Le chardon

Le train ailleurs   
En gare de La Ciotat
comme des pleurs.      
 
Écru de toi   
Ai cru en toi   
No pasaran.      
 
Au gris des nuits fragiles   
Froidure remémorée   
Dans sa vastitude.      
 
Brisures de l'instant   
Sous les nuages   
Le délié du matin.      
 
En file indienne   
Les ombres   
Sur le parvis.      
 
Petit homme   
Signal de crête   
Sous la caresse.      
 
Éparpillées   
Enfin à démêler   
La cithare ornée de brocart.      
 
Un paysage   
À l'ombre de l'étang   
Paroles parallèles.      
 
De songer   
Fait émerger   
Le capillaire de l'instant.      
 
Entre l'homme et la nature   
Le chantre   
Des arcanes syntaxiques.       
 
Galets ligaturés   
Au terme de la vague   
Un raclement aigu.      
 
Un tableau de Maître
Pour ça   
Sans être éconduit par la rebuffade.    
 
Pulsation   
De pleine résonance   
La douceur d'un chant.      
 
Depuis longtemps   
Le mystère    
De l'errant.      
 
Au bout du bâton   
Le chardon de Dieu   
Un bleu à se damner.      
 
Rocher et arbre   
L'entente invisible   
Qui concilie et se réconcilie.      
 
Concurrence assumée   
De l'image et des mots   
Sur la tige du bambou.      
 
D'être au tropique   
Amuse le créateur   
Odeur de démastication.      
 
À l'origine   
Fertile incohérence   
Amène le printemps.      
 
Le geste   
Nourri de bonne sève   
Mène au déchirement.      
 
Réconcilier la vie   
D'une langue l'autre   
Le grave et le sensuel.      
 
 
1219


Les Vues Ardentes

Il était né dans la souffrance   
Tenu par les pieds la tête en bas   
Frappé   
Et quand il cria ce fût la délivrance   
La neige pouvait cesser de tomber.      
 
La trace violette s'élevait   
De la terre vers le ciel   
De l'amas des pierres concassées   
Vers l'horizon   
Sans refuge.      
 
D'étranges fissures   
Dessinaient de fausses ouvertures   
Sur les murs gris de parpaings   
À la mesure des jours et des nuits   
De moindre imagination.      
 
En sortant   
Il avait soustrait la poignée de la porte   
Rendant le retour difficile   
Jusqu'à ce que secousse le saisisse   
Pour l'enfouir dans le sommeil.      
 
Dire que cela le faisait fléchir   
Ne pouvait que tarir   
Cette effluve de tristesse   
Bleue comme un ciel d'automne   
Où se perdre sans se contraindre.      
 
Rassembler ses souvenirs   
Le rendait apte   
À dessiner sur les vitres embuées   
Les silhouettes et les signes   
De son entrée au monde.      
 
Au loin les Vues Ardentes   
Magnifiées par l'aiguillon du désir   
Le faisait messager de la flèche   
Sur la corde tendue   
Sur le gouffre de l'absolu.      
 
Les courbes de niveaux   
Etaient un grand paquebot   
Navrant de jets de vapeur   
L'improvisation de cette approche   
Codicille indocile.      
 
Quittant la place   
Éteignant les lumières   
Il promettait d'être aux commandes   
De l'étrange véhicule de son destin   
Ce corps à la livrée sans-souci.      
 
À tâtonner la connaissance   
Il se prit les pieds dans le lapis-lazuli   
En contournement des étreintes   
Fournies encapuchonnées par la saillie consommée   
Chemise écarlate échancrée sans regret.      
 
Nuitamment   
S'approchant de l'embarcadère   
Flasque vide   
La surprise fût de croiser quelques archers   
Graphés sur le mur des ancêtres.      
 
Belle   
Cette vie à la main leste   
Laissaient bras ballants   
Traces de poésie   
Sans contrepartie.      
 
( détail d'une œuvre de Jean-Claude GUERRERO )
 
1218

Les hautes fonctions du végétal

Fissure dans la nuit   
Du cœur la tenue du pinceau   
Fera de l'horizon   
Une ode à la fenaison.      
 
Écarquillé de verts   
Retournement Transformation   
Des volutes de nuages   
Au gré du souffle.      
 
La vie engendre la vie   
Alors que me plaît d'ordinaire manière   
De contraindre le présent   
À son retour discret.      
 
Se retourner pour voir de loin   
La peinture sécher doucement au soleil   
Augure d'antique pratique   
De rehausser l'enfance.      
 
Un mouvement une commodité   
Seront la discipline de l'instant   
Cet art de vivre   
Dans un claquement de langue.      
 
L'œil qui observe   
Voit l'artiste observer   
L'émergence de l'Autre   
Jamais prévue toujours renouvelée.      
 
Aux cris aigus   
L'ombre rencontre l'esprit   
Une nuit   
Quand volent les phalènes.      
 
Et qu'importe   
Cette aptitude du vivant   
À rejoindre   
L'oublié des courbures.      
 
Ainsi privé de paroles   
Comme possédées   
Les hautes fonctions du végétal   
Gagnent la partie.   
 
Un écueil une fuite   
Qu'importe   
La manière fera le reste   
Trace tatillonne.   
 
Au delà c'est le rêve   
Le rêve d'un papillon   
Bouleversant l'invariant   
Possédant le corps.      
 
Sur le registre   
Est inscrit qu'il traversa le plain chant   
Le printemps modulé   
D'une haute romance.      
 
( peinture de Pierre-Sylvain GERARD )
 
1217
 

Chat y es-tu ?

Nonchalant et oublieux   
Du merle blanc de notre enfance   
Je murmurai quelques grâces   
Sur son cœur à transmuer   
Pèlerin du désir   
À s'efforcer de faire son miel   
Emblème scandaleux   
Boutant hors système   
Son regard   
Disposé de s'ouvrir aux choses vivantes.      
 
Se comprendre   
Mains posées sur le lapin   
Broutant le lys   
Alors que le scandale des origines   
Faisait grand bruit dans la vallée   
Jusqu'à paraître "bébête"   
Le persiflage du malin   
Cet échalas aux tempes grises   
Plus apte à marier d'un aveu d'insignifiance   
Cette rencontre de haute lice.      
 
En complicité certaine   
Avec la chimérique fusion   
Le long terme s'enrichissait du quotidien   
Ramassis d'élégantes alliances   
Avec le bien-fondé de la société   
Où falloir du courage   
Pour affirmer que le désir   
Promeut la complicité   
Procès d'acceptation   
De ce qui advient.      
 
Point de morale   
Juste une parole de pas de porte   
Pour gourmander cette liberté   
Ne pouvant s'exprimer   
Que si le cœur est attaché   
Par devoir au un plus un   
Impliquant transformation   
Sans déréliction   
Sur les terres sacrées
Élaborées par la force du retrait.      
 
" Différence " وغیرہ " durée "   
S'entretiennent près d'un puits de Samarie   
À montrer ce que l'homme fait   
Dans le hasard de la rencontre   
Alors que coule l'eau   
Conscience éternelle   
Par temps de sécheresse   
En tension de ce qui jamais ne s'achève   
Le Souffle   
Vraie parole d'amour.      
 
 
1216

Aller y voir

Me suis dit   
Qu'il fallait que j'aille y voir   
Dans le trou béant de la romance   
Pour être mangé   
Avant de croquer la vie par les deux bouts.      
 
Que cela avait valeur   
Belle et grande découpe    
Dans la neige qui efface   
Pour donner forme nouvelle   
En mondovision.      
 
Se souciant des livres qui parlent
À mon cœur à mon âme
Toutes voiles gonflées
J'ai suivi les traces 
D'un dimanche en famille.
 
Furtive   
Elle s'est précipitée sur moi   
Me perforant de son rai   
Pour accepter secousse heureuse   
Le plein emploi de l'écriture.      
 
Un vieux canapé   
Un nouveau né   
Le goutte à goutte du robinet   
Ce me semblait foudroyant   
Comme griffes acérées.      
 
Clôturer le moi pour exister   
L'intime advenant par excès   
Je devenais l'époux céleste   
Entrailles frémissantes   
À l'entrée du cloître.      
 
Elles sont là   
Les heures en prolongation   
Du silence où je me suis égaré   
Le carnet sous la main   
En flottaison douce sur l'absence.      
 
Cette nuit il y aura remue-méninges   
Pour que fraîche et élancée   
Sortir de sa coquille   
De douceur et de source et de feu   
Le parler des choses vraies.      
 
Et pour que la roue tourne     
Que la pierre brille au soleil   
Des mille micas précieux   
Précédons les temps à venir   
Soyons " la plus que vive ".      
 
1215

Un beau jour

Aux tours dressées   
Par de l'abîme
J'ai levé la voix

pour dire ce que disent
Les hommes de bonne foi
Les femmes du royaume
À contretemps des lois.

Tu seras belle
Et le réverbère sera beau
À se prendre comme bougie d'anniversaire
Des cloques sous les yeux
À la merci des gens heureux
Sur l'horizon bleu de Prusse
Chargé de cumulo-nimbus.

Tu seras beau
Mon coco d'amour
Toi l'éclat de prune
Sur le verre de la fenêtre
À écouter par la fissure
Le murmure occipital
Des petite tortues de l'esprit.

Et nous ferons de jolis cadeaux
Aux moineaux de la plaine
De quelques graines éparpillées
Sur le jeté blanc de blanc de la terre
Pour un lâcher-prise saturé
Des morts et doutes entassés
Sur le cairn humanoïde.

Et je leur tendrai la main
Aux humains
Juste pour que demain
Pouvoir exorciser les noires pensées
Clavicule brandie
À même le goutte à goutte programmé à l'envie
Sous le toit de l'abbaye.

Pour que faire avec rigueur
Le bien commun des terres nouvelles
Paraître de tendresse recouvertes
Femme de bonne maisonnée
Homme de ferveur appliqué
Laisser comme viatique
La merveille du jour, le jour même.


1214

Double face

Pitrerie   
Des rires  
Dans la corbeille des mariés.      
 
Assis sous la tonnelle   
À défaire le corsage   
Ardeur enivrante des lilas.      
 
Grande Roue de fer   
Débaroulant sur la pente   
Tels biclous vers la fontaine.      
 
Le prince a deux visages   
Et même celui d'une jeune femme   
Cachée dans le bruissant de l'air.      
 
Au sortir du passé   
Oreille crochue   
L'indestructible est trop fin pour brûler.      
 
Plaît-il   
Que la grâce de l'œuvre   
Réalise l'étendue du manque.      
 
Gelé depuis des siècles   
Mon cœur est en amour   
La levée d'une chute.      
   
J'ai regardé l'Autre à travers un feuillage   
Bien m'en a pris   
De soumettre l'illisible à l'encart d'un soupir.      
 
Au vide-plein d'excès de confiance   
S'associe comme gant retourné   
Le fragile de l'essentiel.      
 
Dans la plus grande clarté   
De pleurer est chose facile   
Douceur non aboutie.      
 
Se balancent par delà l'écho   
L'éloignement des choses dites   
La captation de l'éternel.      
 
L'enfant du clair-obscur   
A placé ses dents de lait sous l'oreiller   
Au matin deux vaches de plomb.      
 
Les images à la queue leu-leu   
Sont entrées en gare   
Cendres et escarbilles portées par le vent.      
 
Mourir ou mûrir   
Place au différentiel des opportunités   
Les anges de la partie.      
 
Que la lumière vienne   
Tremper sa plume dans l'encre violette   
Equilibriste du temps venu.      
 
Des mots   
Des mots et des ratures   
Des  mots partout.      
 
Main levée entre le pouce et l'index   
Par le trou de la substance   
L'horribilis de la forme.      
 
Dans le cœur la bêche creuse   
À la voix au dessus de l'abîme   
La part absente des rêves.      
 
Parle petit rossignol   
Et me tiens le langage   
Agi et négocié de la pensée active.      
 
En retour d'un baiser noir   
Calligraphié comme un dessin   
Il faut que je te dise.      
 
Que le baiser blanc des âmes   
Rideau baissé   
Crée notes relevées sur le présent du temps.      
 
( détail d'une œuvre de Jean-Claude Guerrero )
 
1213

Luceram

À bord   
À bâbord à tribord je reconnais   
Que pour honorer cette histoire   
Avoir fait la paix avec le passé   
Les souvenirs à fond de cale   
Je ne rumine plus.      
 
Renoncer c'est se taire   
Sans que le pouvoir s'accroche   
En défaisant les manières habituelles de nous lier   
En progressant car nous n'avons pas le choix   
Sans nous attacher à une joie   
En bonheur et en tranquillité.      
 
Embrasser le plein ciel   
Hors les ailes de l'Inca   
Permet au soleil levant   
D'effacer les pensées   
En honorant les causes    
Qui les ont précédées.      
 
Une nouvelle histoire apparaît   
Quand calme et serein   
Sans soucis ni regret   
Sans attente ni jugement   
Ouvrir la porte du consentement   
À ce qui est.      
 
En imagination   
Sans être maître de ce qui arrive   
Les gens et les situations   
De vive voix   
Au circonstanciel de la vie   
Place aux modifications.      
 
Écrire au présent   
C'est déborder dans l'avenir   
Au premier jet il importe de tenir le cap   
Sans se départir des embellissements   
Ni des transformations   
Au cours de l'avancée.      
 
Les émotions sont nos émotions   
Et nous nous demandons à quel endroit du corps elles s'adressent   
Événements précis à l'appui   
En inspirant de la lumière blanche   
Pour ensuite l'envoyer au "là-du-corps-mon-être"   
À purifier.      
 
Les montagnes escarpées avec leurs bérets blancs   
Succèdent aux vallées verdoyantes   
Pour s'ouvrir aux énergies des éléments   
Terre, air, feu et eau   
Propices aux êtres vivants et aux plantes   
De la Nature, notre Source, notre Lumière, Luceram.      
 
Quelques instants suffisent   
Pour prononcer ces mots   
Au travers d'un vitrail illuminé   
Mousse douce et petites pierres posées   
Dans le silence qui nous sied   
Nous les messagers de Paix.      
 
 
1212

Ma mie

Avec elle   
J'ai gagné l'autre bord.      
 
De la traversée du désert   
J'ai banni le désuet.      
 
Sans encouragement   
J'aurai cessé de me connaître un peu.      
 
C'est par le haut-chant de la libération   
Que j'ai traduit l'impérieux appel   
Des arrivées et des départs   
Dans cette gare aux affinités feintes.      
 
J'ai refait ma vie   
Avec elle   
Selon les anciennes coutumes   
Par le mariage en restant fidèle.      
 
Le dialogue m'a rendu fécond   
Comme de reprendre langue   
Dans un processus de métamorphose   
Au pays des roses mosaïques.     
 
Renommer le matin du monde   
À neuf en complétude   
De la perception et de l'imaginaire   
M'a permis   
Vent debout jambes à mon cou   
De rouler à tombeau ouvert   
Vers le judicieux nominatif   
Afin d'aborder en tenue élégante   
Les formes et musiques   
De l'essence des choses.      
 
En surplomb   
La vision devient synthétique   
Lunettes de vue non admises   
Juste quelques rondelles de plastique fumé   
Pour me garer du soleil    
Cette luminescence absolue   
Faisant la fière sur la neige   
Aux abords infrangibles   
Où tout est blanc.      
 
La vie vécue est la vraie vie   
Ramassons par l'écriture   
Le rétrospectif et le globalisant   
De ce qui fait sang et sens   
Dans le courage des sources   
De bienfaisance et d'ombre opalescente   
À portée de la flamme des rencontres.      
 
J'ai joué aux dés    
Avec le jour et la nuit   
J'ai marié la linéarité terrestre du temps et de l'espace   
Avec l'invisible mouvement de circularité   
Sur la marelle d'une cour d'école   
Incarnant la voie du saut calculé.      
 
Il n'est pas de douceur sans douleur   
Aussi sur les épaules de ma mie   
Ai-je mis le coussinet de l'esprit   
Piste d'envol de l'aigle   
Catapulté bruyamment   
Ailes brassant l'air    
Dans l'intime du cœur   
Où fendre l'armure de la peur   
En possibilité de dépassement   
Vers le réseau organique   
Aux multiples combinaisons   
Pour forçant dans un long glatissement   
Les souterrains de la montagne   
Aller jusqu'aux confins de l'Univers.     
 
Il n'est de vie qui demeure   
Que l'accord mélodieux d'une assise   
En attente du nuage.      
 
 
1211
 

Petits instants de rien

Lave fluide   
Après morsure   
De l'ours mécanique.      
 
Adjonction caramelle   
Des rétractations de la colombe   
En bordure de sphère.      
 
Diadème démoniaque   
De l'inconstance défiée   
Au sortir de sa boite.      
 
Prise de risque   
Devant crevasse béante   
Brise d'éternité.      
 
Fréquentations étranges   
De la prophétie et du courage 
inouïes.      
 
Mystérieuse  estampille   
En convulsion   
Des excavations de l'âme.      
 
Plaque de fonte   
Posée sur le trou   
Rend le pavé glissant.      
 
Parure gémissante   
De l'occupée des lieux   
Plaine ô ma plaine.      
 
Se plaindre   
Rend le vide plein   
Châtiment intégral.      
 
À se coucher dans la paille   
Rend le paillou fragile   
Et la fourche agile.      
 
Oiseau aux plumes légères   
Jadis   
Bardé d'écailles abyssales.      
 
Fils de l'homme et de la femme   
Je mesure à chaque instant   
L'innocuité de l'événement.      
 
Disparaître   
Convoque la bienséance   
Pour un dernier bain de sang.      
 
De son manteau   
Sortaient les mots   
D'une hypothétique parodie.      
 
Et je connais je connais   
Jusqu'au dérèglement des sens   
Le porter haut de la folle enfance.        
 
Vouloir n'est pas pouvoir   
Mais à dialogue constant   
La littérature turelure.      
 
À magnifier le réel   
Les arbres se courbent   
Devant le vent du désert.      
 
En bloc et à distance   
Il faut toujours que l'ironie   
Propose son sourire.      
 
Imiter et vous serez pardonné   
Par les foutras de la chose entendue   
Cette subversion à tous les rayons.      
 
Les opinions   
Des trognons de rien   
Que le rien accapare.      
 
 
1210

La présence à ce qui s'advient