes
les aurores boréales du sacré .
 
Passe le charroi aux couleurs héraldiques 
sans ressassement, sans rancœur,
sans concessions offertes,
en nouvelle humanité .

 
308
 

le chat noir dans les herbes

     Dans les herbes aromatiques
près de la source
un pan de mur énigmatique
regard de l'au-delà
le chat noir voit
l'ombre des âmes
la nullité des distinctions
l'incohérence du monde
l'arrêt du flux poétique
un semblant d'accueil
dans le silence du recueillement
où la plus haute branche du grand arbre
craque dans le vent .

     Et s'il sort ses griffes
en ces lieux racines
où la force mentale
transforme en énergie pure
le regard de l'Esprit,
c'est pour discerner des brèches, 
des lézardes dans ces illusions
que sont publicité, propagande, idéologie,
voire science et technique,
éléments qui laissent sans nerf
l'esclave moderne que nous sommes devenus .


307

délicate présence

     Délicate présence
à petits cris
le chant de l'homme
aux brouillards de tant d'esprit
amoureusement cadré 
par la Beauté .

     Jamais ne flétriront
les fleurs de cerisier
sur la roche mouillée .

     Juste mon reflet dans la goutte de rosée .

     Immensité 
un trait d'encre
une barrière anonyme levée
le sabre droit devant le chant de l'alouette .

     Fasse que je marche
jusqu'à la croisée des chemins
l'orage comme guerrier accompagnateur
d'une flûte évaporant le vent d'autan .

     Nous sommes esprit
nous sommes le pouvoir
nous, Nature et Terre réunies
dans l'anfractuosité des connexions vivantes,
notre Mère .


306

immortaliser le monde

      Immortaliser le monde en l'unique vérité .

     La fonction de la poésie est d'aller là où est notre chemin,
avec persévérance, profondeur et foi .

     Entre les praticiens d'un art débonnaire et la quête du " toujours plus au-delà du connu "
n'y aurait-il pas le grain de folle sagesse
qui nous fasse creuser au plus intime de soi 
le reflet du grand absolu,
nous les aigles invisibles tournoyant autour de cimes invisibles ?


305