Emmenez-moi

Emmenez-moi
J’arrive
Avec des hortensias
Et un CD pour la soirée
Après ce long moment
Passé à vous attendre.

Une frange noire
Sur le front
Et mon corps se délabre
Pour que déjà là
Cette femme hors du commun
Puisse renouer en amitié.

J’ai écrit
Un long moment s’est passé
Nous avions perdu nos sacs
Les charognards avaient dû se servir
Comme d’habitude en tout cas
J’avais trop parlé.

Il faut que je vous dise
Que la solitude me convient
Comme vient en passant
Le temps d’accoutumance pour rien
Comme resserrer le licol du cheval
Foire terminée.

Ce soir
J’arriverai à l’heure
Monterai dans le bus le premier
Aurai ma place assise
Car en aveugle
On ne plaisante pas.

Il chantera
Accompagné par le vuvusela
Je déchanterai
Ma colombe mon aimée
Sans avoir goûté à ta pulpe
Avant d’entrer dans les ordres.

J’aurai préféré
Ne plus te revoir
Chose dites chose faites
Il est impossible pour moi
De rayer de la mémoire
Toute trace de rupture.

J’invente je crée
Les mots saute-mouton s’embrasent
Pendant la libre nuit
Du haut de mon âge certain
Sans écraser une mouche
Sur la table de présence.

Je vous tiens en estime
Vous que j’ai rencontré
Ne serait-ce qu’un moment
En réelle attention
J’ai tendu au milieu du chemin
Le ruban des commémorations.

Je rédigerai la lettre
Celle à donner au facteur
Quand il posera son vélo contre le mur
Puis après le verre de l’amitié comme il se doit
Par ces temps de chaleur
Il ouvrira sans hâte sa sacoche.

À mes lèvres
Ces tartines de groseilles
Acidité recouverte de sucre en poudre
J’ai conclu qu’il fallait partir
Cueillir la framboise
Pour un peu de douceur.

Je baisserai la visière de la casquette
Tiendrai fermement l’œillet de poète
Entre les dents
Sourirai
Une dernière fois
Avant de tourner casaque.

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