jody le faon

   Jody le faon   
trois petits tours et puis s'en vont
les notes claires
esprit du piano de Glenn Gould
en rond sur la portée de terre battue
parmi les flaques d'eau d'après l'orage
cette fraîcheur qui vous gagne
au sortir de la grange
à sauter à pieds joints
point de romance
juste le sourire jusqu'aux oreilles.

Attendre que les chiens montrent les crocs
et jappent en désordre
sous l'antienne vespérale
à coudre la pièce de tissus
une nappe
un drap
pour recouvrir la planche sur ses tréteaux
adjoindre les chaises dépareillées
aller dans le pradou
cueillir les fleurs pour la tablée.

A tout âge
ménage fait
rangeons les balais
soyons les Parfaits
châtelains en habits rapiécés
sous la poterne
assister la levée du jour
par les champs
de coquelicots et de bleuets mêlés.

Remisons la communauté
aux patères du passé
soyons les obligés de la lumière.


519

Passage où tout passe

 De sa main   
 haute placée   
 à la croisée des arbres   
 les fils de la vierge   
 menaient grand train   
 et grand silencee   
 de gouttelettes de rosée   
 et de lumière   
 au chant du coq   
 que le torrent accompagnait   
 de son charroi    
 d'eau et de galets mêlés.    
  
 Ouvrir la fenêtre   
 pour que matin survienne   
 mon âme   
 messagère appelée   
 et maintenant si proche    
 sous la parure des brumes   
 dais de vives couleurs levées   
 où claquent les oriflammes   
 du grand rassemblement   
 passage où tout passe   
 et nous dépasse   
 au grandir du jour qui point.    

  
  520

jano le costaud

   JANO le costaud   
renversa la table
le bougre en son irascibilité
et la bougie qui s'y trouvait
et la banalité de la soirée
partirent les invités
chancelants en ordre dispersé
le chapeau à la main.

JANO l'enfant
posé sur une chaise restée debout
les yeux accrochés au lustre
deux gros yeux pairs
pour une pipette de verre
que le chat négligemment
tentait de capter
tel le mickey des fêtes foraines
JANO pestait.

Fallait que le jour vienne
compatissant
démesurément éclatant
pour qu'en chaque recoin du palais
jaillisse richesse inoculée
une lumière aveuglante
à faire se courber les dendrites
hors la source des cellules.


518

o le mitiina o upu suamalie

   Le clapot des mots doux   
ensemencent la main des simples.
La laine des moutons
contre les picots du barbelé
signe le vent.
D'une rêverie l'autre
s'enchevêtrent les souvenirs
au gré du torrent.
Il n'est de trêve
passé le gué
que les mâchoires de l'oubli.

Mon ami le néant
a rompu les amarres
et vogue trotte menu
parmi les poussières d'étoiles
que nous ramassons
le soir
lorsque nuages et lune
retournent au combat.

Il n'est d'avenir
qu'au service du monde
lorsque tombe la pluie
pour qu'arc-en-ciel des désirs
être fidèle à son âme.


517

E feula e le la ia paluni

 E feula e le la ia paluni   
 le filemu   
 laau le gaioi   
 o uo a le lona lua e sasaina le fola   
 e lei atoatoa le po   
 miti e le mafai ona ou mulimuli ai   
 i le vasega e tatau ona e faia fuainumera   
 savali ma le uila   
 ma faia ia lotogatasi   
 Sa ou teena se mea   
 sa ou taumafai lava   
 i le taimi lava na ou mafaufau ai    
 ae na ou leiloa   
 " toilalo i nuu i tua ".  
    
 E le o toe umi ae aliali mai uo   
 o le taeao nei o le aso maketi   
 ona a'e lea i Col de Gilly   
 i le aoauli i luga   
 ona alu ifo lea i le ta o le lua   
 e feiloai i le faletua o le tagata pueata   
 ma asiasi i le Queyras History Museum   
 Mulimuli ane toe foi i luma o le TV mo le Tour de France.      

 E lalagaina e laau o le ausa le puao i le pito o le taumafanafana   
 e susulu ipu umukuka   
 i luma o le la ma'i   
 hamu le pusaaisa.   
   
 togi se maa i le vaitafe   
 o le a avea ma ta'ita'i muamua   
 i le afe pito o le aso.  
    
 Ua tuu le Laguiole i le va o le ata ma le malamalama   
 i luga o le ie laulau lanumoana i le potu malolo   
 e lamu e lago ni mea'ai   
 i luga o lauulu sinasina o o’u lima. 
     
 Ou te fa'amauina se togi   
 o le tuugalamepa o faamoemoega   
 i le gutu o le fusi saito   
 na tatau ona aveese   
 tui malo   
 i luga o le taavale toso   
 fa'afa'ato'aga ma lea faga   
 aga'i i le paillou o le seleselega tele.   

   
  516

faasea i aafiaga elea

   Tausaga matua  
o ai e ona manatuaga
e musuia ai i tatou
faatinoga anoa
fa'aaloalo lava,
ata fa'aalia
ma se malosi taua
o le tino ma le agaga
fa'aituau.

su'i faaipoipoga
olo pupuni
tumu i mea masani
i le taufaamatau
e aunoa ma se lamatiaga moni
ona o le fefe ne'i malepe
faaipoipo i foliga talavou ma ataata
i le nofo toatasi atoatoa
sans que visage surgisse.


514

Mariage à tout âge

 Tausaga matua  
 o ai e ona manatuaga   
 e musuia ai i tatou   
 faatinoga anoa   
 fa'aaloalo lava,   
 ata fa'aalia   
 ma se malosi taua   
 o le tino ma le agaga   
 fa'aituau.  
   
 su'i faaipoipoga   
 olo pupuni   
 tumu i mea masani   
 i le taufaamatau   
 e aunoa ma se lamatiaga moni   
 ona o le fefe ne'i malepe   
 faaipoipo i foliga talavou ma ataata   
 i le nofo toatasi atoatoa   
 e aunoa ma le faaalia o se foliga.    

  
  515

i le faatuatuaina, uma

   D'une patte réjouie   
en élégante compagnie
elle avançait sur le chemin montant
de sable et de graviers grinçants.

Il fallait passer par là
sans se couvrir de faux-fuyants
d'adorables rouflaquettes
de queues de pie
d'enflures démonstratives
ni de bastonnades à l'égard de l'ego.

O a'u
donc j'avance
sans que le reflet ne m'étrangle
j'organise le camp de base
j'équarris les angles de la permissivité
je crée.

Pas de mentalisme
l'action livre ses horizons
l'œuvre éclot
la confiance est là
pleine de coquelicots
en corbeille pleine
d'une réciprocité l'autre
aux confins d'une réalité ordinaire et non-ordinaire.


511

naissance résurrectionnelle

   Sur le pont les trains passent   
vibrants et colorés
grappes de souvenirs
à la gorge arrachées
orgueil remisé
l'air vibre du rauque des crapauds
les chapeaux tombent
les cheveux se dressent
un bouquet de fleurs des champs
une senteur de foin
une éclaircie entre nuages
le temps est en plein emploi de lumière.

Frappe de la mailloche
le cuir du tambour
le son court
ridules de la rivière
les cloches à la volée
entrent au temple
les officiants de l'acte
gravissent le mont des muses
sous le chant psalmodié
des guerriers de l'oubli.


512

Pas à pas de voyage en voyage

  


Pas à pas,
de voyage en voyage,
en l'arène d'un cirque
où la roue tourne
la rumeur soulève les rideaux de velours.

Entrée colorée,
barnum bruyant,
poussière soulevée
du cortège animal
les passions de l'âme
élevées aux pinacles des temples
démantèlent
la lente construction de la raison.

De sang et de couleurs,
les cris furieux des Erinyes
ont détruit les paysages de l'enfance ;
les lèvres d'argile des sources
ont fait place
aux buses de ciment,
la pierre des protections a été arrachée,
les haies ont été abattues,
les fossés comblés,
le renard argenté
ne trouvera plus le centre des offices,
un vent mauvais rabat les grumeaux de terre
vers les terrasses de pierres sèches,
un vieux frêne murmure ses dernières dispositions.

La nuit roucoule,
pigeons de l'âme
en surplomb
des manquements à l'humaine condition ;
les mensonges populistes
remplacent le chant des poètes,
les chenilles des engins de guerre
suivent les souliers ferrés des poilus,
le ciel s'assombrit,
même les arbres sculptés par le vent d'ouest
se sont couchés sous la tempête.

L'air est fétide,
contre le mur des lamentations
les papiers de l'envie
froissés et forcés
aux jointures des pierres
couvertes de lichens
deviennent chairs pantelantes
d'un tsimtsoum aléatoire.

Les mains décharnées,
hors des poches à l'avenant
écorchent l'oubli ;
les yeux révulsés
clipsent les valeurs de l'esprit,
crème sulfureuse
maquillée d'un sourire de clown,
nos errances dernières sont à portée des crocs.

La fureur fait place
à la nuit,
au silence,
enlaidie par les passions de l'âme
des combats et des haines ;
pommelée par la levée
des moissons nouvelles,
annonciatrices des renaissances à venir.

Il n'est d'herbes officinales
que celles du printemps,
herbes collégiales
du baiser des amants
dispersés
en quête du grand chambardement,
un quignon de pain
en fond de sac,
l'eau dans le creux de la main.

Nous entendrons le son des ricochets,
cailloux jetés sur la rivière,
à portée des demandeurs d'asile,
en sortie d'exil.

513





La présence à ce qui s'advient