Pūranga Kāwai: Hanuere 2022

La voix de si loin

La voix   
De si loin    
D'un tambour
Au son voilé    
Parvenant jusqu'à nous    
Tel sourire    
Ondulant des lèvres    
A l'orée de la clairière.        
 
D'un revers de main    
Asseoir le trop plein de mystère    
Dans un fragment de calcaire    
Le couderc proposé    
Ardente fontaine    
Gardant le souvenir d'avoir croisé    
En solitude corrélée    
L'envol d'un regard.        
 
Répéter les faits   
Enfreints d'un patte   
Posée brève    
Pour que se retirent    
Aux détours d'un parcours    
Les actes de sagesse    
De l'activité humaine marquée    
Du cri du dépouillement.        
 
En occurrence        
Entre le masque et le visage    
Entre caresse et fureur    
Quand il s'agit de créer le sens
L'ange se transforme en faiseur de roi     
Entre les abat-sons du clocher       
Cloches des heures saintes   
Soumise au caprice du vent.      
 
Ne pas voir ça    
S'abriter dans le feuillage des frênes    
Nous les compagnons de voûtes    
Enclins à démêler l'écheveau de chanvre    
Du chant de la pierre    
En instance des encombrements intérieurs    
Pour qu'Etre unique    
Se changer en Liberté.        
 
Sans excès    
A mesure du surgissement de l'inattendu    
Calquer l'éloquence des souvenirs    
Sur la face opaque de la montagne    
Immensément soumise aux humeurs des nuages    
Prompts en leur repliement    
D'alléger les petits pas de Jeanne    
Le soir en descendant du grenier.        
 
S'adonner au jeu secret    
De l'ordre et de la lumière    
Riante joliesse de la femme respectée    
S'excusant de creuser le ciel    
D'une musique d'excellence    
Sous la crédence des jours meilleurs   
Tresses d'ail posées à même les drailles du cœur
En attente d'un brouet vernaculaire.      
 
 
996
 

Lettre à Ping

Lettre écrite à Ping    
Entre les pieds de la table de ping pong    
Lettre écrite à l'encre de chine    
Telle truite vivante sortant de l'eau fraîche.        
 
Lettre étrange    
A souhaiter le Tibet    
Pour tous les babas de la terre     
Drapeaux de prière en tête.        
 
Lettres d'écailles rouges    
Gouttes de pluie     
Gouttes de sang    
Égrenant les dents du mallah.        
 
Il est difficile de racheter le passé    
Laissons au présent sa présence intacte    
Rassemblons ce qui est beau et bon    
En ces temps de liberté mal ficelée.        
 
Du coffre des pirates    
S'élève la caravelle de Christophe    
Le suif chauffé à blanc au soleil des tropiques    
Recelant les mille yeux du cosmos.        
 
Ici point de nœuds de marine compliqués    
Juste de quoi sentir l'haleine des hommes   
Pour terre abordée    
Fouler le sable d'un jour nouveau.        
 
( Na Jean-Claude Guerrero te tuhi )

994

A mettre sa vie en mots

A mettre sa vie en mots    
Mots venus tout-à-trac    
Mots de plaisir    
Mots de souffrance    
Mots de rébellion    
Mots surgis des profondeurs    
Mots de labeur    
Mots de bonheur    
Mots tendres    
Mots moteur d'un avenir meilleur    
Mots de braise    
Mots de sanguine outrance    
Mots météores    
Mots de chandeleur    
Le soir    
Sur la table des amours    
A contempler ce qu'il y a dehors    
La vie des autres    
Le soleil qui se lève    
En passant la barrière des nuages.        

 
Je mot-mur-murmure    
L'appel à l'aide    
Et le repli sur soi    
En navigation douce    
Sur la rivière des souvenirs    
Que n'eussions été de l'autre rive    
Nous les rapetouts de la mouvance    
A vendre père et mère     
Pour un quignon de pain    
Puis retourner sa veste    
Par manquement gracieux    
En vitupération des cieux    
Alors que passaient les vautours    
Sur le pommeau d'un environnement douteux    
Sans promesse    
Les mains à se chercher      
A la tombée du jour    
Le long des fortifications    
Où pousser le ballon    
Du bout du pied    
En dévalade vers les douves    
Aux loutres  messagères    
Mes sœurs en convenance    
Aptes à plonger tête première     
Dans la bassine des instances    
D'une vie qui ne nous apprend que si l'on prend      
A mi-chemin    
De l'agit-prop et du lendemain.         

 

 993

Entre quantique et informatique

La tête de joyeusetés affublée 
Pleine de rhizomes et d'écritures    
Inventoriait les us et coutumes    
D'un chemin de bienveillance    
Qu'elle avait en perspective.                
 
Des échelles partout    
Des bien droites, des branlantes, des tordues    
Se tenaient à portée de main    
En viscérale posture    
Contre les murs de la cité.        
 
Des tresses de cheveux luisaient    
En ces temps d'indifférence    
Où la pesanteur n'était pas la seule force    
A posséder les clés de la maison    
Douce chaumière en fond de prairie.        
 
L'alambic doux et comique    
Augurait d'une distillation de bon aloi    
Alors que de proche en proche    
Circulait la saucisse cuite    
Dans son papier gras et froissé.        
 
Il fallait laisser le terrain    
Aux plus nobles instances    
En recherche fondamentale    
Ces ponts entre quantique et informatique    
Les loups hurlants du lendemain.        
 
 ( Na Jean-Claude Guerrero te tuhi )

992

Mon âme en bandoulière

Je noie   
Et me noie dans le saillant des souvenirs    
En perfusion de ce qui vient    
A propos de cette disposition  
D'attente au bord du trou    
Du poisson des profondeurs    
Qui croisant la lucidité de l'insomniaque    
Participe au détricotage de la geste intérieure.        
 
Marche      
Et me mets Le cœur en route    
A recruter les jeunes pousses de l'esprit    
Pour cerceau du jeu des hommes    
Dévaler la pente    
Vers le ruisseau des attentes    
Primevères fracturant en clair    
Les faits de providence    
A petits jets de vapeur    
Dans la torpeur d'un matin prêcheur.        
 
Il n'est de mise à l'écart    
Que ce que soi-même opérons    
En scène    
Et hop ! Jeté loin de la côte    
Mouettes criardes ramenant au rivage    
L'auguste gesticulation    
De la promesse allégorique    
D'une âme en bandoulière.        
 
 
991

Le trou

Qu'hier revienne    
En tournant les pages d'aujourd'hui    
Que le temps remonte la pente.        
 
Aller au fond du trou    
Remuer l'odeur des souvenirs    
Fait saillir la pointe de l'esprit.        
 
Que reviennent les courants d'air    
Les occultations et les niaiseries    
Qu'émergent le délaissé    
L'organique décomposé    
Aux os de pierres précieuses    
Sans que l'absence s'émeuve.        
 
Négliger les miettes sur la table    
Enfonce le passé dans l'avenir.        
 
Cette propension à mettre le doigt    
Où ça fait mal    
Construit la chose encore un peu plus loin     
Tel repère pour le pèlerin    
Au camino de son ouvrage    
Lui permettant d'arrimer le présent     
Hors des ténèbres de l'absence   
Afin d'engloutir ce qui vient    
Dans le sillon furtif    
De la mission à venir.        
 
 
990

La tapisserie de la vie

Retour à la case départ    
Après avoir jeter les dés    
Avec grande sœur et petit frère     
Nous saurons les rejoindre    
Les diseurs de bonne aventure    
Les ventrus, les secs    
Les vertueux, les prospères    
Les disparus    
Engloutis jusqu'à la mœlle    
Dans cette nuit sans fond    
A ne plus savoir lire les règles    
Alors que nous étions appelés    
Sans réponse    
Vers cet espace qui nous sépare    
De ces ténèbres    
A enjamber le risque    
Pour un aller simple    
Vers ces étranges rencontres    
Où faire bon usage    
De la prorogation du contrat.        
 
Sur le lac    
Calme et profond    
Une multitude d'oiseaux    
Ensemençaient de chants    
La tapisserie de la vie.        
 
 
988

Ecrire à pied et en vélo

Construire le récit    
De ce que l'on a vécu    
A pied et en vélo    
Fait imploser le cœur    
Au plus hardi des démarcheurs.        
 
Etre audacieux    
En plein jour    
Augure de cette quête    
A explorer l'anfractuosité    
Du rivage où nous avons échoué    
A peine entrevu l'objet de notre élan    
Que la plume se tarit    
Que les histoires se millefeuillent    
Et qu'enflent les péroraisons sur la transformation    
Dans le silence ourlé des vagues de l'instinct.     
 
Courbons l'échine    
Avant les grandes marées     
Soyons le devant de la brume    
Remontons le courant par lequel nous sommes venus    
Nous qui chevauchons les destriers de l'océan    
A grand renfort d'éructations    
Les petits, les sans grade 
Les marcheurs   
Les marchands, les besogneux    
Les changeurs    
A négocier le pacte d'écriture     
Jusqu'à notre extinction    
Bien au delà de la raison.        
 
 
987

La vague et le pourvoi

Arraisonnement du monde qui roule    
A corps et à cris    
Sur l'avancée de l'esprit de diversité.        
 
Tout consentement différé    
Fournit    
Ressentiment et Vengeance.     
 
Le palimpseste du temps    
A petites gorgées de discernement    
Offre profondeur et légèreté.        
 
D'habiter en poète les coulisses du théâtre    
Rappelle qui nous sommes    
A l'orée de la renaissance.     
 
Le souvenir des Dieux    
Collé au sens de la terre    
Fait présence au tourniquet des croyances.             
 
Quelle chance de recevoir    
Le soleil et le vent    
En réverbération de nos prières.        
 
Apporte et me supporte    
Nature rare au gré des saisons    
De me recevoir dans la gestation de chaque instant.          
 
Tisser à grand renfort d'oublis    
Le proche et le lointain    
Proroge la voix de qui vient.        
 
Perdre la mémoire    
Sans que messages paraissent    
Offre lumière tamisée.        
 
Flèche paradoxale    
En inclination de sa destinée    
Marque l'expérience du plaisir.         
 
Etre et ne pas avoir été    
Forment brassée de roses    
A la porte des estaminets.          
 
Bravades clandestines    
Déposées en souvenir de toi    
Accompagnent l'Angélus.        
 
Vagues profondes à creux et à cris    
Sont les gradations infimes    
Dans l'entre-deux de l'âme et de l'esprit.        
 
Étreinte ardente de l'épopée    
Sur les toits de la cité     
Ouvre la montée de l'espérance.        
 
De réel, point     
Seul demeure la voie d'accès au différencié    
Sous l'arc des victoires.            
 
Devant les baraquements de l'abstraction    
L'éclipse de lune    
Sépare le mal et la félicité.        
 
Invisible traîne des pleurs    
Au couchant de la terre    
Se souvenir des cordages et des voiles.        
 
Mon garçon soigne l'épiphanie    
Sous le feu de la roue solaire    
Demeure le cœur du temps.        
 
Immobile, encalminé dans son essence    
L'infrangible fissure accolée à nos sens    
Incurve l'avenir vers davantage de conscience.        
 
Plus grand que soi qu'y a-t-il ?    
La fraîcheur de l'aube    
Vers son déplié journalier.        
 
Du plot la mouette s'envole    
Pour magnifier le corps glorieux    
De la vague éternelle.        
 
 
986


	

Place à L’Éternel

Pusillanime Deux Chevaux    
A la carrosserie annelée    
En route pour le Verdon    
Que n'ai-je porté le scapulaire    
Des rois des reines des princes et princesses    
Pour mener à bien notre mission.        
 
Doigt levé vers le ciel    
La seule la belle la tournoyante    
La Rouge de l'été soixante huit    
Le plein de lavandes dans les yeux    
A contempler l'étoile oscillante    
Sur la chaîne du Moustier.        
 
Ruines de Sainte-Croix    
A même la peau douce de ma mie    
Le cigarillo moqueur du merle blanc    
Soulevant de ses trilles caramel    
Ta robe de satin    
Ourdie du feu de grève    
A mesure des galions se fracassant    
Sur les rives d'Oléron    
Ma main ma sœur    
A relever le gant    
Sous la frise légère de ton sourire d'enfant.        
 
Fumerolles à l'horizon    
J'ai pris le destrier de Père Grand    
Pour franchir la barrière de corail    
Falaises de calcaire attenantes    
A pleines mains    
Maniant le rêve et la vision    
De la motrice ma mère    
Au retour de la guerre    
Si loin si lointaine    
Pour maintenir le joug du mystère    
Sur la maison sans toit    
Livrée aux souvenirs    
Venant s'échouer    
Livrée aux éléments    
De l'Esprit éternel    
En retour de Solitude    
Barquette huîtrière franchissant le grau    
Le mascaret passé    
Caressant de la baguette magique    
Les mimosas de l'étang    
Évaluant par vent de suroît       
L'aller vers la douceur des pluies fragiles    
Sur la terre piquetée    
Pieds nus    
Cheveux ébouriffés    
Ta main tendue    
Ma main tendue    
A regarder la ronde la douce    
La mirifique coque humaine    
Sous la voûte de l'arbrisseau    
Vouée au projet ultime    
De notre progression vers l’Éternel.             
 
 
985