Le champ des souvenirs

J'ai traversé le champ des souvenirs   
des mécréances et des soumissions   
pour lumière atténuée   
être sans parents et sans enfants  
en ces temps de décalcomanie.      
 
Les mots craquent   
dans le feu à la veillée   
faisant jaillir douleurs et joies   
sans que l'octroi regimbe   
et laisse franchir l'enceinte.      
 
Les pierres sertissent la pâture   
de leurs masses de silence   
lichens colorés   
s'appliquant à donner au coudert   
sa part du jour qui tombe.      
 
Pluies acides 
sur forêts d'élevage 
font déplier la pèlerine et prendre bâton   
pour les gens du pays  
que le diton du sans-souci décrète double.   
 
Les instants qui précèdent   
et suivent le grand départ   
sont d'invisibles moments d'ouverture   
où saluer la Terre et le Ciel   
permet de fusionner les deux.        
 
Puce collée à l'oreille   
du chien mon maître absolu   
avons brisé du tranchant de la main 
l'ode de l'intériorité     
sous les étoiles du langage.      
 
 
876

פעדער דאָ פעדער דאָרט

Plume par ci plume par là   
j'ai fait de mon mieux   
pour transmettre à ma mère   
entre conscience et inconscience   
la note et la dîme du mot de trop.     
 
Sommes arrivés devant la chaumière   
sous le linteau des obligations   
hautes herbes mouillées foulées   
apportant frisson aux chevilles   
et chants à gogo pour belles envolées.      
 
D'où que l'on soit   
sans libelle ni pourvoi   
nous devons marcher par tous les temps    
terre fertile afférente   
propageant le savoir.      
 
S'entretenir en bout de champ   
imprégné de justificatifs   
il suffit d'un hasard de circonstance   
pour que trousse-chemise sans considération   
être récipiendaire de récits fabuleux.      
 
Passer le pont   
cercler de papier doré les Géants de la fête   
battre le pavé jusqu'à plus soif   
être le Tout En Un de la Vie Une   
permet le badinage pour la Recluse.      
  
 
875
 

דא בין איך

דא בין איך
אין דער געסל פון מאַסלינע ביימער
צו מאַראַדן די כאַניסאַקאַלז
בעסאָד אין ליבע
זשאַבע מיט גרין פריל.   
 
דער בארד אנטפלעקט
װי װארעמע בלוט פון כלים
פון די טומלדיק לויף
פון דעם בענקשאַפט
אָפּדרוק פון צערטלעכקייַט.      
 
און נויט   
בײם לאנטערן געפאלן אויפן ים
איך פאָרשלאָגן די בוי
פון די ליד וואָס איך ליבע
שטיין צו לייגן מיין קאָפּ.      
 
איך גלייב אין די געשרייען פון דעם האמיסיקעלע
מיט אַ בלוי-פּאַסטעל ריטואַל
די ליד פון די סיילערז פון נעוופאָונדלאַנד
גיין אַראָפּ די לוקע
אָרעמס פול מיט דאַר דאָרש.      
 
פיל נידעריקער
איך געדאַנק איך געזען
אויף די טערראַקאָטטאַ שיסל
טויט און לעבן
פרעסן איינער דעם אנדערן.      
 
ווי פֿאַר מיין קינדער
אַז צייַט דיסטריביוץ
בשלום
צו די וואָלקן אָן צווייפליטי
איך צעריסן קאָנטראַקט און צוזאָג.      
 
דער װינט װעט מיך אװעקנעמען
אין מעלאַנכאָליע
האַנט איבער מויל
ווארטן פֿאַר די שאָטן פון די סטעליע
ווערן שפיגלט אין דעם אָטעם פון דער חיה.      
 
די רויאַל אַהאַן פון די זעלנער פון דיסדיין
אָפּגעשפּיגלט אין פֿאַלש
די גשמיות אַקסל פון די בונטאַר
סוף פון די יאָרהונדערט רעדן
צו דעם ווינט געגעבן פון די גראָז.      
 
מייַן זיס נאַטור
מיט אײביקע בלעטער
קומען צוריק אין די אָוונט
דו ביסט געגאנגען אזוי נאנט צו מיר
אז דער װאגן האט זיך באװעגט.      
 
ויספאָרשן די נעפּל
מיט פול שאַפּעס
מיין נשמה וואלט אויפגעהויבן
אויף די פראָנט פון די זומער פּאַסטשערז
ווי איין וועג.      
 
 
874
 

מיט ברידערלעך כוואליעס

Auprès des ondes fraternelles  
aux rides du retour en grâce   
j'épelle ton nom   
sur le billot du Sans-Souci.      
 
Aux cellules grises de l'Esprit   
à la verticalité d'un point-virgule   
je prends et mène grand train   
sur le foirail des retrouvailles.      
 
Aux gouttes de pluie rousses   
sur la toile du toit gercé   
devant la foule rassemblée   
je glisse le papier dans les fentes du mur.      
 
A la plume d'aigle   
que le berger ramasse près de la source   
à l'itinérance sans fin   
je joins les mains de la prière.      
 
Aux philtres de l'ignorance   
j'aligne les étoiles   
pour d'un coup d'épaule   
manifester la solennité.      
 
Perplexité refoulée dans l'impasse   
à la portée des voyageurs   
j'organise le raout   
de la montée aux alpages.      
 
 
 
873


Frisottis de fougères sèches

Frisottis de fougères sèches   
plucheuses tel gruau   
le bol recelait les restes   
d'un passé égaré   
du côté de la montagne   
à filtrer la lumière   
des peupliers de la rivière.      
 
Le vide tel une valse lente   
disposait la table   
par quelques mots pauvrets   
écornant de leur quincaille   
les pages blanches du cahier.      
 
Du bout de la cane   
le plan fût tracé   
sur la berge sableuse du Bès   
écorniflage à mesure de l'oubli   
des passions mises au rebus   
de calques dérobés aux entrailles du souvenir.      
 
Glissendo des murs d'argile   
en capacité d'offrir   
le pain et le vin    
dans l'allée des graviers    
en débours de tant et tant d'élans   
recroquevillés sous la saulée.      
 
 
872

Millefeuille

Millefeuille  
distingué par le guetteur du phare
douce offrandes
que le vent glanant dépose
au sortir de la bourrasque
alors que la nuit rebique
sous son manteau noir
quelque pan de chemise
disposé hâtivement
sur le muscle tétanisé.

Feuilles de toutes pensées
feuilles arrondies
feuilles écornées
feuilles encalminées
dans le labyrinthe

à la portée du minotaure
qu'Ariane proposa
un jour de belle humeur
à l'homme provisoire
de fuir les ors parentaux.

À la fin de l'œuvre

on retourne hors des choses
pour librement jouir des nuées et des brumes
quand survient
comme neige au soleil
le miroir des jours fertiles
passés à dégeler la trappe parnassienne
des bulbes déposés

arc-en-ciel
dans l'aube frémissante de la joie éprouvée.


871




Marchant je le suis

Marchant je le suis   
à suivre ce que je suis vraiment   
et que jamais je ne saurai qui il est   
ce moi des aventures épisodiques   
ce germe de blé   
unique   
mais resurgissant chaque année   
à hennir sans haïr   
annus horribilis   
cette portée des petits hommes   
cette portée des petites femmes   
offrant sur les cailloux du chemin blanc   
le son des ses pas   
versatiles sans coudée franche   
mais propre sur soi   
à évaluer le parcours   
le parcours imaginaire   
des monstruosités du quant-à-soi   
à épeler éternellement   
tel le roulement du tonnerre une nuit en Lozère   
les bribes de vie levées en enfance   
mais que l'obligé des adaptations fait vaciller   
alors qu'il y aura toujours   
à ne pas s'arrêter.      
 
 
870