De tant et tant d'efforts à la mesure des sollicitations pour garder la tête hors de l'eau et être en ressemblance avec le visible sans être fermé à l'invisible .
De tant et tant d'efforts à élever la viridité sur le pavois de nos intentions alors que sans puissance effective l'amour sensible fait figure de désaffection .
De tant et tant d'efforts à se mouvoir dans ce corridor à distinguer le bien du mal afin de réellement voir où l'on va .
De tant et tant d'efforts à traverser les gués du torrent de l'illusion sans distinguer l'origine de cette poussière d'étoiles où être hommes et femmes liges .
De tant et tant d'efforts à se prévaloir d'un soleil éternel alors que les confins de notre entendement sont scarifiés sur les autels du mutisme et de la surdité .
De tant et tant d'efforts passés à attendre que la pluie s'arrête de tomber alors qu'elle est partie prenante de la fructification .
De tant et tant d'efforts à considérer le fin du fin de notre parcours de vie comme étant le bonheur alors que nous sommes éternellement en marche .
De tant et tant d'efforts à accepter que le soleil se couche avant que les blés ne mûrissent implorant en quête de moisson le retour de la faux du père .
Il faut jeter par dessus bord beaucoup de paresse, mais surtout beaucoup d’inhibition et d’incertitude pour se rejoindre soi-même .
Pour toucher les autres à travers moi, je dois y voir plus clair et je dois m’accepter moi-même.
Depuis des années j’emmagasine, j’accumule dans un grand réservoir, mais tout cela devrait bien ressortir un jour, sinon j’aurai le sentiment d’avoir vécu pour rien, d’avoir dépouillé l’humanité sans rien lui donner en retour .
Tous les problèmes que je traverse et que je tente d’expliquer, me tourmente et appelle en moi solution et formulation. Car ces problèmes ne sont pas seulement les miens, mais ceux de beaucoup d’autres. Si à la fin de ma vie je trouve une forme à ce qui est encore chaotique en moi, j’aurai peut-être rempli ma petite mission.
Tout cela me semble bien prétentieux. Je me sens parfois comme une poubelle tant il y a de trouble, de vanité, d’inachèvement, d’insuffisance en moi.
Mais corrélativement il y a aussi une authentique sincérité et une volonté passionnée, presque nécessaire, d’apporter un peu de netteté, de trouver l’harmonie entre le dedans et le dehors pour se rejoindre soi-même .
A la longue il se pourrait que je trouve la paix et la clarté. Mais oui ! C’est maintenant, en ce lieu, en ce monde, que je dois trouver la clarté, la paix et l’équilibre.
Je dois me replonger sans cesse dans la réalité, m’expliquer avec tout ce que je rencontre sur mon chemin, accueillir le monde extérieur dans mon monde intérieur et l’y nourrir – et inversement je dois continuer d’écouter au-dedans de moi – , mais cela est terriblement difficile et c’est pourquoi j’ai ce sentiment d’oppression au-dedans de moi .
C’est alors que je fermais les yeux. Ne plus penser. Je traversais un moment de paix, d’accalmie. Ma foi indéfectible en l’homme ne peut faire en sorte que je me dérobe. Une perspective de cohérence m’appelle. J’ai si tendrement à faire que je ne puis qu’assumer pleinement mon destin et employer mes talents à soulager les maux de mes frères et sœurs .
La frontière entre le bien et le mal passe entre les deux rives de la rivière. Tout choix d’une rive plutôt que de l’autre ricoche et porte en lui son châtiment et son germe. Le châtiment maintient en enfer ; et le germe, cette force capable de fendre le roc, fissure le cœur. Aussi passons-nous notre vie à tergiverser sur une passerelle .
C’est le passage de l’une à l’autre rive qui reste
pur mystère. Nous pourrions penser qu’il existe de chaque côté un abîme par
lequel s’opère le passage à une autre dimension. Et peut-être la tentative
d’échapper par tous les moyens à cette aspiration, à cette chute vertigineuse
est-elle l’origine de nos pires souffrances .
Le refus acharné qu’oppose le connu à l’inconnu,
le familier à l’inexploré, oblige le destin à user de violence envers nous .
Pour le foetus dans le ventre de sa mère, la fin
du monde se nomme naissance. Nous appelons papillon l’anéantissement de la
chenille. Toute vie est un drame cosmique qui ne finit, somme toute, pas si mal
.
Passer le pont, c’est changer de nature. Voir
autrement, c’est changer sa vision, c’est fissurer sa vision convenue des
choses. Qu’il est douloureux de changer d’état. Cela nous fait cligner des
yeux, avant de voir plus tard ces états se stabiliser .
Changer de bord brouille le regard que les autres
me portent. Aussi de peur de passer pour dément, je me garde d’en parler à
quiconque. Mais la vérité est à l’inverse, aussi suis-je sorti du monde
qu’hallucine mon époque pour rejoindre une réalité sans temps et sans lieu. Et
cette réalité est coulée de lumière, magma fluorecent qu’irisent toutes les
nuances du plus sombre au plus lumineux. Et cette palette est piano des
couleurs .
Et je l’ai vu comme je vois maintenant par la
fenêtre éclater un été au zénith de sa majesté. J’ai vu que la matière n’était
que lumière et vibration et Amour, pur Amour, Amour incommensurable .
Et je vois tous ces êtres humains aller quelque
part alors qu’ils ne sont jamais partis de nulle part et n’arriveront en nul
lieu où ils ne sont déja. Cette immense mise en scène sacrée et absurde me
laisse à penser que les hommes sont des dieux quand, entre deux rêves, ils
laissent leur regard vaguer sur le monde .
La leçon de cette métaphore de la passerelle entre deux rives est que la vie nous a été donnée, que nous nous devons de mettre le plus d’énergie possible à faire fructifier ce potentiel, le moins d’énergie possible à en souffrir et ne pas s’étonner quand ce qui semble être éternel clignote et disparaît .
Défaite sans parole sous le vol d'un spectre se vidant de ses attributs .
Exil d'une seule nuit dévorée par la toile du songe sans que le secret ne corrompe la mémoire . Oubli d'entre la brume et la lune tu ne mourras pas tu ne peux mourir toutes gloires du jour éteintes de par les entrailles de la vallée d'où s'élève le double son du hautbois et du saxo .
Envoûtement prolongé aux limites d'une traversée avant de s'abîmer dans l'obscur où lentement se consument chairs et ongles de l'endimanchement de la tendresse échue en rosée de sang avant que ne s'égare l'aube . Écueil disposé entre les lanternes au milieu de ces épaves qu'un ordre mystérieux fait accoster dans ce royaume où le froid silex sépare la chair de la peau .
La vie est là la vie est le lieu la vie mienne en compagnon de ta vie taille XXL de la médiane tracée entre le sourire de l'enfant bleu et la perpétuité d'un désert blond .
En lien de doute et d'espoir . S'il y a lien entre l'artiste et le reste de l'humanité ce ne peut être que rien de vivant ne peut être créé sans la conscience obscure de ce lien là lien d'amour et de révolte .
La suite ne peut venir qu'après la fin du film une suite filtrée par la gaieté de la lumière du monde une suite pour grimper quatre à quatre les marches en amitié de l'air s'épaississant à mesure du temps mêlé au temps à mesure de cette journée passée qui ne reviendra pas à mesure des cornes acérées d'un froid saisissant la lisière des forêts .
Ils viendront ou ne viendront pas puis repartiront leurs vies tournées vers leurs occupations quotidiennes .
A tendre le cou vers la proximité d'une finitude rien qu'à soi s'élève le fumet des sacrifices faits aux dieux en proximité d'une attitude humaine qui vaille - le rire .
S'engouffre par la porte des déconvenues des camps de concentration des meurtres et des viols l'épreuve ineffable où doit se régler la question du sens de sa vie le cœur battant à tout rompre devant le livre rouge des contrefaçons où s'enfuir en catimini où cracher ses caillots de mots sombres sur le corps de marbre du père parti dès la première ligne où l'effort de s'engager qualifierait d'une attention première le souffle divin à promouvoir .
S'élève par dessus la tendresse de l'aube aux accents de merles chanteurs le caducée de l'intelligence et de la culture union cadencée aux douces effluves de jasmin hors la solitude bitumineuse hors le mot à mot de l'encre noire hors le palais imagé des juges de l'octroi hors l'ourdissage des frasques de la bêtise hors cette étrange naissance entre chien et loup où lire vrai est l'ultime moment de décision pour rassembler en son âme la perspective d'un nouvel élan afin que l'énergie adhère à l'esprit tremplin où rebondir encore plus haut dans la vie simple .
Toi si transparent fricassée de grillons dans la prairie à la tombée de la nuit regard ouvert à l'éveil d'un ciel étoilé hors d'atteinte à la source des murmures .
Tu es venu des profondeurs terrestres de mille pétales constitué devant l'arrivée trépidante des étourneaux à répéter que la marée monte que les appels s'effacent étouffés en fond de cale à espérer que la dernière goutte de pluie tombe sur l'aile de la nuit de feuillages parée aux cimaises de la nostalgie à guetter le furtif passage d'entre le féminin et le masculin et renaître en ton sein .
Avec du bleu partout sans bleu à l'âme avec du vent à perdre haleine mais sans vraiment la perdre avec une tendresse de l'air sans mouche carnassière avec un arbre des tropiques qui ne pique pas avec la mer mais pas trop froide et sans requin avec des bateaux sur lesquels on pourrait monter avec des vendeurs de chichis qui soient beaux et ne projettent pas de sable sur le bronzage avec des enfants qui ne crient pas avec un soleil qui ne soit pas trop chaud avec une baraque à frites pas trop loin avec un polard à lire qui ne soit pas trop glauque avec une serviette de bain suffisamment large avec des lunettes de soleil sans traces de doigts avec un parasol qui ne s'envole pas à tout bout de champ avec un smart phone à la sonnerie pas trop agressive avec des heures non comptées devant soi avec une douce sensation de faim qui fasse penser au barbecue du soir avec le bruit des vaguelettes qui viennent caresser la grève sans raclements disgracieux avec un ciel où les avions ne traîneraient pas leur pubs illisibles avec un ventre pas trop gros qui me permette d'apercevoir les orteils avec une crème bronzante qui ne tirent pas les poils en séchant avec juste ce qu'il faut de sueur montrant que la graisse fond mais sans dégouliner avec une calme détente à chaque respiration en espérant que ce ne soit pas la dernière avec une plongée dans un demi sommeil accompagné de papillons volant dans des cieux d'azur avec la possibilité de saisir une poignée de sable sans rencontrer un mégot avec le projet de ne rien faire malgré ce mental qui nous ronge avec une pincée d'infinitude sans penser à ce qui vient .
La mer au cru d'un bleu des origines je m'y jetais je quittais le radeau des convenances et tenais gente damoiselle contre mon giron l'eau était tendre et propice à l'avancement de la situation au large étale sans terre à l'horizon immense aux fines ondulations régulières et frissonnantes l'onde transparente je distinguais des galets par le fond je nageais sans hâte sans but un temps infini .
Apparurent des côtes je m'approchais le paysage était décharné tout était blanc de cendres d'après le cataclysme des arbres déchiquetés pas de feuilles pas de verdure je longeais le littoral une crique j'accostais une maison en bordure d'un amas de végétaux fossilisés vestige d'une forêt d'antan gigantesque cimetière dressant ses moignons vers un ciel d'airain une maison avec un échafaudage tout autour des êtres humains devaient avoir repris possession du lieu après la terrible épreuve je déposais gente damoiselle et la suivis vers la maison une bâtisse de pierres à deux niveaux devant la porte alors que nous nous apprêtions à toctocquer s'ouvrit telle une rafale de vent un souffle qui nous aspirât un printemps nous enserrait une petite femme toute de noir vêtue d'une toile souple la tête recouverte les pieds nus dans d'épaisses sandales de cuir à lunettes et visage ridé parue pour nous entraîner vivement dans un intérieur sombre les deux femmes semblaient se connaître je n'eus droit qu'à un coup d’œil furtif comme si je n'existais pas mais étais-je vraiment visible ? au travers de cette traversée que j'effectuais sans effort animé d'une tâche à remplir n'étais-je pas un esprit ? s'engageât là devant moi simple témoin une conversation animée pleine de joie de variations dans la voix deux bouquets de fleurs multicolores des pépiements d'oiseux joyeux s'entrecroisaient au jeu des mains et des regards lumineux un chant gracieux fait d'allégresse dont je ne comprenais pas la langue je n'étais pas des leurs j'étais le passeur qui permettait leur rencontre alors je disparus fort de l'oeuvre effectuée .
Depuis ce temps le murmure n'est plus le simple accord mélodieux des éléments de vie rencontrés il est charmille épaisse en la vie revenue et rire des enfants à la remontée du chemin pierreux qui longe la maison désormais familière .