Terre et ciel d’Auvergne

Terre et ciel d’Auvergne
À l’arbre candélabre associé
Le chemin au dos rond
Partage d’herbage et mottes rondes.

Souvenir du gazogène
Dans le salon de Mère-grand
Figure jaunie d’un mariage passé
Sur la paroi de guingois.

À la une
La lune écrase les nuages
Dernière cabriole
Avant que ceux-ci ne la croque.

Fissure serpentifère
Sur le mur de pierres sèches
Les volailles de Louhans
Caquettent à hue à dia.

Repère de famille
De tout ce tintouin
Le paradis des jours heureux
Parade du bleuet au veston.

Trois pas plus loin
Le refus fût net et précis
Ne jamais contester l’ordre
Sinon le fouet calmera les ardeurs.

Le démiurge au fer rouge
Ronge l’héroïne
Sans se préoccuper du rêve effiloché
Au long d’une nuit lascive.

La vapeur est de mise
Pour ce trublion des heures claires
Puisant l’or noir du tandem
Vers la gueule de la bête.

Devenue plante
La tête en bas les racines vers le haut
Elle recueillait en sortie de chaîne
Le ruban de passementerie.

Orbite kafkaïenne des éléments de la rencontre
Sur fond du tissu de Vichy
La métamorphose des insectes
Faisait vibrer les élytres du temps.

Miroton et Dondaine
Parurent chargées d’effroi
Devant la missive de conscription
Annonçant la Grand Guerre.

Les laitues s’envolèrent
La carotte mit son loup noir
Le reginglot coula à flot
Devant le plat de côtes de la comédie.


1532

Vaguelette supérette

Vaguelette supérette
En regard des radars
Naît cuillère d’argent
Le marteau-pilon
Des mots sourds
Grandi à l’ombre du paradis
Qu’un filet d’éloges applaudi
À la barbe d’un Dieu.

Soyons le buisson ardent
Le cloître à l’ombre des cyprès
La louange en camisole mentale
Prompte au gardiennage
Qu’une ligne de défense illumine
Par temps de pluie
Quand conque au gré des vagues
Veille l’océan de silence.

Mon bonnet est l’alpha
L’oméga est le reste
Sans quoi la parole
Héritage de la scène officielle
Chante à dégorger les égouts
Au diable vauvert
Comme mains dans les poches
Attendre le prochain tram.

Siffler sa joie
Danser comme gitane
Organiser le haut-conseil du rouge-gorge
Le long des chemins vicinaux
Rassemble les éclats de rire de l’enfance
Autour de la marelle
Dans une rue vide
À rendre le septième ciel indicible.

Ruse des chiffres et des lettres
En ordre dispersé
Descendre le rideau de fer
Apte à l’enfant-soldat
Errer dans l’enfer de notre condition humaine
Jusqu’à tremblement de terre
Grandi en un instant
Au son du tambour en fer blanc.

Alors le ruisseau sort du lit
Part manquante du récit
À la gorge cadenassée
Jetant tête en arrière
Le huitième jour de la semaine
Aux pieds d'une Vierge des douleurs
Écho magnanime
Du grand fou-rire de la rime.


1531

Que la montagne est belle

La vie c’est comme un silence nouveau
Le mot est faible
Moyo
Elle m’attend
Elle est là disponible
Elle s’advient
La vie aimante et solitaire
La vie qui donne envie
La vie dérisoire et sublime
La vie c’est la poésie.

Je songe donc je suis
Un peu d’encre dans la marge
Un buvard gardant la trace
Un murmure qui dit vrai
Un faiseur de rêves
Un noyau d’ombre où se dire
Un tour de main dans le pétrin
Le précieux du temps venu
La harpe sortie pour l’occasion
La pluie qui tombe du toit.

Le prince du silence
Le miracle dès l’aube
Ce qui se donne, nu
L’offre de bon aloi
L’évènement rare
L’envie de rire et de pleurer
La lettre du bout du monde
Une suite à donner aux mots
Écrire comme on se tait
Le saute-ruisseau des heures perdues.

Que la montagne est belle
Que les vaches décrivent l’alpage
De gauche à droite sur la page
Au son des clarines
Cherchant la phrase
Pour en faire sa maison
Paupières closes
À usage coutumier
Le geste de l’élan vital
Unique geste scriptural.

1530

Le pas de deux

« Le pas de deux » 
Banni du vocable scientifique
Simule le miracle d’être
Un jour entendu
Comme abandon à la vie
Une absence
Une projection dans le futur
Un ailleurs que chacun porte en soi
L’acuité du non-voyant
Qui échappe au vertige des mots.

Explorer
Tentative de l’existence
Refus de l’incapacité
S’éprendre de la tourmente
Par une jouissance sertie à l’ongle
S’abandonner au risque insupportable
À la présence du tout
À ces feuilles mortes qui se retirent
Comme respiration de la pensée
Avec art et délicatesse.


Couper l’arbre
Et s’en aller plus loin que soi
Ne fait qu’un avec la blancheur de l’aube
Cet arrêt
Si fol en son absolu
Que même les moineaux
Au-delà du temps
Livreraient leurs pépiements
Comme menteries
À la foire du Lendit.

À fouiller la racine
La parure du sens
Sous l’humus obsidional
Apaise le chercheur
À l’abri des touches simples
D’une diction de baladin
Minuscule port d’attache
Caressant les sons
Jusqu’à l’obtention d’harmoniques
Entre regard et émotion.

1529

La douceur de vivre

Trois mendiants de bord de route
Ont préféré la roulotte de Mère Grand
Comme moineaux
S’engouffrer dans le feuillage odorant
Des nus-vivants de la provende.

Vraie lumière
Avec pour visée
De nous éclairer en toute humilité
À cheval sur les deux mondes
Au défi de mourir et de naître.

Souvent l’odeur est sous le livre
Au passage d’un univers l’autre
Franchir la barrière
Dans l’obscurité d’une nuit de Noël
À croire que ce qu’on écrit est vrai.

Nous ne sommes pas dans l’errance
Pour éprouver la faiblesse de l’enfance
Nous sommes les garants de la force
À prendre le relais au présent
D’un « je t’aime » de fin des temps.

Les vibrations de l’écriture
Ricanent devant le promeneur solitaire
Rendant grâce aux hautes connaissances
Jaillies du goudron noir
De conques authentiques.

La main est là
Saisissons la main
Mystère suprême
De la douleur
Et de la douceur de vivre.


1528

Je peux et ne puis

Quelqu’un à rencontrer
Par une journée de pluie
Sur la longue échine des monts
D’un ciel griffé par les nuages
Je peux.

Je ne puis
Me détacher des éléments
Au seuil d’une tempête
Sans plonger dans les douves noires
De la frise ciselée et bouclée.

Je peux
Sur l’herbe des bas-côtés
Fatigue absolue
Faire remue-ménage
De mes bagages.

Je ne puis
Déflagration odorante agissante
Effacer le ruban rouge et blanc
D’accès à l
'exigence du mot
Dès souveraineté atteinte.

Je peux
Habiter la ville
Où bleuit l’asphalte mouillé
D’un dernier voyage
Caressé par un raclement de gorge.

Je peux
Déambulant sans repères
À même la bonne voix des anges
Plonger au réticule d’une éclipse
Les floches de l’enchantement.


1527

Gouttes de sang près de la rivière

Gouttes de sang 
Près de la rivière
La lune est là
Dévalisant l’aube
D’une levée de nuages.

Dans le chœur des anges
Miroite l’acre
De l’âme métallique
Seyant l'enfant
De souvenirs oniriques.

Prise de vent
En tombée de nuit
Il pleut par la fenêtre
Pour peu que les pleurs
Agacent l’amandier.

Ficelle tendue
Entre le réverbère et la pensée
Interfère la lumière
Au son des miradors
Captant le halot des râles.

Plissement de l’œil
Au G.P.S. des convenances
Attrape misère
Devant le bucolique effort
D’un cœur à l’oubli assis.

Frisson et cætera
Mufle humide contre la joue
Engage le métal ergoteur
Contre la jugulaire du casque
Aux cris de la passion.


1526

L’évidence des mots

L’évidence des mots
Au jour le jour
Force salutaire
De la parole
De la poésie.

Par les ruelles du qu’en dira-t-on
Deux grandes personnes se rencontrent
À faire naître quelque chose
Fontanelles ouvertes
La respiration de l’écriture.

Les photos irisent le regard
De l’homme de terre cuite
Le céramiste des jours heureux
Que le feu célèbre
À la tombée du jour.

Hier, la vérité était une toupie
Aujourd’hui il fait beau
Au labyrinthe de l’esprit
La vie brille de ses feuilles d’or
Conçue sans raison.

Ressusciter devant le pire
Evoque guérison
Sans dégoût
Pour l’âme desséchée
Devant la chair ruinée.

En complétude
À force de gestes salutaires
Recueillir dans la coupelle
La lumière des fruits mûrs
Porte extrême douceur.


1525

Voyage pour un vivant

Un oiseau picore l’air
Emettant quelques sons
Espace – milieu chamaré
De ce qui ne se mesure pas
Mais se retranche
En s’accomplissant
Au mystère d’un cœur renouvelé
Rendu courbe
Comme si la terre germait.

La Gourmande a sucé le sucre des glaciers
S’en est suivi l’impact
Du plus grand que soi
Au ralenti des courbes
Ourlant le vertige du vide
À mettre une main devant les yeux
Sans attente du pont de neige
Que la traversée de la rimaye
Ne tarderait pas à magnifier.

Que voyons-nous ?
Du poème
Un clignement de mots
Ondulation
Par lente déviation du langage
Comme le peintre accompagne la coulure
Suintant de la toile
Vers la rigole du chevalet
En attente de lui-même.

Passant passante
Za magazi ndi mitundu
Pang'onopang'ono
Sur le palier d’un accueil
Au filigrane près
Framboises de novembre
Tombant à point nommé
Dans l’escarcelle de l’essentiel
Zosayenda, Inerte, Innocente.

Répétés à perpette
Les détails divergent
Pour devenir visibles
Impression de l’instant
Dominante placide
De l’action en attente
Au labyrinthe du temps
Effeuillé jusqu’aux bulles premières
Suggestion jusqu’au fondu de la page.

La faille
Au précipité d’une chute de pierres
S’est parée de blanc cérusé
Elle, la noire à valeur de plénitude
En déchirement de l’étoffe
Geste exemplaire
À la source tutélaire
Faisant cascade bienfaisante
Dans l’ombre de la fente.

Se sont croisés
Vitres baissées
L’eau la terre et le ciel
Dans la brume de l’esprit
Pour être irradiés
En secondes noces s’entend
Le regard étoilé par le gravier
Encéphalogramme plat
D’un monde reflété.

Enfouies sous l’humus
Les traces d’une fontaine sacrée
Réticulées par le détail
Sur les rainures de la pierre
Par un brouillard d’avant-garde
Donnent aux éloignés de l’étrange
La parure du jeune cerf traversant la clairière
À l’entrée du tumulus
L’art en approche de l’Être.

Echos du murmure de l’onde
Marmonnant les chants de l’outrepasse
Prisonniers d’un livre ancien
Menacé de tomber en poussières
Le monde-apparition d’une interrogation
Au peuple des ombres
Adressées aux voussures du temple
Pierres levées à profusion
Offertes par le donateur inopiné.


1523



Saint-Nectaire

0n vous encadre
Et vos yeux
Sont comme un nid d’hirondelles
Prêtes à point d’heure
D’aller rencontrer les anges harceleurs.

Votre main fine
Faites pour tourner les pages
Rassemble l’étole
Contre la robe cérémoniale
Au parloir des rencontres.

Je vous reconnais
Saint-Nectaire
À l’enténèbrement d’après naufrage
À marcher sur les braises
Dans la fraternité de fin du monde.

Le livre de prières historié
Ornait le plastron des offices
À la vie à la mort
Là où la flèche éternelle
Se ficha dans la cible.

Très tôt le bois se gondola
Essoufflement des pratiques
Dont on rêve
Advenue en la féérique prégnance
Du calme et de la joie.

Ton haleine sent le miel et l’or
Illustre pasteur rencontré au Sinaï
Âme éclaboussée de grâce
Montant au ciel ouvert
En légèreté de soie noire.


1523

La présence à ce qui s'advient