Fibrilles de Dante Aux creux laiteux des abîmes Le collagène des peaux fripées S'écoule sous le bruit des canons Rencontrant la déchirure de l'homme Proie du désespoir Tapant des pieds et des poings Sur le sol noirci d'une cour d'école Jonchée de débris d'obus.
Il y a grand malheur Et le printemps se reflète dans les fondrières Entre les véhicules blindés immobilisés Proposant quelques fleurs Au cœur déchiré d'un peuple De femmes et d'enfants terrés dans les abris Et d'hommes haves Se courbant sous la mitraille En traversant la rue.
Des chiens errants Parcourent les ruines Des lambeaux de tissus Pendent aux fenêtres énuclées des immeubles Il faut escalader des tas de gravats Pour aller voir où l'on habitait Parfois l'odeur de décomposition D'un corps sous les débris Portée par le vent.
Pleurer Se tordre les doigts Rassembler quelques brindilles de bois Pour allumer un feu entre deux pierres C'est tout ce qui reste De ma maison en humanité Devant la démesure De cet être détestable Qui a maquillé sa monstruosité Sous quelques propos fallacieux.
Nous irons bientôt Contaminés par la radioactivité En colonnes Sur la route défoncée Se presser au bord des charniers de l'hiver Sous l'œil gris de l'oubli Quant à la volée le glas sonnera Peignant une colombe Sur l'écorce des consolations.