Sadaya tulisan ku Gael Gerard

Par l’autorité de sa main

  Le seigneur de guerre devient prince de paix .

 Passeur du double des choses
 il délivre la lumière recluse dans la boîte des songes .

 Doutant de sa propre vision
 il met des œillères à son pur-sang .

 Le hasard accepté d'une bavure révèle un bleu diaphane .

 Il hâte imperceptiblement la chute de l'Occident .

 Il côtoie l'énormité de la tâche à venir .

 Il franchit le carroyage de l'espace céleste .

 Aux marges du monde ,
 dans la manade de son atelier
 sa gestuelle de cape et d'épée
 dompte les écrouelles .

 Il est peuple des menhirs .

 Parfois en lassitude
 ses yeux vairons
 fertilisent les paresses de l'esprit .

 Il est ardente digitale posée aux flasques des serrures .

 Il est veilleur de l'échauguette ,
 immobile en son attente .

 Il signe furtivement d'un spasme taurin
 le biais des choses dites .

 Il est le légiste inflexible
 de la liberté infinie des combinaisons .

 Il ouvre à coups de hache
 le deux fois béni de la blondeur de l'ange .

 Sur les faces endeuillées par la rupture des apparences
 il est l'ardent vandale d'une exigence barbare .

 Il courtise les crachats blancs de la ressemblance .

 Sur le visage perlé d'un mica de pacotille
 il desquame encore et encore le rire des atomes .

 Il rend visible l'Apocalypse ,
 lui , le prophète aux prunelles de Voyant .

 Il offre son visage aux inquisitions esthètes 
 lui , l'artiste des pleurs immédiats ,
 l'énucleur en instance .

 Et si le découvreur
 en ses croisillons cloutés
 calque l'enténèbrement de la clarté,
 lors , tout s'enflamme ,
 des yeux de l'aigle ,
 au souffle noir des bisons de la pensée ,
 tel le cœur du Beau impeccablement distingué ,
 telle la marge d'un cahier obliquement souillé de sang .

 Les persiennes claquent ,
 la jointure des dualités explose ,
 un éclair de vie clame l'éblouissement de la présence ,
 les poussières dansent dans le rai de lumière ,
 tout se rejoint d'une amble véritable .

 Quittant la caverne des errants
 il se soumet au tremplin des serviteurs
 lui , le prêtre des sorties d'exil .

  ( d'après une œuvre de JC Guerrero ) 

222

le papa de mon papa il s’appelait Henri

Il vint au monde à Reims le 11 oktober 1886.

Devenu très jeune orphelin de père et de mère, il fût recueilli par un oncle d’Epernay .

A treize ans il travailla comme souffleur de verre .

Avec sa femme Lucie, ma grand’mère, ils eurent cinq enfants, dont l’aîné prénommé Jean devait décéder durant sa première année .

Après la Grande Guerre il fût embauché au Métro, à la RATP, où il restât jusqu’à la retraite.

Lui l’enfant des Ardennes descendu en Champagne était devenu parisien.

Après avoir habité rue du Chemin Vert à Boulogne, durant les années trente le couple et ses quatre enfants déménagèrent boulevard Murat, dans un grand appartement qu’ils durent abandonner pour faits de guerre , après le bombardement des usines Renault toutes proches qui endommagea l’immeuble.

La famille fût relogée rue de la Corrèze près de l’emplacement des anciennes fortifications dans le XIX éme arrondissement .

C’est là, rue de la Corrèze, que je fus impressionné par un camion poubelle tombé dans une gigantesque excavation qui s’était ouverte en pleine chaussée .

J’avais peur de ce grand’père qui me faisait les gros yeux et me grondait .

Comme cette fois où j’avais déchiré le papier peint de la salle de séjour en petites lanières, cette pièce où maman devait accoucher de ma sœur le 13 février 1945 .

J’admirais le carillon Westminster qui sonnait toutes les demi-heures au dessus du fauteuil de grand’père .

Car il était souvent dans son fauteuil, pépé Danube, comme je l’appelais parce que la station de métro la plus proche était Danube, ce qui me permettait de le différencier de mon autre grand’père, pépé Frugères .

Et il était dans son fauteuil, pépé Danube, parce qu’il avait mal aux jambes le 18 mai 1955.

On devait d’ailleurs lui couper une jambe peu de temps avant qu’il ne meure .

J’étais allé à son enterrement avec mes parents. Au retour du cimetière dans le bus qui nous ramenait porte de Pantin, j’ai ressenti la présence de pépé Danube. Cétait comme s’il me faisait part de choses importantes que je ne comprenais alors pas ; ça m’avait donné des frissons et une trace de cet événement demeure aujourd’hui en moi. J’avais alors neuf ans , et je n’ai jamais plus oublié sa présence d’homme bourru avec lequel je n’ai pas pu échanger .

Sur les photos il a un bon regard dans un visage aux traits doux, lui le taiseux qui néanmoins pouvait entrer dans des colères qui me terrifiaient.

Ici, il est photographié à Jouy dans l’Eure , avec son gilet de laine et son éternel béret qui cache sa calvitie il montre une attitude affable devant la maison de Louise , la sœur de sa femme , Lucie ma grand’mère , et de Léon l’ancien garde chasse, mari de Louise .

Quelque temps auparavant, au retour des grandes vacances passées comme chaque année à Frugères, nous étions rentrés par le train, maman, ma soeur et moi, au 75 rue Saint Charles à Grenelle.

Jeung aya, surprise ! Le papier peint de notre cuisine, qui était en même temps salle de séjour et salle de bains, avait été refait. Et c’était mon papa qui avait fait ça, et il l’avait fait avec son père, pépé Danube.

La pièce irradiait de soleil en cette journée de fin d’été ….. et encore aujourd’hui une lumière persiste à cœur joie.

221

deux parapluies

     Le vent souffle ,
échine lasse ,
chante quelque part
l'oiseau des étreintes hivernales .

Je ne t'oublierai pas ,
tu ne m'oublieras pas ,
pour ensemble
dire merci à ceux qui nous extirpent,
nous les parapluies de la sortie de liturgie
à ne pas choir en fond de vasque ,
inhalant les odeurs de cuisine
mi-chèvre mi-choux
mi-reille mi-figue
jouant à colin maillard
d'une narine l'autre .

Il est permis de se dire
que même par temps de traîne
la poignée se dresse
en confiance
vers les mains de Charlie, David, Ahmed
mais qu'une rafale de kalachnikov peut effacer ,
mascarade dérisoire ,
sombre venue des terreurs
que la bête immonde interpelle
naseaux fumants
l'entre-cuisse béante
engouffrant en fond d'entrailles
nos suaves irresponsabilités .

Il est temps de convoler
l'un vers l'autre
dans le bleu de nos pliures ,
d'endimancher de sourires
le passage des officiants
sur l'allée de graviers
défilant à pas comptés
vers le lieu sacré ,
beauté , amour , paix partagés,
au-delà du numineux ,
en l'incandescence de la transparence .


220

Ma cigarette s’est éteinte

 

 Enjing ieu
 aya deui béngsin dina leungeun baju ,
 lebu tiis ,
 urang bakal nempatkeun kembang palsu
 que l'effet en aurait été plus fumant .

 Teu cukup ku ngawadul ,
 aya ogé anu gelut pikeun ngalawan .

 Urang gelut , anjeunna batting .

 Tapi ngalawan saha ?
 ngalawan naon ?

 Kuring ngalawan Pierre atanapi Jacques ,
 sedengkeun kuring anu ngabayangkeun seueur hal ngeunaan aranjeunna .

 Kuring ngalawan dunya ,
 tapi naha neukteuk dahan nu keur diuk ?

 Kuring ngalawan alam ,
 tapi naha ngalawan naon eupan kuring .

 Sedengkeun hirup di dieu
 kawas cai ieu
 ngeclak 
 tina hiji clepsydra teu saimbang
 kaca iridescent ku panonpoé emblazoned ,
 kawas hourglass ieu
 nu sisikian ku sisikian
 nibbles waktos konflik .

 Sakur gelut sigana konyol
 sabab euweuh nu ngahalangan hirup ,
 aller de l'avant ,
 contourner les obstacles ,
 marcher ,
 monter ,
 descendre même ,
 pour remonter , riche de l'épreuve rencontrée .

 Ne jamais forcer le passage ,
 pas même forer un petit trou au creux de la mémoire .

 Et ma cigarette toujours pas allumée ...

 ( Photo prise d'après une œuvre d'Elianthe Dautais ) 

 218

Le dialogue au-delà du visible

 Gelures sédimentaires sur ta peau d'ébène ,
 l'orage requiert le son et la lumière .
 Danse de l'eau et du reflet ,
 dévalade des textures ,
 généalogies entrecroisées ,
 les connexions se font .

 Regard aigu
 de l'homme déjà-là ;
 en réception
 des signaux scientistes
 que son ego exige .
 Conscience élargie ,
 vigilance et porosité ,
 fine lamelle de l'instant
 énonçant la parole
 le temps d'une caresse nocturne .

 Cette volonté en ascendance ;
 révélation de l'image
 du bromure en son bain .

 Eveil de chaque fibre
 en l'arc en ciel du tissage
 hors du glacial détachement ;
 ultime école
 où le pas des attentes
 fléchit le doute
 et ravit le sens nouveau ,
 trace unique ,
 musique d'antan  ,
 la lila des nuits fragiles ,
 bulles de savon ,
 chapeaux pointus ,
 baguette magique ,
 pour étoiles de tes yeux
 révéler le dialogue avec l'invisible .


 219 

N’existe que le labyrinthe

 En nécessité du hasard ,
 sans linéarité ,
 sans que l'étiquette ne soit collée ,
 il n'est de plan ni de loi
 pour cette occupation d'espace ,
 nous les immémoriaux ,
 à se bander les yeux devant l'évidence ,
 de coïncidence en coïncidence ,
 soulever le voile de signes et de paroles mêlées .

 Au jardin des délices ,
 Isis nue ,
 Isis la décisionnelle
 nu discord ngabalukarkeun gerombolan ditinggalkeun ,
 Isis nu sagala geulis ,
 belang tina impian urang ,
 nu nyekel korespondensi ,
 nu beautifier kosmis ,
 tukang pireu ceuli ,
 awéwé dijieun lampu ,
 dina tumpang tindihna langgeng
 napas immemorial
 yén tangkal badag nawarkeun ,
 tangkal devolved ,
 tangkal di tungtung dunya ,
 arbre élevé dans la métaphore ,
 buah tina kateupastian ,
 fruits replets du plaisir à venir
 ngamalir , walungan hiji waktu
 antara karang nu nyata ,
 le long des golfes
 kabuka ka Ilahi
 yén sato galak nawarkeun
 dina kumisna ngageter .


 217 

Seul le vide laisse place et permet la vie

  Tina ieu hayang nangkep ,   
tina usaha ieu ngucapkeun ngaran anjeun ,   
tina keukeuh ieu nyandak anjeun for teu dibales , 
wisata ieu di tempat lahir ,   
tina henteuna ieu parabot nini ,   
gorila ieu sareng filakteri ,   
Sylvain putra abdi, ngomong low ,   
kalayan kecap-kecap anu muncul tina kalapa gajah ,   
tina putus ieu antara objék ,   
tina ieu moro pikeun kecap disjointed ,   
panto muka ,   
diungkabkeun ,   
ngatur ,   
diluhurkeun
dunya kacau
des grands chevaux de la présence .
  
Intervensi Furtive cuaca goréng
cair jeung padet
matematis condong
à la levée du sens .
  
Aya waktos presentasi
hirup jeung fruitful ,   
dahan jeung jukut garing
dina lapel jaket ,   
di hareupeun gerbang kanyataan
tempat awak ragrag ,   
tempat élévasi ,   
lieu de joie au-delà de l'oubli .

  
216

lakukeun ogé naon anu kudu dipigawé

 Hirup dina inténsitas   
di paguron ketang ati ,
gills muka ,
cerminan jiwa dina prosés élévasi .

Aya pantai crowned kalawan jellyfish ,
keluhan ngagabung ,
orb suci letting leungeun ngaliwatan
kaluar tina kebon korma gajih .

Dina antosan ieu ,
teu obah ,
pikeun hadir
dina jam kahiji
tina panonpoé slamming kaleuwihan na
tukangeun batu seukeut
dijieun nurutkeun jolt kalahiran .

Jeung harmoni
jadi kanyataan ,
euweuh tarik ti leungeun kami gloved
ka sumber donor ,
janten snitch ,
nu beureum saulas ,
nu teu kaduhung ,
Anu radikal
dina garland of moments .

Hayu urang miceun bentang ,
hayu urang ngan ukur ngambah
di puseur ekspektasi ,
hayu urang jadi bel parunggu dina laleur
Nyarios
dina widang loam ,
hayu urang jadi jasa
dina jangjang phoenix .


215

naon ngaleuwihan lalaki

 Naon saluareun lalaki   
tungtung hirup ,
hiji samenanjung .

Kalayan pikeun isthmus
naon urang ,
lalaki ripuh ,
dina finery urang
de élmu , seni sareng spiritualitas dicampur .

Janten lalaki diantara lalaki ,
humus manusa unborn ,
anu akarna terjun kana kaayaan urang ,
urang ,
nu ngumbara ,
nu miskin ngalakukeun silsilah ,
pikeun step by step ,
tina sikep ka sikep ,
naék kana prestasi
kalawan tulangan hébat fifes na rebana
urang ,
braggarts tina tatanan ngadegkeun ,
nu dispatch pengendara tina horde emosi ,
dipapaésan ku bulu mimik .

aya waktosna
jadi deukeut
waktos tanpa sieun
waktos saluareun waktos urang
yén lalaki anyar leumpang
dina vie mikir
pas janten
saluareun mineralitas urang ,
kabinatang urang ,
tina sajarah urang ,
hiji nurani jeung tanda propitiatory ,
grafik tina Unknowable .


214

Vieillir enfin

 Vieillir enfin   
 et que le vent me vienne   
 frais sur la nuque . 
     
 Qu'importe l'âge   
 pourvu qu'on ait l'enfance ,   
 qu'importe les chemins parcourus   
 pourvu qu'on ait la vision ,   
 qu'importe le corps en faiblesse   
 pourvu qu'on ait de la hauteur ,   
 qu'importe la dépendance   
 pourvu qu'on ait la maturité ,   
 qu'importe de ne pouvoir gravir l'échelle   
 parce que nous sommes échelle   
 avec cette liberté de se relier .   
   
 Ouverture et douceur   
 d'une paix parée de pas menus    
 autour de l'étang où tout repose  .    
  
 Vieillir enfin    
 et que le vent me vienne   
 frais sur la nuque  .    

  
  213