Archives de catégorie : Année 2025

Santé !

Tâches jaunes sur les marches du chœur
Je pris garde de tenir le lys bien droit
Et bien me prit de laisser choir quelques larmes
Au sortir des aurores boréales
Qu’un ciel de traîne avait garni de sang bleu.

Étrange demeure
Irradiée par le bris des vitres
À la renverse
Catapulte asservie
Sur ordre démoniaque des corbeaux de la nef.

Chut ! Dis-moi ton secret
Servons nous du souvenir des anciens
Soyons le charbon rougi irradiant le tintamarre du laminoir
Pour passage des truites bleues
Connaître la lumière de nos yeux.

Sirène hurlante en fin de journée
Le silence envahit l’île aux oiseaux
Île à ne jamais piétiner
Pour ne pas écraser les œufs
Que la houle régale d’un onguent salé.

Dans la prairie des salicornes
Le corps d’une blancheur sépulcrale
Évacuait le secret des fillettes
Par les meurtrières du donjon
Passeport pour l’invisible.

Le printemps pouvait concasser le grésil
D’une main la terre ourlait les lèvres de l’estuaire
De l’autre main le ciel filtrait un dernier regard
Avant que l’église disparaisse sous les eaux
Par un clou planté au pinacle de la raison.

Point de chichis
Au corps à corps des inclinaisons
De délicieux jeunes gens frôlèrent la correctionnelle
D’être un mètre plus haut
Que tout un chacun l’ombre de l’objet.

Détachez vite le Christ de sa négritude
Au Golgotha des habitudes
Les poches pleines du miel des altitudes
Serviront de flambeaux
Devant l’averse inattendue des contre-vérités.

Entassement
À corps et à cris
Des béni-oui-oui de la gloquitude
Qu’une guerre insensée fit remplir de charniers
Avant les charmes de l’Annonciation.

Voiles gonflées au vent folâtre
Ils traversèrent la mer
Trompettes en tête
Mesurant au pas de l’oie
L’ordinaire de l’esprit planté là.

En toute civilité malheur est bon
À bout d’oreille la belle connaîtra joie souveraine
Sur le pas de porte d’un seuil
Plus grand encore que les compassions accumulées
Par le beau couvert des estafilades de la malitude.

Entendons
L’âme veiller sous l’arche d’un fin écho des rues
Brume déchirée
Par les aiguilles de pin de la solitude
Flaque d’eau répandue à même l’ordre nouveau.

(Œuvre de Jean-Claude Guerrero)

1590

Les trois sœurs

Quand je lisais « la manu »  d’avant-guerre
Il y avait des bicyclettes, des fusils
Des instruments de cuisine, des articles de jardin
Et même des vêtements dessinés en taille douce
Sur les feuilles racornies et jaunies.

Au loin les monts du Cantal
Par-dessus les frênes du Pradou
De l’autre côté du jardin
La fontaine aux belles dalles
Et ce pré de descente en vélo vers l’abreuvoir.

Il y avait là, les trois sœurs
Devant la clide près de la gargote
À parader sur les biclous sortis de l’écurie
Fernande, Jeanne et Renée
Drivées par Gérard, Claude et Georges.

La route n’était pas encore goudronnée
Les flaques d’eau laissaient libre court à la patauge
Le tertre était raide
Une alouette parfois tirlipotait
Dans la ruine des Matillou.

Les poules gloussaient librement dans la cour
Leurs crottes collantes nécessitaient
De frotter les chaussures sur les pierres de l’entrée
Augurant quelques remarques parentales
Quand les rires débordaient la vigilance.

Vaisselle faite sous l’ampoule unique de la salle
Il fallait jeter l’eau souillée
Le plus loin possible sans se mouiller les pieds
D’un geste ample de semeur
Faisant se courber orties et framboisiers.


1589

Trois cœurs pour un oiseau de nuit

Étrange composition
Au solstice d’été
Quand la lumière s’éprend du chemin creux
Près du mur de pierres sèches
À pointer l’espace d’un éclair
Le cœur et le cœur et le cœur
Trois cœurs pour un oiseau de nuit
Qui viendra nous ensevelir
Au couchant du furtif passage
Vif encore de flammes virevoltantes
Pour nous dire adieu
Par delà la nostalgie du germe.

Creusant les plaies
De qui entend les mots en échos
Lancés comme chant du loriot
D’appels arrachés à la pointe du couteau
Alors que une à une
Se pétrifient les ombres
D’un douloureux voyage
Acheminant vers le fond du miroir
Promesse de sang
Où brûler les serments
De l’autre côté de l’horizon.
À point nommé, gémissements.

Ils écossaient les petits pois du jardin
En présence de l’impensée vie terrestre
Dans la gloire de l’été
À embraser les lucioles de la mémoire
Égarées là en fidèle compagnie
Des ancêtres, point de mire
Signifiant neuve partance
Creusée à mains nues
Dans l’humus, source inviolée
D’un panier en osier
Bougie allumée sur le pas de porte
Où bercer la veillée de paroles échangées.

1588

Le cœur à bout de bras

Ne me dis-tu pas qu’il soit mort hier
De frayeur
De manquement de soins
D’allers-venus en bord de précipice
À se fendre d’amour d’échancrure en échancrure
Le cœur à bout de bras
Jusque dans l’embrasement des choses dites.

Plus bas dans une démarche immémoriale
Plus haut dans le vide
Avons-nous investi les résonnances qui prophétisent
Bien au-delà des possibilités
Alors qu’il suffit d’avancer
Entre les deux rives
D’une plaie ravivée.

Marcher doucement sur les pierres de la source
Aux serrures du ciel, j’ai préféré le ciel
À la clé des énigmes, les vibrations du lendemain
À la brûlure, la brise des souvenirs
À la tornade, la feuille qui tombe
À la nuit, le jour d’ouverture
À l’unique dignité, le clapotis infini des vagues.


1588

L’allée d’Allagnat

Un faisceau de souvenirs soutient la futaie
J’ouvre les bras
Et me viens
Gentil ami
Dans l’alignement des exvotos
Le désir d’une fête
Guirlande de branche en branche
Marouflant la ramure
De mille feux
Corps s’accordant
Âmes refluantes
Du parterre de feuilles sèches
Pour que vie s’élève
Au grand festin des intimités
Flammes et larmes
Du fond de la frondaison
Tracer la sente faisant chant
Du bruissement des pas
Dans l’immense éclair des grains de poussière
Pulvérisant la beauté du lieu
Aux noces mémorables
Pour qu’advienne
La douce pluie
Crédence tintinnabulante
Offerte à l’inapaisable fontaine.

1586

Trois fébrilités


Trois fébrilités de l’ombre diamantaire
Ont paru au bow-window
Consacrant par le pareil
Le fin du fin de la navrance.

Le fils paré de grâce juvénile
Grappilla quelques instants de vie
Sans que n’aille au bout du bout
L’œuf des attentes.

Écouter Oser Répondre
Agissent pipeau d’argent
Sur le miel environnant
De tes yeux endormis sous rayon de lune.

Fibres singulières
Accrochées aux patères de l’entrée
Feront papillons de lumière
En hommage aux gambades imaginées.

Pierre d’angle
Je désire plus ample connaissance avec vous
Pour conduire de concert
La chasteté voler sur un air de biniou.

Va à tire d’ailes
Parmi les oies sauvages
L’âne du mariage
Accroché sur le dos de la parentèle.


( Œuvre de Pierre-Sylvain GERARD )


1585

Sang bleu sur le pavé

Sang bleu du remugle 
Le pavé cogne au cœur de l’allée
Un alléluia de pacotille
Venu de l’errance piétonnière.

À contretemps
Les plateaux de la balance pèsent néant
Infraction plus légère que la fable
Quand la foi tue la foi.

Paysage gorgé de bleu de Mytilène
Cerises grasses déversant le kirch des abysses
Il fallut que les lèvres se tendent
Pour piqueter de peste le corbeau de la haine.

Passage gardé par des bêtes féroces
Même la biche traversa le gué
D’une légende l’autre
La passementerie faisant ouvrage de dames.

Mille fleurs aux alentours
Courtisent le ciel en courroux
Pétrissant d’une blondeur fadasse
Le coucou gris et son plain-chant.

Nulle larme baigne la musique des sphères
L’aimable portant fines lanières
Écope de ses bas nylon
L’allongé d’une grêle de serments.


1584

Nuit sèche à la corne de cerf

Nuit sèche à la corne de cerf
Juliette à sa fenêtre
Précieuse marchandise
Disposée au balcon
Ne savait que faire
Myriades de lucioles à l’entour
Grosse de l’œuvre à venir.

Ne pas l’expédier
L’accueillir en amie
Le dessous de chaise y pourvoira
En écho avec le petit cœur
De Roméo
Au charivari de l’indécence
Enfant perdu et retrouvé.

Elle vivait là
Signalant la direction à prendre
Nuisette en satin
Sans laitance
Jumelle solitaire
Veillant par le travers
Le loup aux trousses disposé.

Douceur reconnue
Le doigt hésitait
Par la fente perçue
D’échancrer le slogan
Fausse couche offerte à l’esprit
Contre son visage
Contre sa barbe.

Instant fatal
Casse-croute sorti du sac
Une fois la main empoignant l’ourlet
Toujours logé et nourri
Le numéro tatoué se mis à luire
Vers luisant dans sa coquille d’œuf
Œuvrant au silence des lieux.

Tenir il faut tenir
Par delà le râle des vieillards
Dans la terreur partagée
Les huis des wagons plombés
Raclant jusqu’en enfer
Les rails rouillés de la souffrance
Fripée par le hibou criard.


1583

Nuage ultime

Incognito
Un tantinet rigolo
Nuage s’effaçe devant Grande Journée.

Sans gaspiller ses traces
Le kérosène ourlait d’une douce dentelle
La paréidolie des alpages.

L’Ultime était là
Vagabond hilare
Troquant le sabre contre l’habit de lumière.

Rimant à la perfection
Désespérant même de ne pas être compris
Il engageait le poème vers le mystère.

Un tantinet prêcheur
Il rattachait le coup d’œil
Aux cintres du bel et bien.

Par nécessité
La Vouivre coulait des jours heureux
Ventre contre terre.

La grue blanche
Caresse sur la neige givrée
S’éthérifiait pour devenir Souffle.

À mi-flanc de l’abrupt
De vieux sapins
S’occupaient des affaires du monde.

L’immortalité se garait
Sous le tryptique des réalités
À hue et à dia de l'humour.

Nuage nuage
Au risque de se perdre
J’embellissais la chanson d’une douce contrainte.

Chemin et But
Dans l’azur infini
Filaient doux devant ce qui alors se passa.


1582

La pierre promise

Déchirer le bloc
Avec pattes de guêpes et de libellules
Mène au partage des origines.

L’une sera la démarche immémoriale
L’autre le regard étonné en perpétuelle offrande
Comme prévu.

D’irradiants filagrammes se formeront
Pain béni pour l’âme aérienne autant que charnelle
Joie nue devant le vacarme des perce-neiges.

Bien sûr
La plaie à ce prix
Fera strophes sages sur la pierre promise.

Personne ne m’attend
Avons bien tout le temps
Nous les passants trop pressés.

L’oracle brise l’élan du soleil buvant rosée
Un geste décrit la lancinante énergie
Du migrateur égaré que nous sommes.


1581