Mais que faire ?

Mais que faire
Quand du fond du monde
Monte le bougi boulga des armes
Annonçant la démence précoce
Comme complaisance verbale à venir
Tel mot d’esprit
Tire-bouchon des fuites en avant.

Éros y avait consenti
Dépassant les ténébreux enfers
Chiquenaude circonstanciée
De ce rêve d’autrefois
Où transi de froid
Je devais par la porte entrebâillée
Entrer en création.

Épaisses plaques charbonneuses
Posées sur mes lésions aiguës
Je dûs néanmoins prendre le quart
Heure convenue
Ici ou là
Pour perpétuer la tradition
Par l’enchaînement des causalités.

Gondole frêle
Posée à même la vase
Entre les murs gris
Figée sous le pont des outrages
J’écrivais la phrase de trop
Ourdie par l’être-à-part
Source de ma source.

La nausée recouvrait le mythe
Montagne solitaire
Trônant tel un verre de vin
Sur une table en formica
À portée des fusils de l’outrance
Sur le chemin duquel
Je devais m’effondrer.

Que cela vienne tard le soir ou tôt le matin
Je connus au-delà de la vérité
L’emphase des jours heureux
Palimpseste noyé dans la brume
Éclairant un passé
Les yeux hors des orbites
Dévorés par la grâce.


( œuvre de Jean-Claude Guererro )


1654

Le chemin à parcourir ensemble

Monsieur le Professeur
Garde pour eux
Une fraîcheur d’âme.

L’ineffable reste l’ineffable
Soit on est amoureux
Soit les formules sont à l’emporte-pièce.

Rapter le divin
Ne convient pas au numineux
Juste aux gorges de velours.

Et là, le son est
Au forcé de la voix
La maîtrise de la parole.

Par delà la saison sèche
L’homme aux cartes de crédit
Accuse l’autre d’être à la page.

Il n’y a de naïf que l’existant prosaïque
Dardant fourchette
Hors de l’assiette communautaire.

Tout doux bel homme d’idées convenues
Au trouble des sentences
Joint le contretemps de la mouvance.

Seul le cadavre exquis
Couronné d’à-propos
Conduit au présent.

Et de s‘étendre
Pantin désarticulé
Sur le linoléum des astreintes.

Appuyé sur les coudes
Il encensait d’un regard doux
Les thuriféraires de la forge.

À qui lancera le plus loin
La panière chargée de linge
Dans la gueule du volcan.

Alors la terre cachera ses entrailles
Sous la mousse des romances
En charge de complétude.

Lever de lumière au soleil couchant
Conduit à l’écoute des cœurs en souffrance
Pour l’offrir à l’absolu.

D’outil sacrificiel point
Le charme purifie de sauts de puce
La gorge du néant.

Et de trancher le cordon ombilical
De l’Être en partance
Vers sa sensibilité propre.

Place au corps vivant
À respirer ce qui fait nature
Pour se soumettre à Lui.

Ultime éclosion
De l’Être en ce monde
Où la terre est bonne mère.

Le corps ne s’éveille
Qu’en modelant le vécu !
Aux charmes de la conscience en action.

Écran écart des incartades
Nous les carnes besogneuses
Incarnerons la carnation généreuse.

Du doute à la sagesse
La glaise deviendra forme
Figure incandescente de la Merveille.

Il est un temps le soir à la dérobée
Où naître
Est un chemin à parcourir ensemble.


1653

Admirable liberté

Même mort
Ne te retourne pas.

Sois le conflit
Au cœur des pruneliers en fleurs
D’ensemble
Le passe-temps
La proie.

À corps perdu
Méchante bête que je fus
J’agite
En grande complicité
Et quiétude considérée
Les menus bras de l’énergie
Farfouillant dans la boîte à outils
La continuité des choses à venir.

Fuir seul vers le seul
Et l’oiseau de s’envoler
Sans courtisan
Admirable liberté.


1652

Madame

Madame du Retournement
C’est ce point qu’il faut atteindre.

Je suis la tâche
Et pas un élève à la ronde.

Contre ce ciel
Une corneille ne peut la détruire
Cette matière immense
Ce souci sans-souci
Des œuvres souterraines
Apport vertical
À la fonge nécessaire
Ce monde sensible
Évolution éternelle
Du passage vers Lui
Nous ôtant l’espoir
En nous donnant la certitude.

Bougent bougies
Du siècle vénéré
Dame de Bretagne
S’est éteinte
Comme prière
Dans la lumière de l’été.

J’oublierai le nom
Je signalerai sa disparition
Son activité secrète se révèlera
Ultime voyage
Au balayage essentiel dédié
Du renoncement
Tel silence
Aux traits du visage
Inscrit.

S’avancer
Faire soumission
L’amour comme fumée
Gravant panache
Au fer chaud
Du désir
L’empreinte.

Comme extérieur à soi
Ils ont réduit la Réalité
À la consumation du temps et de l’espace
Le cœur nettoyé
Des attaches de chair et de sang
Pour seul
Se lever
De nuit
Et ne plus avoir de couchant.

Sur ce chemin
À deux pas de la maison
L’oiseau s’est posé
Sur un cheveu
Préfigurant le lieu
De notre arrivée
Au soleil brûlant
De la vision unifiée
Par un jet de neige
Devant mes yeux
Naissance et mort
Éternellement liées
Dans la Nature sans durée.


1651





Retourne-toi

Retourne-toi
Afin que rayonne
Du plexus solaire
La force invisible
Pour devenir immense.

Place tes mains
Sur le dur des roches
Sois dans la faille
L’origine de ce qui tremble :
« Le naître-à-nous ».

Assaillie par les démons de la terre
Tu te trouvais dans l’obscurité
À ouvrir la voie
D’avoir vécu une fois
Les sphères de l’enfer.

Et de vibrer
Rassembleuse des esprits mauvais
Pour en faire un paquet
À jeter dans la goule du géant rouge
Fait de feu et de flammes.

Point de limites
Tu sais avec les mains
Tu vois avec les yeux
Pour reconnaître
Les affres de qui souffre.

Livre tes gestes et ton cœur
À celui qui vient
En renonçant aux vérités ultimes
Pratique avec discipline
L’expérience du chemin.

Donne à qui passe
La clé du jardin
Où tu attends effacée
Le degré de conscience
Permettant d’Être.

Accepte que cela vienne
Drones, missiles, bombes planantes
Sur le toit de la maison
À te dire :
« Vous reprendrez bien un morceau ».

Puis la guerre finie
Nous irons dans les décombres
Retrouver les photos de famille
Ces mille petites rides
D’au-delà les cris et les sanglots.

L’espace et le temps n’existent
Qu’à la périphérie du monde
Tournant comme un disque fou
À même l’océan
Ebouriffé de vastitude.

Et de téléphoner
Aux êtres de chair et de sang
Pour leur conseiller d’autorité
De passer les commandes
Aux enfants de la lune.

Baignons-nous
Dans le clapotis des vaguelettes
Soyons le Souffle
Humble et attentionné
Porté à ce qui est.


1650

La présence à ce qui s'advient