Arxius de la categoria: setembre 2013

Papa, ets el ?

  


pare, hi ets? ?
pare, hi ets? ?
Vas viure com un home bo i generós
93 ans
en fidelitat als teus que et són estimats
93 ans
de senzillesa de modèstia del silenci fins i tot
93 ans
presència a la nostra terra
reflex d'un altre lloc molt més gran que nosaltres
93 ans
i després res
i després nosaltres
ser
els teus fills els teus néts els teus besnéts
que formen un microcosmos en aquest gran univers
un món en miniatura
un món d'éssers en formació
un món que avança cap al futur .

pare, hi ets?
aquí
en els nostres cors
en record d'un temps passat junts
amb molts moments que surten a la superfície
trencar amb un passat passat
en l'elevació d'una experiència per donar els seus fruits .

digues al pare on ets ara ?
Recordo aquella època en què anaves a treballar amb la teva bicicleta
de Grenelle als bonics barris
i el que va dir la mare
que ens coneixeríem
i això fins i tot sense parlar amb tu
fins i tot quan vas contenir les teves emocions
fins i tot quan comptava amb els dits
sumes i restes
fins i tot quan dibuixava un cor
a la boira de la plaça de la rue Saint Charles
t'estava esperant .

Pare, ja no ets d'aquest món
pau a tu
en aquest lloc etern .
I hi haurà un dia
on nosaltres també
desapareixerem
i el que direm
si fóssim genials
si fóssim odiosos
perquè tothom sap com es fan els nadons
però sabem com es fan els pares? !
Haver reiniciat el teu ésser adormit
al meu cor ple de llum
M'alegro amb la clemència i l'amor
en reconeixement a tu
el meu pare a mi
el nostre pare a nosaltres els teus fills
allargant-se amb un simple desviament per ser viu avui
l'obligació de continuar la nostra feina
no tenir por d'avançar en el nostre camí .
Fira
fer bé
fer o trencar
no encongim el món
als seus capricis i al seu patiment
també hi passen coses meravelloses
i seria criminal banalitzar aquestes coses
posem-nos en contacte els uns amb els altres
enfortir els nostres llaços
col·laborar celebrar gratificar glorificar la bellesa
perquè en aquesta separació de tu, Lucien, qui ens uneix avui
de manera que en la tragèdia de la mort comuna a tots nosaltres
romandre en meditació
romandre en silenci
roman en aquest moment de meditació
mantenir-se enamorat .


165

tres espelmes petites

  Trois petites bougies
et que reviennent
le témoignage des heures passées en harmonie
le tressaillement des profondeurs de la création
la capture du souffle avant son jaillissement
la force d'un regard derrière la vitre
la présence subtile de l'être éternel
la marqueterie des souvenirs éteints
la perplexité effarée de l'illusion
l'éclat d'une comète à jamais advenue
le saisissement de l'apparence
le calme des gestes répétés
la romance des vieilles chansons échangées
l'au-delà des formes en instance de leur accomplissement
l'enchanteresse transcendance de l'instant
le calme devant cet être-là en partance vers l'ouvert
la blessure ressentie au contact d'une brisure de verre
le glissement des doigts sur une peau fraîche
la tradition perpétuée par les objets reconnus
l'expérience sans cesse renouvelée
le sable fluide de l'aridité nomade
l'éclos dense de la force sédentaire
la conquête de la matière en lumière d'être
la transparence de l'effusion de l'oeuvre aboutie
le lever du rideau devant le soleil
la montée en conscience vers le cœur du monde
l'intimité de l'être inscrite dans la loi
l'évidence des preuves accessibles à l'artiste
le brouillage des événements dans la brume rédemptrice
la restauration de nos terres intérieures
le long et humble travail de défrichage
la guerre contre les ombres
l'homme de bien en ses instances réparatrices
le teint frais de nos visages redevenus sages
la musique en ascèse contenue
la beauté en grâce d'être universelle .

Être vivant dans la vénération émerveillée du secret
se remémorer la trace des humains
pour respirer en la seule réalité qui vaille
le souffle si fin de la bonne posture
la louange faite au quotidien
la contemplation d'une simple pierre coloriée.


164

Bien sûr qu’il eût du courage

 Bien sûr qu'il eût du courage
 cet homme
 de vivre de longues années avec prudence
 simplicité et modestie
 à mener sa barque
 le long des berges quotidiennes
 sans avoir à demander où aller
 sans voir le temps passer
 en lente progression vers l'estuaire
 où les limites se dérobent
 où tout devient gris
 que la vue s'obscurcit
 que l'air manque
 que l'esprit ne répond plus
 mais où s'avance
 triomphant en ses attentes
 le mystère
 cette lumière incréée
 cette lumière intense venue de très haut
 cette béance
 habitée de vieilles âmes
 ce frêle esquif
 disparaissant dans les brumes
 ce point d'orgue
 se confondant avec l'horizon
 en souvenir de ce qui va et vient
 l'espace d'un souffle retenu
 en souvenir de ce qui fût
 traces de ton nom sur le tronc scarifié de l'arbre
 se retrouver assigné
 à transformer cette écriture douce amère
 en obligation de conscience
 en marche sur le chemin
 compréhension de ce qui est
 crépon de la plaie rouverte
 une fin d'été
 à mesure d'un regard échoué
 à marée basse
 chez celui dont le cœur demeure dans l'amour.


 163 

Vieillir en vie

 Recevoir la vie
 comme un don
 comme un présent.

 Habiter tous les âges de l'existence
 l'enfance
 la jeunesse
 l'âge adulte
 la vieillesse.

 Se bonifier comme le bon vin
 trop jeune le vin est acide
 mûrir est l'oeuvre du temps.

 Ne pas être obsédé par les stigmates corporels
 traces du temps qui passe
 la ride amère n'est que le baiser en continuité d'être
 Demeurer dans la vie et dans l'intelligence.

 Tous les jours faire des découvertes
 intellectuelles affectives sentimentales
 Tous les jours être dans la nouveauté
 Vivre.

 Ne pas regarder dans l'assiette du voisin
 ne pas être jaloux
 rester en soi
 à la fenêtre de l'émerveillement.

 Croître encore et toujours.
 Vieillir n'est pas être vieux
 vieillir c'est aller dans la vie
 être vieux c'est perdre le goût de la vie.
 
Etre curieux intellectuellement
 regarder l'existence comme un enfant sans être un éternel enfant
 regarder l'existence du point de vue de la jeunesse sans être un éternel adolescent.

 Aller toujours plus loin.

 Plus on vit longtemps plus on construit ce recul
 qui permet d'être là
 tout en étant déjà ailleurs.

 D'une seule lampée saisir le poudroiement des choses
 avant que la lampe ne s'éteigne
 pour que rives atteintes
 se dissoudre
 l'espace d'un sourire
 au gré du vent qui passe
 dans la  lumière du jour qui vient .


 162