Fine danse à l’orée du ciel Et Finette l’aimait Ce cadet tout droit venu de Palestine À conter larmes et morts Par les ruines accumulées Poussière à soulever du doigt Le béton hérissé de ferrailles.
Une couche grisâtre Couvrait les ruelles étroites Reflet d’une beauté passée Hors des moucharabiés Hornant façades fissurées Dentelles creuses d’une bouche édentée Bombifiée par Lucifer.
Quelque morceau de plâtre Avait permis le tracé d’une marelle Où des petites filles aux robes déchirées Virevoltaient princesses messagères Sur un terre-plein inondé de lumière Soumis au surgissement de l’alerte Plongeant les lieux dans un silence odieux.
Soudain un craquement sec Faisait s’élever des volutes de poussière Puis des cris et des gémissements Des crissements de pneu sur la terre battue Suivis de sirènes hurlantes Que les murs déchirés faisaient rebondir Comme ballons de baudruche.
Face à face Les vélos posés contre les palissades Ils eurent le temps De contempler l’avancement des travaux Puis se dire comment ça allait chez eux S’ils avaient suffisamment à manger Et que les petits ne pleuraient pas trop la nuit.
Dans les rues désertes Un vieillard tirait sa misère D’un pas mal assuré Avec un grand cabas noir Pendant qu’un chat couleur sable Suivait à bonne distance L’homme au visage baissé.
Une pincée de matière friable Coulait grise dans une fissure À l’ombre de ce qui fût une échoppe Je m’approchais pour voir surgir La tête d’un reptile Un tout petit reptile Balançant sa langue d’un côté l’autre.
Nous avions déjà couvert d’autres lieux De désolation et d’inimaginables destructions Sans que notre respiration ne s’épuise Sans que notre sang brûle Mais jamais n’avions rencontré de telles souffrances Que même la maigre végétation sinistrée Comptait ses dernières traces de verdure.
Plus de muezzin n’appelle à la prière Du haut d’un minaret Encore debout mais chancelant Pendant qu’une ombre traverse la rue dévastée Enjambant les gravats En soulevant sa gandoura D’un geste mesuré.
Plus d’oiseau dans l’azur brûlant Les rues dégagées au bulldozer Semblaient des tranchées ouvertes après un cataclysme Des carcasses de véhicules Portes défoncées Étaient de rares touches de couleurs Dans un univers de fièvre suspendue.
Un chien passa Semblant pressé de rentrer chez lui Le museau au raz du sol Langue pendante Contournant les blocs de pierre Queue rabattue sur son corps décharné Il allait vers le soleil levant.
Quand nous reverrons-nous ? Quand nos mères se rencontreront-elles ? Quand notre père se retournera-t-il ? Quand nos enfants joueront-ils ensemble ? Quand parmi les cendres Pourrons-nous construire un campement ? Où déposer la feuille blanche du poète.