Le soleil était levé depuis bon temps. Les brumes de l’Artière disparaissaient. J’attendais la prochaine volée de cloches de notre Sainte Église.
Là dans la roselière les femmes travaillaient. Près du ruisseau elles cardaient le chanvre. Elles frappaient les tiges à coups de battoir. De fines gouttelettes s’échangeaient à contre-jour. Dans les buées du canal de dérivation.
Échange dextre et senestre au rythme régulier. Le grand peigne de bois passait et repassait sur les tiges rêches.
La prairie fleurait bon. Les herbes étaient lourdes de rosée. Elles se levaient soudainement dans un cliquetis. Comme grains de chapelet giclant dessous l’ongle.
Assis sur la pierre des couleurs je t’écrivais. « Belle femme de l’Artière. À peine arrivé au bas du monastère. Brouette vidée. J’ai su que je devais le faire. Mes pensées vers vous. Gertrud il me semble. Déjà là depuis lever du jour. Cheveux serrés dans le foulard. Vous avez illuminé mon cœur. Et depuis je vous observe. Là-bas avec vos compagnes. Bras nus sous l’orbe d’un arc-en-ciel."
Les cloches sonnent. Il sera bon temps de poser l’ouvrage. Pour monter la côte vers le réfectoire. Là près de la croix des Anges. À croupetons dans un fourré. Je jaillirai à votre passage. Chère Gertrud. Pour mettre dans votre main sur un morceau de chanvre. Ces mots.
« Me voulez-vous. Gertrud. Comme homme de maison. Pour vives saisons à venir. »