Archives de catégorie : Année 2017

les antennes du frère en terre

   De ses lèvres elle hantait la mastication des   intentions,   
Un souffle vint,   
De superficielles, ses dents reflétèrent,   
à l'entrée du temple, le péristyle des âmes blanches. 
    
Filèrent les sans noms de la haine,    
recroquevillés sous les antennes du frère en terre.      
Puissions-nous, passagers de l'oubli, racler nos derniers os, au rythme des mirlitons de l'enfance.   

Le Grand Jeu raffermît notre passé,   
rassemblant les fresques de nos errances,   
passage obligé,   
où planter l'organe éruptif,   
hors la périphérie de nos illusions.   

En creux de nuit   
la lune ourla la montagne,   
face sombre sous le réceptacle de nos attentes,   
et tout fût retourné.   


358

A l’ombre en canicule

   A l'ombre, en canicule
s'ouvrir aux pensées remontantes   
s'ouvrir aux fièvres de la nouveauté   
s'ouvrir aux clarines du troupeau   
s'ouvrir au repas dominical   
s'ouvrir à la photo de famille   
s'ouvrir au portillon qui grince   
s'ouvrir aux miaulements du chat.   

A l'ombre
en canicule,   
savoir mûrir sans se flétrir   
savoir recevoir la parole qui vient   
savoir donner une parole à qui est là   
savoir remplir de lumière le regard   
savoir sourire à qui sourit   
savoir presque sourire à qui ne sourit pas   
savoir garder contre son cœur le précieux
de la rencontre.   

A l'ombre,
en canicule,   
remplir de bienveillance le frôlement du vivant   
remplir d'une sieste la fatigue du moment   
remplir d'attention la venue de l'enfant   
remplir de miel l'orage du conflit   
remplir à dessein la porte qui s'ouvre   
remplir de douceur l'écarlate d'une prise de risque  
remplir la gêne d'une brise légère.   

A l'ombre en canicule,   
remercier le verre d'eau de l'amitié   
remercier d'être entendu   
remercier la pomme qui craque sous la dent   
remercier d'avoir à gravir le quotidien   
remercier le petit matin qui nous sort du noir   
remercier le chant des insectes des champs   
remercier le temps qui passe.   

A l'ombre
en canicule,   
amener l'enfant à l'écriture de son avenir   
amener la mère à la vigilance des siens   
amener le père à la proue du navire   
amener le vieillard vers l'odeur des foins coupés   
amener le ciel à s'ouvrir entre mur et feuillage   
amener un air de fête sur la pierre dure    
amener la vie en communion fraternelle.   


356

a fleur de peau un baiser s’est posé

   A fleur de peau      
~ un baiser s'est posé.

Papillon fol'enfant   
~ de nos rêves.   

Farandole des reflets   
~ des bulles en surface.   

Une louche d'étain   
~ pour mettre à nos lèvres.   

Le vent dans les frênes   
~ pour se rafraîchir.   

Le ciel bleu mission   
~ procès éternel.   

Quelques pas dans le ruisseau   
~ un sourire échangé.   

Mains jointes   
~ pour l'assoiffé.   

Une flamme sur ton front
~ l'œil si mystérieux.


357

ma main fripée

   Éclisse vitupérante   
de ta voix   
l'astre de nos amours   
pleure la joie   
en remontée   
pente douce   
de notre échappée.   

Effrayé   
par tant de tendresse   
le soldat retourna son arme   
sous le bouleau frémissant   
de l'automne   
assomption de la balle   
sans que s'éteigne lune.  
 
Marcher   
marcher en bord de falaise   
se contenter de peu   
fermer le regard   
les embruns si bas   
sur l'horizon   
d'une sente ultime.   

Appeler le bedeau   
dites lui que je meurs   
entre campanules et bleuets   
sous le dais étoilé   
d'une voûte superbe   
que l'orage aurait rafraîchi   
de son charroi cliquetant.   


355

Et puis le sens en déliquescence

 Pieds nus   
 sur la Lande   
 le bâton bien en main   
 la musette à l'épaule   
 le bonnet recouvrant les oreilles   
 derrière les vaches   
 aller vers la cabane   
 le chien aux trousses   
 faisant ce qu'il voulait   
 de taupinière en taupinière   
 puis levant son museau terreux   
 les yeux demandeurs   
 vers l'attente infinie. 
       
 A front renversé   
 se remettre du départ d'Orion   
 aux délices du jour   
 respirer l'air du matin   
 aller sentir l'herbe de rosée pigmentée   
 ranger deux trois objets   
 se passer de l'eau sur le visage     
 accueillir la pensée.  
 
 Et puis le sens   
 au délire du sens   
 en déliquescence   
 dire quelque chose   
 qui vaille la peine   
 qui fasse connaissance   
 du sens dans la direction assumée   
 du sens hors sensation   
 du sens essentiel   
 de l'excuse et du désir.   
   
 Pour bulle d'air   
 éclatée à l'air libre   
 claquer l'arc-en-ciel   
 contre l'écran blanc d'une salle sombre   
 hors mystère   
 sérier de près la justesse d'un son   
 sur l'autel sacré   
 des murmures sourds   
 entrer par la porte des cérémonies.  
 
 De blanc vêtu   
 au rai de lumière apparu   
 être le pas   
 sur la dalle de basalte   
 le pas sans hâte   
 que l'élévation d'un chant   
 transporte à la croisée des nuages.   

 Joie,   
 ressentie au cœur,   
 contact du Réel.   

   
354

Tu me viens ô lune inassouvie

 Tu me viens    
tard le soir  
ô lune inassouvie   
femme de la contrée    
enfant des herbes folles   
vieillard familier   
dans le miroir   
sous la luciole des souvenirs.
  
Lève les yeux   
proche de la torche   
au temple des attentes.
 
Sois Sainte Femme   
arc-en-ciel des désirs.

Sois l'enfant   
assis sur la margelle du puits.
  
Sois le vieillard oublieux   
aux futiles pensées.  

Sois la mèche   
qui allume le feu d'être soi.

Sois l'oreiller aux mille grains de riz  
en l'accueil de ce qui vient   
en allégresse sage   
une pincée de sel   
sur les lèvres 
bras tendus vers l'étreinte   
lumière vacillante   
du jour à venir.

Sois lune éternelle. 


353

Sorte de lanterne aux joues roses

 Sorte de lanterne   
aux joues roses   
Sourire étoilé  
éclaire les entrailles   
visage de dentelles   
saupoudré de lait   
tendresse contre l'épaule   
le chat s'enroule à ton cou.  
 
Arbre sans feuillage   
le rouge ronge les lèvres   
petit noyau sec   
que le regard accapare   
chevelure défaite   
d'un ventre mûr   
rousse démangeaison   
à porter devant l'autel   
la voix des filles sages   
en surplomb   
lunettes opaques   
d'une étreinte   
à genoux sur le sable   
visage contre terre   
pleure d'être pierre   
pieu étoilé dans les cieux   
d'une gymnopédie.   


352

Ma fille, ma toute petite

 Ma fille   
 ma toute petite   
 mon enfant éternelle   
 Carmine de retour   
 mon enfant des bleuets   
 que j'ai cueilli au ventre de sa mère.   

 Puis frère vint.   

 Et j'abandonnai le château 
 au désir d'un autre homme   
 ne gardant que les membres épars  
 dont je reconstituai le corps      
 Osiris déchu   
 quelques weekends 
 affligé de ne pas avoir su   
 conserver la chaleur du foyer   
 entre mes mains inutiles     
 fines poussières    
 que le vent porte   
 au long corridor des remords.  
 
 S'ouvrirent alors les portes de bronze   
 quelques traces sanglantes sur les murs froids   
 j'avançai    
 percevant   
 les lumières tremblantes de l'autre rive    
 par delà les hautes futaies   
 de mes passions en déraison.  
 
 Le train entrait en zone libre   
 les freins crissaient       
 des jets de vapeur
 brouillaient les fenêtres à tirant.   

 Un silence vint   
 des corbeaux coassaient     
 des voix hurlaient.  
 
 La ligne de démarcation passée   
 je sus que rien ne serait comme avant.   

 Quelques intentions de guingois   
 ne purent répondre à tes demandes    
 de retour à la maison   
 écriture enfantine sur papier rose   
 loin des regards   
 le long d'une route de montagne   
 partageant mes nuits d'insomnie   
 étoiles et lune en provision   
 le chien collé aux basques   
 sans jamais me retourner   
 j'allai.    
  
 Le tricolore ruban franchi   
 course terminée   
 au labyrinthe des errances   
 il me fallut retrouver la terre mère   
 mixe des atomes prêts au recyclage.   

 Je me lèverai   
 l'air sera frais   
 le cœur saignera   
 les pas se feront pressants   
 pour retrouver le compagnon émergeant   
 le rappel à l'ordre mémoriel   
 mon ami le double   
 me tendant la couronne de fleurs      
 ma fille en mandorle   
 ma toute petite   
 mon enfant éternelle
 ma bleuette   
 que j'avais recueillie au ventre de sa mère   
 un jour de joie.   


 351

Ombrelle de lumière

   Ombrelle de lumière   
au vert triangle   
de la Dame Blanche.   

Le chemin en balcon   
collation du jour qui vient   
dandine le chant des oiseaux.   

Murmure d'eau   
derviche tourneur   
ivresse des senteurs.   

Debout   
immobile   
le torrent racle le crâne.   

La montagne en ubac   
lève sa voile   
devant la montée des eaux.   

Le jour pointe    
l'herbe se courbe   
caresse de fraîcheur.   


349

aux cornes d’appel

   Aux cornes d'appel   
galets jetés contre les portes d'airain   
la montagne fige la parole.   

Équidistante des embrasures   
la mesure frappe d'estoc et de taille   
sans que l'ombre advienne.  
 
Il y a du sang sur tes vêtements   
les lacets resserrés   
feront marche forcée.    
 
Élève la lune    
à hauteur des griffes   
de l'ambre marin.
  
Tes pas longent le rebord de la sente   
de petits cailloux dévissent   
les pensées dépassent de la musette.   

Ronge ton frein   
sois le brimborion des nasses refluantes   
sois grand sous l'averse.
  
Abjure et me viens   
Callune des prairies premières   
Offrande à saisir.   


350