Le nouvel être

 Ce mur de sable durci  
d'une luminosité déliquescente
aux ridules enchevêtrées
cachant une ville entière
et je suis à ses pieds
ombre sans corps
inscrit dans l'instant .

Tout autour de moi
un paysage désolé
pas de végétation
la terre à nu
des roches éclatées
une lumière sans relief .

L'horizon troublé
un sfumato de Léonard de Vinci
sans codicille
rien de repérable
rien ne sachant rassurer l'œil
d'avant la catastrophe .

Je suis seul
point de vie alentour
pas de vent
un souffle rauque en continu
hole
le bruit d'une foule en marche .

La bête est là
immense derrière moi
et je suis comme anéanti
devant elle .

Elle passe sa main sur ma tête
je n'ai plus de cheveux
ses doigts sur mon visage
et je n'ai plus de visage .

Irradié
je suis anéanti
et néanmoins toujours en vie
et me montre à la tombée du jour
me nourrissant de débris alimentaires
tombés du haut du mur .

Ai-je été rejeté ?
Suis-je définitivement écarté de la cité ?
Une trappe ne va-t-elle pas s'ouvrir
au détour d'un rocher
et cet être énigmatique m'enjoindra-t-il de le suivre ?
Je le suivrai
dans le labyrinthe
éclairé par une lumière venue de nulle part .

Hâtant le pas
je trébucherai sur les aspérités du sol
craignant de le perdre de vue .

Longtemps très longtemps
nous avons marché
le long des collines renouvelées
sans cesse
telles des vagues de dunes
pour au détour
percevoir la cité des élus
son enceinte d'acier
luisante sur son promontoire
par dessus la plaine ourlée d'un crépuscule .

Mon amour !
ne retiens pas tes larmes,
pleurons .

" Tu sais
c'était le temps passé
et maintenant il y a l'enfant,
le Nouvel Etre . "


253

Au feutré de l’imagination

 Assagicage ouverte
de ma poche tombe le petit carnetpage ouverte .

Au feutré de l'imagination
au lendemain d'un train retardé
à la vaillance d'idées à transmettre
au déclenchement d'une oeuvre .

Lorsque définitivement entré en rébellion
s'inscrire dans la différence
sans presser le pas
de petit boulot en petit boulot .

Et qu'en réponse
à court de souffle
enchanter de traces convenues
une poignée d'oreilles disertes .

Cette plaine implicite et lointaine
faite de faim et d'épuisement
sans nous ôter la vie nous plonge en dépendance .

Devenons l'être humain
contre les démons de la permanence
aptes à faire irruption et se déchaîner
dès confiance revenue .

Outre l'enfermement dans la démesure
au bord du gouffre de la démence , dansent
l'ennui , la nausée , le marasme , la réitération
toutes bestioles endimanchant la conscience .

Soyons la bonne pensée
en liant l'épreuve nommée
son processus reconnu avec l'émotion suscitée par l'ouverture .

Hors de l'enchevêtrement des chemins de traverse
évitons le doux chant crépusculaire
sortons de la cage des quolibets
soyons les enfants de l'huîtrier au long bec .


252

Des tensions viennent

 Des tensions viennent  
 d'éléments émotionnels  
 la chape de béton  
 écrase l'épi de blé.  

 Des tensions viennent  
 des nouvelles réalités  
 au creux des vagues  
 une mousse superbe.  

 Des tensions viennent  
 au plus profond de soi  
 un appel  
 à davantage d'égards.  

 Des tensions viennent  
 lors des cycles de la nature  
 une fraîche nuée  
 témoigne des migrations.  

 Des tensions viennent  
 quant à s'entourer d'amis  
 ne constitue que le germe  
 de la mal-gouvernance.  

 Des tensions viennent  
 quand les barrières du cœur  
 cèdent et déversent  
 l'absurde  et l'indifférence.  

 Accueillons ces tensions  
 qu'elles prennent place  
 ces chevaux du désordre 
 venus du styx.   
  
 Tendons la nappe  
 sur la table des fêtes  
 couronnons de vrais instruments économiques  
 le fourmillement productif.
  
 Soyons la mèche  
 de la rencontre des uns avec les autres  
 en sagesse  
 soyons le grand livre des continuités.  

 Soyons l'appel  
 le regard ouvré  
 l'impossible devenu possible 
 le mariage de nos dispositions profondes.  

 Soyons de traces et de lumière  
 en atteinte de nos buts  
 la juste quotité disponible  
 à notre vie quotidienne.  


 251 

Je coupe l’herbe et le feu

 'Mele oa ka o robeha joalo ka   
 maqeba a kganya   
 ho hlakola pheletso ya thupelo.   
   
 Ke lumela maqheka a sa bonahaleng    
 Ke dula.      

 Ke kotula trot-menu   
 linate , lialmonde le monokotsoai   
 merung ya kelello. 
    
 Ke amohela pososelo le melomo e sisinyehang   
 Ke etsa likopano tse bonolo   
 sefaha se ka bonoang bosiu molaleng.   
   
 Ke kgaola jwang le mollo   
 ka matshwenyeho a pelo le moya   
 mohlolo ka pendant   
 Ke khutsisa ka nako e sa lebelloang   
 le fepa manong.   
   
 Ke tšoenyehile ke filiation   
 'na sehokelo pakeng tsa libanka   
 Ke ela hloko ntho e ke keng ea lekanngoa   
 likhanyetsano le litšōmo.  
    
 Bophelo ba ka ke bokhoni ba ho lumela   
 boemong bo phahameng   
 ntle le ho kopana ha letsatsi.   
   
 Pele ho maikutlo a makatsang   
 Ke sisinya phetolo e matla   
 kamanong e le nngwe le ba hlorisoang.   
   
 Ha ho molaetsa o nepahetseng   
 seo se ne se bua ka qeto ea hae e lokolohileng   
 ha feela mohafisi a ntse a sebetsa.    
  
 'Maraka oa Sontaha ha o sa buloa   
 li-stalls tse theotsoeng    
 pakeng tsa mahlaka a cauliflower   
 e sala e le metsi a phelang a tlhoekiso.  
      
 Leqephe le phethiloe   
 ka hloko re hloa   
 hoseng haholo    
 Letsatsi moena   
 ngatang ya tlhaho ya tlhaho   
 ho ea ho khanya e khanyang ea metamorphosis. 

     
 250 

Ke tswela pele mme kea dumela





 A tloha
lipina tsa bonk'a rona
meeding e nyopa ho na le moeli feela
ho tsoa mesebetsing e tlase ea bofokoli
esita le ntja e ne e ke ke ea fumana molato .

O hatela pele 'me oa tšela
sekotjana se tsamaisang ka pele ho tsela
ya qolotsang
khakanyo e thetsang ea lishaoara
ka lebaka la ho se fele .

E patiloeng meriting
motho wa ka moso
ho ya ka tse ke keng tsa phekolwa
phathahane le ho duma ka bophelo
e fanoa ka sekoti tlas'a mahlo .

O phopholetsa 'me oa inka
hamore ya takatso ya leruo
ho kokobetsa appetizer
ka lehlohonolo le bohloko
ho koloi ya batho .


249

khoele e khubelu e pota-potileng molaleng oa kolobe e shoeleng

   Maleme a nyeka lebopo la pele
maru a fana ka maikutlo a bophelo
mokoting wa maqhubu a hlomohileng
letsa lenaka la moholi .

Khoele e khubelu molaleng oa kolobe e shoeleng
parade ea spin
mahlaba-phio a letsa liphoofolo tsa litonanahali
marabele kelellong .

Batho ba ratang pina ea desopilant
ba hlophisa mahlomola a tšohanyetso a estaminets
tshabo e aparela aletare ya tlhekefetso
ba tsoang dibakeng tse ding ba hlwekisang pelo .

Ho bina boinehelo ba monahano
ba ya ba tla
bacha ba nang le litopo tse ntlehali
ba hlokang molao ho isa tumelong e qobelloang .

Fetisa mosali ea nang le sefahleho se fanoeng
ba phelang ka ntle ho li- cloisters
ho otlolla ka matsoho a hae a kopang
leihlo la letsatsi le mahlomoleng .

Ha re bueng ka molomo
re be batšehetsi ba matla
e le hore ka rills ea mali
e lateloang ke matla a matala .

Tsoa esale hoseng
likhoto tsa litoropo tsa rona
dinakabohi tse tsilatsilang
ya mebila ya rona e se nang batho .

Nako e khahlano le methapo ea ama
ka tlhokomelo e tsitsitseng
litlolo tse finyelloang
mokhoabong oa tumellano .

Ema
e ntša molumo o hlotsang oa batho ba futsanehileng
ba ahlotsoeng ho ba hlokang meno
khauta eo e ntšo e nyahamisa .

Eba leetsi tafoleng ea sechaba
iphuthumatse lehong la likahlolo tsa polao
boloka lipapali tsa hao le mafura a hao
tsoa pepeneneng le re monna eo o moholo .

Invective mesaletsa
eba nyooko ya marena a kelello
cheka lebitla la ba nkileng sebopeho
fetisa tsela ya hao ka pele ho thetso .

Mme o kgutla ho tla re bolella
hore bophelo ke takatso
ka katara
khahla e ratehang ea phula ka nqane .

E le hore seketsoana sa pampiri se tsamaee
sebakeng sa Tuileries
mantsiboeeng a mang ka December
leoatleng la linnete .

ngoana hore re
ngoana eo re neng re le eona
bakeng sa bana ba rona ka ho sa feleng
re be letsoai le mahe a linotši tsa lefatše .


248

lebone le apereng seaparo sa satin

      La lumière en robe de satin  
fleurs frémissantes
consume à petits jets de brume
le vertige finissant d'une journée d'automne .

La page tournée
reflète au marbre du passé
le soucis trop fois béni
d'un manquement à l'oubli .

S'émarge le creux des paumes sèches
en caresses douces
sur le rugueux de l'arbre
poitrail découvert
éclatée d'une ombrelle
convergeant au gré des vents
vers l'aube de riz ourlée .

Il est des mésanges à tête charbonnière
aux pépiements crépitants
sans que se lève la ridelle
du char des fêtes de mariage .

Toute romance est perle rare
tout sourire aux prises d'un rai de soleil
se retire la nuit
au cri du crapaud accoucheur .

Menuet de roses éparses
s'ébrouent les coquillages
de tendres processions
aux extases consommées .


247

en captation de soi

 Reflux de la mer   
avant un dernier saut
le béton se fissure
claquent les veines de verre
sous la griffe salée
les ferrures gémissent
les oyats divaguent
ce que racontent les marins
aux temps lointains des terre-neuvas
morsures d'un froid tenace
le vent arrache les arbres
les boues emplissent les fossés
les barges se soulèvent
les bouées volent
en gerbes d'écume
le long de l'estran
les vagues claquent la digue
les lisses brinqueballent
le sable emplit le moindre trou
le ciel se fait tohu-bohu
en cette feinte d'estoc
les mouettes pirouettent
au profond du blockhaus
la nausée aux lèvres
un cri
inouï
de silence
les heures sont bulles de savon
cavalcade effrénée
les chevaux caracolent
les galets fricassent
en surplomb du bastingage
corrigeant d'un trait de plume
l'œil des souvenances
l'ombre se fait surface
les creux emplissent de leurs suçons de vase
les plate-bandes de la plage
naissent brisures de terre
les crocs de la bête
écarlate en son outrance
recroquevillée et mal aimée
sale et refoulée
rebelle et courroucée
exposée aux quatre vents
n'étant plus que souffle
une charogne
la plaie offerte
en bordure de bocage
aux nervures fossiles
roulent les tambours
craquent les lucioles
sous le talon
rempart contre le bitume effondré
l'amertume
d'alternances noires et blanches
en captation de soi
la mort dans l'âme .

246