Écrire comme si on disparaissait

 Écrire comme si on disparaissait
 en cette usure
 pierre à pierre
 où construire l'impact de la brûlure
 du regard sur les mots morts .

 Accumulation du verbiage
 sans choquer les contingences .

 Indifférence sans pli et sans couture
 inondant de lumière
 ce que l'autre offre ,
 ce que notre peau de chair
 donne en pâture à notre peau d'ombre .

 Menaces ,
 étincelles d'entre boue et ivresse ;
 se faire tremblement
 en totale allégeance à l'amitié,
 sans abondance ni oubli ,
 taunuu i le isi itu
 de joie et de tristesse mêlés
 sur la jointure obsidionale
 de ce qui sursoit ,
 vers le résultat précieux
 où vanités exclues
 se fracasser sur le corps de l'écriture .


 189 

énigme du grand silence

 Énigme du Grand Silence
en posture aléatoire quantique
résolument notre ,
en cette possibilité de convoquer
l'infiniment actuel ,
l'infiniment partout ,
l'infiniment non existant ,
en soutien du respect dû à cette Nature
si libre ,
si fragile ,
si monstrueusement violée ,
par l'oeuvre du serpent biblique
apte en son rôle malin
de faire éclater les asymétries
à des fins de destruction .

Il est des nuits
où se parant des flammèches d'un arbre de rencontre
pourfendre les nuages de l'incohérence
avec l'épée de la parfaite compréhension
et effectuer
aux confins de l'intelligence universelle
les amples moissons de l'émerveillement .


188

Une lettre juste une lettre

      Une lettre, une croix sur une dalle blanche ;
on se lève aussi pour de rien.

La bibliothèque, le soleil derrière l'églantier ;
on part en voyage pour de bon.

La vertèbre, la bouche et puis le berceau ;
on est bas sur cette terre, bien plus bas que terre.

La pluie, l'enfant contre le mur ;
on jure que l'on ne se fera pas prendre.

Ta peau, ton odeur, le calme de ton sourire ;
on se croirait au bord d'un étang sous les tamaris.

Un missel, une bille dans un coquillage ;
on est bien plus que ce que l'on appelle vivre.

Un rideau, un chêne pour la gaieté ;
on garde le souvenir d'un "je ne sais quoi".

La page blanche, la rose et la mort ;
on est si nombreux à s'y faire prendre.

La marguerite, l'herbe verte pour ce merle ;
on a besoin de tels instants pour résumer nos vies.

La chambre, les larmes sur fond de neige ;
On se dit tout, vraiment tout, chacun d'un côté de la vitre.

Un signe dans la braise, une femme ;
On se réduit silencieusement à l'essentiel.

Des copeaux dans un mouchoir, un homme ;
On glane ce qui jaillit sur le tard.

Au travers des nuages, l'apparition d'un enfant ;
On est tout et puis pas grand chose pour chaque chose.


187

Après la déchirure

 De plus, ils sont passés
 sans omettre les vraies valeurs.

 Ils ont cherché, ils ont trouvé
 la semence du semblable.

 N'ayez crainte du récit en sa simplicité,
 soyez de mèche avec l'indicible.

 En face du trésor
 ils se hâtent et lui crient leurs attentes.

 La trame se déferait
 sans préparation, sans repentance.

 Au repas, des chants nouveaux
 le monde nous appartenant.

 Une longue histoire d'alliance
 entre le fonds et la forme.

 Les superstitions n'ont guère de substance
 sans le dégoût de la connaissance

 Le deuil, la tristesse, l'oubli 
 un champ dévasté par l'inondation.

 Dire faussement du mal de l'autre
 puis s'en aller à reculons.

 C'est simple, c'est clair, c'est concret,
 les vrais pâturages de ton cœur.

 Les coulures de goudron
 sont les pleurs des tempêtes passées.

 Ma main, d'un reflux acide
 jamais ne jugera.

 En conséquence
 toute réminiscence est oeuvre destructrice.

 Les sacs de cendres se sont ouverts
 à bon port.

 Ta voix s'est fait entendre
 voix miroir de mon visage.

 Ta voix planait sur les eaux,
 un don à recueillir.

 Ta voix,
 porte-greffe de la plante fragile.

 Ma voix, mon ange,
 derrière les friselis de ton rire.

 Si la mort creuse le champ de la désolation
 elle ouvre en même temps celui de la communion .

 Communion des âmes 
 aimantes et aimantantes.


 186 

le polo o miti

        polo o miti
lotu lilo
feilafi
tipi ese
mimilo .

Foucault's pendulum
i luga o ulu o e faamaoni
faapaleina i le laurel
ma ave le cistus.

afā ikebana
moli i le pito o u'amea u'amea
le pa'ō o le faapotopotoga
pese tioata
feiloaiga i le vasa
o le tafe o galu e tete'e ai le pefu
tuuina atu o oe lava
tasi le mamafa mulimuli
agaga tu'ugamau
i lalo o fa'amau fa'amau
i nei taimi o le alofa
ma le faitau afe o iniseti
tula'i mai fatafata o le galo
i le Olimipeka a le Tino Talavou
iloa le auala e fai ai lo latou fetuutuunai
i e saili mea lilo .

lo'u agaga e faavavau
o lea ua uma ona sauni
mai le tupuaga .


185

ma taia apaau laiti

 A petits coups d'ailes   
parfois se reposant sur une queue fourchue
les mufles s'accordaient.

Campés sur leurs sabots
le corps lourd
ils bombaient le torse.

Salis par les mucus échangés
leurs gueules nourrissaient
de profonds rictus.

Les ailes brassaient la lumière
pour quelques confusions passagères
faisant s'envoler la poussière des anges.

La larve et le taurillon
faisaient foi de vie
leur suint ostensiblement odorant.

Les yeux injectés de sang
ricanaient d'avidité
pattes et sabots cliquetant une bourrée.

" Viens l'animal
et me dit à l'oreille
que le temps est venu.

Qu'étendre ces conflits
au monde des entrants
permettrait de signer l'absence d'origines.

Que d'un saut de puce à un autre saut de puce
la montée en puissance de la connaissance
ferait tâche de sang sur la patène. "

N'était cette danse à la vie à la mort
serions en élévation
nous
les étoiles de la mélodie à venir.


184

écoute écoute de l’un l’autre

      De l'un l'autre
écoute écoute
oreille de l'écho .

D'entre la circonvolution et l'échappée
le son grave des trompes scandinaves
lève la brume .

En marche ,
les lumières géométriques
caressent le grain de la toile .

Les écoutilles ensablées
à fleur d'eau
laissent passer les naufragés .

Par la fenêtre
un soleil aiguisé
annonce le jour qui point ;
Libres montagnes couvertes de neige
les mains se tendent ;
petite flamme au fond des cœurs .

Avancée sous les fresques de la nef
vers le saint des saints ;
les cloches sonnent à la volée .


183
(Peinture d'Elianthe Dautais)

Puisque vous ne me causez plus de chagrin

 Puisque vous ne me causez plus de chagrin et que le souvenir que j’ai de vous se dissout dans l’épreuve que je traverse je vous serais gré de reconnaître mes nouvelles dispositions transcrites sur ce mur propice au soulagement de mes blessures.

Le doigt levé contre la coupe framboisière de l’espérance est le pôle de la délicatesse à venir. Je me suis avancé et cette course m’a mené au terme de l’ignorance pour maintenant, les reins ceints de la force, scruter avec mes semblables, à mesure de la course de l’univers, le silence de la terre qui tremble.

Au gré des catastrophes causant tant de sécheresse et d’inondation je me suis frayé un passage dans les forêts dévastées où sans défaillir j’ai inscrit la verdeur de mon chemin sous les auspices de la flamme de compassion couronnée des mille bougies de la contemplation.

Dorénavant je ne déchirerais plus les voiles de l’union qui me lient à Son règneet me levant tôt je parsèmerais de fleurs et de poésie les plaies béantes de la souffrance pour accéder à cette invitation de briser le cadre de la vie ordinaire et découvrir derrière la sainte icône de l’attention devenue sagesse infinie le tendre amour si craquant de Ton nom irradiant sous la morsure aux lèvres blanches de la résurrection.

Il est des coupes à petits pois blancs sur fond de sang que la générosité ne peut atteindre. Aussi se lever et tendre l’aube devant le soleil de Ta grandeur ne peut que soutenir cet inflexible effort à naître par delà nos activités décérébrées qui quotidiennement nous poussent à nier notre vraie nature et à manquer la cible.

Embrasé par une force extrême j’ai pénétré le couloir de notre rencontre. La raison s’en était allée en toute hâte pour remplacer les gémissements de l’extrême faiblesse de l’homme en tunique de peau par le cri de la chair grillée de l’anéantissement. Pe 'a, j’ai su replier mes ailes pour entrer par effraction dans le saint des saints, vaste salle consulaire consacrée au retour de l’enfant prodigue.

J’ignore si l’édifice ne sera pas ébranlé et si nous pourrons retenir nos larmes lors de l’ultime séance au goût de vie éternelle lorsqu’à la tombée du jour nous caresserons enfin la douce main de la mise en abîme, celle qui tendrement mais fermement, et de toute éternité, nous convoquera à finaliser notre œuvre.

Une fois libre je pourrai alors consentir au contact mystérieux avec les êtres en tunique blanche venus de la foule bruyante que la joie communicative fait exulter devant la perspective d’accorder les précieuses faveurs de notre cœur enfin arrimé à l’élévation de l’âme au vide des espaces infinis.

Ne pleure pas. Lève ton regard vers les hautes frondaisons. Sois de mèche avec le temps qu’il fait. N’ignore pas la terre dont tu es issu. Ferme la porte après moi. Continue de marcher. Regarde. Il se pourrai que tu rencontres l’Autre à qui passer le témoin à la croisée des chemins par hasard dans le sourire du sans chagrin.

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