À Frédérique Lemarchand

Tendrement   
au creux de mon épaule   
je t'accueille femme de lumière   
et t'accompagne dans cette ascension   
de cœur à cœur   
dans l'accomplissement de ton œuvre   
toi   
à l'état d'enfance spirituelle du vieux sage   
tu te prépares à ta naissance   
en empruntant le chemin des estives   
délaissant l'enveloppe   
pour que le noyau enjoigne la terre d'en haut.      
 
La Parole se répand   
quand initiation achevée   
elle ne sait pas elle-même ce dont elle va éclore  
ni au service de qui elle émet.      
 
Tu es parvenue   
icône 
véritable véronique   
et ta face enfouie dans le lin   
peut monter jusqu'en surface   
pour reconnaître chez tout un chacun   
la possibilité de faire Un.       
 
896

O lenei pa maa mago

Élevé à la va comme je te pousse   
contre les vents d'ouest   
nous refusâmes d'admettre cette prégnance   
et mal nous en pris.      
 
Ce mur de pierres sèches   
aux insectes fouisseurs destiné   
ne retenait de sa fonction première   
que le son des feuilles sèches   
le frictionnant avec délicatesse   
par nuit de pleine lune      
devant le cercle des poètes assemblés   
voix levées vers les nuages rapides   
pour que tombent les poussières d'étoiles   
sur la margelle des certitudes
raclant par le menu
quelques scories advenues.       
 
Mur aux mûres noires   
mur murmurant ton nom   
je m'épris de toi   
sur la plaque de marbre blond   
apposée en reflet de ton élévation   
aux mains jointes de l'Esprit   
baguenaudant au vol à voile   
des désirs de l'instant.           
 
 
895

oute alofa ia oe

Mai le atigi i le atigi
ua na o se rane ata
pe a mavae atu fetu
o se taeao o le galue atoatoa o le tagata lava ia
ma matafaga agalelei
o le tatou paaga i le aso
fa'alelei malu pupuni
ia atagia le loka
faasaga i le tino silika
tamaiti ulavavale
o le vai maualuga o le malaia tele
pe a nofo i le sua o le Maï
le sese faavae
o le tootoo e faasaga i sasae
faatalitali mo le taunuu
musika mosaic
fa'aoso ma fa'aulu
e tutusa mamao mai poloaiga ma faaletonu
o na fusiga alofa
i luga o le fa'amoemoega fa'aleagaga
sa i ai
tauau i le tauau
fa'atasi ma le sau'ai leo guttural
teuga i ta'e fa'aami'i
ma se mata mulimuli
i lalo o le atigi o ao
e taape se manava
pei o le kiona i le la
taimi e tuu i lalo
o le muai tofia
talotalo logo ma mea teuteu
i le feagai ai ma tagata lulu saito i Aso Sa
piko ma suo talafeagai
i luma o le lava sasaa
i le malutaga o le alofa
tuuina atu le ad hominem   
i le fesoasoani i le ala lilo
fa'aloloto ma fa'a'au'au
folau uma i fafo
e mafaufau i le faatumuina
avanoa gaogao o agavaivai
a o i ai i le lalolagi
noanoatia i le tuufau
le auvae o uili
fa'atupuina le tagitagi
tauemuga ma isi fati
e soloiesea ai le faanoanoa
ma le tua o le lima
ma saunia le matafaga mo taulaga
i luma o le galulolo o le amataga
vave e tafi le alititai o le sami
aua i totonu o le mandorla
fautua loloto i le vanimonimo
e le'i fa'alogoina le tupuaga   
i se leo itiiti lava e leai se mea
o ai e ta'u atu ia te oe i se apaau :   
" Oute fiafia iaoe ".      
 
 
894

Le Masina Lemu

File la lune lente   
en son tournoiement   
de mer éclose   
aux effluves ensemencées   
de papillons   
que l'on gomme   
sur la joue de l'enfant   
gommettes festives   
à la nuit descendante   
aux abysses immenses   
dans le noir   
où nous atteindre   
nous les mariniers    
vestige des amples chaluts   
prompts à glacer   
de cinglantes fureurs   
l'émission des laves   
aux vibrations bruyantes   
pluie de lapilli
tombant un à un   
sur le tambour   
des yeux immenses   
rabattus sous la paupière   
de l'harmonie   
enfin recueillie   
seule et essentielle   
pour le retour du réel.      
 
 
893

Le jour qui vient

Me suis senti tout simple ce matin    
avec ces objets raisonnables   
posés sur la table.      
 
J'ai pincé la corde de la folie   
pour que dansent les filles et fils du Diable   
enclins à l'usure naturelle.      
 
M'en suis pris alors une   
sur la tronche rationnelle   
provoquant commotion et confusion.      
 
Ai-je bien pris la boussole   
pour ce vol de nuit   
où perdre les signes de l'Au-delà.      
 
De balises point   
juste quelques feux aux quatre coins   
pour éviter les autoroutes de la foi.      
 
Malgré les turbulences de la jalousie   
le moteur a continué de tourner   
en bout de piste.      
 
Pour planté dans le champ aux voix éternelles   
allumer le GPS intérieur   
déesse carénée du jour qui vient.      
 
 
892

Se amataga fou

Partir   
entre les rails du pont   
par dessus les eaux profondes.      
 
Courir dans les rues grises   
et s'asseoir sur un banc   
à regarder les enfants.      
 
Tom Waits en catimini   
se rapprochant de l'esprit   
en libre circulation.      
 
Fermer le magasin   
rajuster le chapeau   
et les mains dans les poches presser le pas.      
 
Hommes de tous les temps   
paroles envolées   
pour que les choses sérieuses commencent.      
 
Silhouette déhanchée   
sur les galets de la rogne   
atteler la charrette des relations.      
 
Et avancer   
sans la moindre gêne   
vers la grille de départ d'un nouveau parcours.      
 
 
891


Le Ita

M'en a-t-on dit de cette époque   
d'où famille éclatée   
les blessures saignent encore.    
 
I le Furee
e iai maa lapopoa
fa'atasi ma otaota.    
 
A timu
fa'aputu vai i le pito i lalo o le malifa
latalata i le paka mamoe.   
 
O le ata o le tuaa
ua leva ona alu ese
ina ua alu le Matai i Pale ma le lelei.      
 
Mo se taimi na talia ai e lou tinamatua le luitau
e fai le faatoaga
faatasi ai ma Marius le failautusi ma Jeanny.      
 
O tamaiti e nonofo mau
i le aoga a le Au Uso
o se taumalulu e faavavau.      
 
Na mate le tamai povi anapo
nutimomoia e Pale
lenei povi Aubrac e leai se susu.      
 
Na aveese e Tama le teugatupe
e le toe aumaia e ia se tala fou
ma ou te le iloa po o fea e tanu ai o ia.      
 
Je pleure parfois   
dans mon lit sous la soupente   
et pense à mes sabots que je n'ai pas décrottés.      
 
Je serai là plus tard   
à écrire ce qui s'est passé   
tôt le matin en écoutant l'horloge à balancier.      
 
O le a pei o le taimi muamua ma mulimuli ane
i itula mauoa o se tala fagogo
foliga mai o se mala.      
 
Tracer la route des airs   
comme les oiseaux migrateurs   
ramène à la maison.      
 
I lalo teisi atu i Féniers
e sili atu tausoga
o lo‘o i ai le suāu‘u mo le lamepa
ma le areto i le taeao
pe a tatagi logo
i le faatafunaga o le abbey
si'omia i se pa
ina ia o nai turisi ua pasia
aua le tago i maa i le ulu.      
 
Au petit jour les oiseaux chantent   
pour que vite aller aux champs   
recueillir le silence.      
 
 
890

uo o le ala

Enfoui sous les feuilles d'automne   
se soulevant au vent venant  
irisé d'une lumière diaprée   
quand ciel et nuages se la jouent   
l'enfant du paradis   
surveille en dansant   
la marelle circassienne.      
 
Enfoui sous les feuilles d'automne   
un arum      
enveloppé d'un mucilage frais          
que des mains de caoutchouc   
révèlent par touches successives   
telles caresses à remonter le temps     
se pavane à merci du risque.          
 
Enfouie sous les feuilles d'automne   
la brume intronisait le mystère   
formant cocon   
d'où sortaient à mesure du Souffle  
mille flammèches   
consumant sur le tard   
la parole et l'oubli de l'Ami.      
 
Enfoui sous les feuilles d'automne   
affranchi de la gravité   
le temps presse au mur de l'Invisible   
ouvrant sur l'Infini   
alors que frappe à la porte   
l'Homme nouveau   
silhouette de lumière ombrée de cendres odorantes.      
 
 
889

La sourde oreille

Au démêlé des mèches blondes  
la voix sourdille   
tel papillon d'or.      
 
L'archet grimpe aux cintres   
des voilages robes de nuit   
qu'accompagne le frisson de la page que l'on tourne.      
 
À l'enfant du mystère révolu   
à l'étang aux douces ridules   
ces marques d'affection.       
 
Je veux enfin dire la vérité   
des femmes aux amples tabliers   
dont la main partage la clé du jour.      
 
Il y eut captation des élans   
dans la fissure d'un ciel de grâce   
augurant l'incartade majeure.      
 
La plus chuintée des adresses   
ne calmera pas le chant   
des innocences bafouées.      
 
Que faire    
en ces temps de déclivité de l'âme   
que de tordre l'horizon.      
 
De la lumière du sang des justes   
monte la plainte bleutée   
de la souffrance.      
 
Au froid de l'autre rive   
s'amoncellent les contacts   
du visible et de l'invisible   
aigle à deux têtes aux portes du Royaume   
montrant serres blanches   
en partance   
sans que la destination soit établie.      
 
 
888
 


Ma petite ma mignonnette

Ma petite ma mignonnette   
te conter ce qui m'arrive   
dans cette vie   
où poussant la poussette des enfants perdus   
j'entrevis les lourdeurs qui m'enserraient.      
 
A chaque secousse   
la vibration était plus forte   
pour que le double que je suis   
se dessaisisse des moulures de l'esprit   
bordurant les terres inconnues.      
 
Dans l'herbe haute de l'automne   
avant les froids qui gèleront les cynorhodons   
mes pas froissaient la prairie des amours   
où parachever cette quête ajourée d'imperfections   
sans que les feuilles du frêne frémissent.      
 
Les cloches sonnaient   
les pas se pressaient sous le porche   
ce lieu des épreuves attendues   
où désapprendre la routine du mal   
et pénétrer la zone du tout droit de l'être profond.      
 
Les collines seront ombrées de vert mature   
le ciel sera rose   
au soir du  destin nos corps chancelleront  
en percevant sur la table des orientations   
les huttes côtières de notre enfance.     
 
Je poserai mes bagages
et ferai un grand feu
de mes impuretés mensonges et égoïsmes
pour que l'embryon nouveau
tapi en lisière du bois
paraphe le départ du poète
puis se lève sur le chemin du grandir de soi
pieds nus et en silence
comme dans la chanson
où sortir de l'horizon
mène à joindre les cœurs.
 
Ma petite ma mignonnette
tu vois
une grande tâche nous attend
dans la joie de tous les instants
en contemplation du monde à venir.
 
 
 
887