زمرو آرڪائيوز: جولاء 2013

Tradition et révolution

   Il est des traditions humaines qui ont tendance à stagner et à s’altérer. Ce sont celles qui s’attachent à des objets et à des valeurs que le temps détruit impitoyablement. Elles sont liées à des choses contingentes et matériellescoutumes, modes, styles, attitudesqui changent fatalement avec le temps et sont remplacées par d’autres .

Il est aussi des traditions qui sont comme la respiration d’un corps, qui renouvellent la vie en empêchant la stagnation. Elles sont des révoltes calmes et paisibles contre la mort .

Ces traditions pour rester vivantes doivent être révolutionnaires. Elles seront toujours là parce qu’elles refusent les normes et les valeurs auxquelles la pensée humaine s’attache avec ardeur .

A ceux qui aiment l’argent, le plaisir, les honneurs, le pouvoir, cette tradition vivante nous dit de voir l’envers des choses, de chercher le véritable sens de notre vie, la paix de l’âme .

Les révolutions lorsqu’elles ne sont que politiques transforment les choses en apparence. Elles s’effectuent dans la violence. Le pouvoir change de mains, mais quand la fumée se dissipe et qu’on a enterré les morts, la situation est la même qu’auparavant. Une minorité d’hommes forts arrivent au pouvoir et font disparaître les opposants, à des fins personnelles. La cupidité, la cruauté, la débauche, l’ambition, l’avarice et l’hypocrisie sont les mêmes qu’auparavant .

L’alliance d’une tradition vivante et d’une révolution humaniste peut fixer le cap pour un dépliement existentiel respectueux des équilibres fragiles et mouvants dont tout groupe humain a besoin. Cette alliance ne peut être fermée sur des principes archaïques convenus, ni ouverte sur le tout-venant moderniste. Elle doit donner envie de croître, elle doit donner faim à l’esprit du groupe qui traversant la surface des mots devra aller au-delà de ce qu’expriment les mystères, pour dans l’humilité du silence, la solitude intellectuelle et une certaine pauvreté intérieure conjoindre au désirmoteur de notre humaine condition humaine-animale -, l’élan d’une intuition unique, vers une Vérité unique que nous possédons au fond de nous-mêmes et que nous connaissons parfois, par intermittence .

A ce stade de compréhension de cette humaine condition en marche, entre tradition et révolution, l’émergence des profondeurs de la psyché et de l’âme, de traits de lucidité et d’intuition, rencontre l’expérience existentielle dans la nécessaire relation communicante de ce processus de recherche impliquée aux hommes de bonne volonté, à tous les hommes en devenir d’être .

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la haine accable

Elle rassemble des êtres qui n’ont rien de commun les uns avec les autres, des êtres qui sont dans l’impossibilité de se fuir eux-mêmes ou de fuir les autres .

Forcés de rester ensemble, les hommes et les femmes de la haine brûlent sur place tout en essayant de se repousser mutuellement. Ce qu’ils exècrent le plus est moins ce qu’ils voient chez autrui que la haine qu’ils sentent que les autres éprouvent pour ce qu’ils voient en eux. C’est ce que les autres leurs renvoient de leur propre image et de leurs faits et gestes qui les fait se complaire dans la haine. Ils reconnaissent chez leurs frères et soeurs ce qu’ils détestent en eux. L’égoïsme, la jalousie, l’impuissance, la terreur, le désespoir, la haine, c’est le mal .

Ce n’est pas le mal qui est une entité négative, mais plutôt l’absence d’une perfection qui devrait être. Le mal est ennuyeux parce qu’il est l’absence d’une chose qui pourrait nous intéresser corps et âme, et intellect .

Ce qui peut nous attirer dans les actes pervers, ce n’est pas le mal, mais le bien qui s’y trouve, un bien vu sous un faux aspect, dans une perspective déformée. Un bien qu’on aperçoit comme un miroir aux alouettes, qui nous fait tendre la main, mais qui n’est qu’un appât dans un piège. Et quand le piège se referme, il ne reste que le dégoût, l’ennui ou la haine .

Les gens de la haine vivent dans un monde plein de trahisons, d’illusions, de manipulations, de mensonges et d’ennui. Et lorsqu’ils essayent de noyer cet ennui par le bruit, l’agitation et la violence, ils deviennent encore davantage ennuyeux. Ce sont des fléaux pour le monde et la société .

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سالميت ۽ عاجزي

 سالميت پاڻ ٿيڻو آهي. اهو يقين نه آهي ته توهان کي ڪنهن ٻئي جو ٿيڻو پوندو .

اهو استعمال ڪرڻ نه آهي هن جو ذهن ۽ جسم زندگي گذارڻ جي چريو ڪاروبار ۾ ٻئي جا تجربا, نظم لکڻ لاءِ يا روحانيت جي زندگي گذارڻ لاءِ ٻيو. گهڻو ڪري مرد پاڻ کي اهميت ڏيڻ ۾ جلدي ڪندا آهن تقليد جيڪو ڪامياب آهي, ڇاڪاڻ ته اهي تصور ڪرڻ لاء تمام سست آهن بهتر. اهي جلدي ڪاميابي چاهيندا آهن ۽ اهڙي جلدي ۾ آهن جيڪي اهي نه وٺندا آهن پاڻ ٿيڻ جو وقت .

سالميت عاجزي سان گڏ رهي ٿو. سچ پچ عاجز انسان لاء, آداب ٿيڻ, انسانن جون عادتون ۽ عادتون ڪا به اهميت نه رکن ٿيون تڪرار. عاجزي مختلف ٿيڻ جي ڪوشش ڪرڻ بابت ناهي, ڄڻ ته اسان هر ڪنهن کان بهتر ڄاڻي ٿو ته اسان ڇا آهيون ۽ ڇا ٿيڻ گهرجي .

ڪيئن ڇا اسان پاڻ ٿي سگهون ٿا جيڪڏهن اسان ٻئي جي زندگي گذاريون ? ۽ اهو وٺندو آهي صرف پنهنجو پاڻ ٿيڻ جي جرئت, اسان جي قسمت جي مطابق. پڻ پريشاني جيڪا اسان محسوس ڪري سگهون ٿا اسان جي توازن کي برقرار رکڻ ۾, ايماندار ٿيڻ, مشڪل حالتن ۾, بغير ڪنهن سختيءَ جي پاڻ کي جاري رکڻ لاءِ, بغير اسان جي غلط شخصيت کي ٻين جي غلط شخصيتن تي مسلط ڪريو, peut nous apprendre à devenir profondément humbles .

Une des caractéristiques de la personne humble est que les autres ne savent que penser d’elle . Ils se demandent si elle est folle ou simplement orgueilleuse .

L’humilité a pour sœur la solitude, celle des espaces infinis où tout advient, même le report des choses dites et par laquelle tout concourt, en l’aller-venu des conditions de l’esprit, au gré du vent des instincts , des passions et des émerveillements en ruine de sa propre image .

L’intégrité à pour soeur Athéna, l’orgueil d’être homme/femme debout, de tenir la barre, d’être verticale, prête à faire face aux adversités, à la commisération-réflexe, au doute et à l’enflure de soi .

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le mariage de l’artiste et de l’œuvre d’art

   Les œuvres d’art sont des électrochocs qui nous obligent à percevoir l’absolu. Elles nous interrogent sur nos endormissements en nous obligeant à l’interrogation .

Le visible convoque l’artiste à s’étonner de ce qu’il voit et pressant. La matière révèle ses secrets et le contact se produit entre l’âme patiente, observatrice et agissante de l’artiste et la matière qui s’apprivoise en se laissant façonner . L’artiste pénètre le visible, le sensible, le réel. Il les fait sien par la vie qu’il leur donne sans en faire des objets. Il ne reste pas prisonnier des apparences, des résistances et des habitudes de la pensée mentale. Il préserve l’aptitude à l’émerveillement face au réel en percevant en permanence la faille séparant le monde naturel et authentique de la matière chosifiée . Et derrière l’apparence de la création il perçoit le mystère de l’ordre caché. Il élève la science de l’art au niveau des qualités de l’esprit pur. Le feu d’artifice de son inspiration crée le moment poétique, contemplation innocente d’au-delà des certitudes connues tout autant qu’engagement sur le chemin de l’émerveillement .

L’admirateur, le disciple, par contagion intuitive, saisit l’interaction entre l’humain et l’environnement, entre l’humain et l’univers .

L’artiste par une double observation de son intériorité et de l’environnement fait surgir la forme poétique éternellement renouvelée. Il y a dialogue imprévu, improbable, entre le créateur, homme animal-humain de chair et de sensations mêlées et la matière. L’artiste devient, le temps d’une plongée en la lumière de l’altérité du monde, le serviteur de ce qui le prolonge, de ce qui le submerge tout autant que de ce qui le glorifie. Il se retrouve être la mémoire universelle, union impensable de l’absolu et de sa manifestation. Une cristallisation de l’événement amène le jaillissement d’une vérité enfouie, visible en cet instant où l’aube de ce qui s’advient est au coeur de son mystère, comme un rendez-vous caché qui sous-tend l’apparence de la création . Poursuivant sa quête, la curiosité et la sensibilité de l’artiste le guident vers la perception et l’intuition de la structure invisible des choses .

Et la matière s’ouvre telle une rose en été devant l’âme agissante, patiente et contemplative de l’artiste. La matière s’apprivoise, elle se fait accueillante et se laisse façonner. L’homme animal-humain, dans une nouvelle intimité de lui-même s’efface pour laisser place à l'Humain”, à une dimension universelle où le beau s’exprime et existe. L’artiste est alors un. Il est instrument d’une énergie nouvelle et pleinement lui-même. Il révèle la nature humaine . L’artiste par son geste de création se vit. Il reçoit et est vécu. Il est mouvement du mouvement avant d’être une chose ou quelqu’un. Il aime. Il est intensément la diversité, la dualité et la multiplicité. Il est grain de poussière attentif aux bouleversements incessants de l’ordre universel. Il est le marié des nombreux mariages qui l’attendent au bout du bout du couloir d’ombre et de lumière de son parcours obligé .

152

quelque chose d’avant le temps

 De tant et tant d'efforts
à la mesure des sollicitations
pour garder la tête hors de l'eau
et être en ressemblance avec le visible
sans être fermé à l'invisible .

De tant et tant d'efforts
à élever la viridité
sur le pavois de nos intentions
alors que sans puissance effective
l'amour sensible est souvent figure de désaffection .

De tant et tant d'efforts
à se mouvoir dans ce corridor
à distinguer le bien du mal
afin de réellement voir où l'on va .

De tant et tant d'efforts
à traverser
les gués du torrent de l'illusion
sans distinguer l'origine de cette poussière d'étoiles
où être hommes et femmes liges .

De tant et tant d'efforts
à se prévaloir d'un soleil éternel
alors que les confins de notre entendement
sont sacrifiés sur les autels
du mutisme et de la surdité .

De tant et tant d'efforts
passés à attendre que la pluie s'arrête de tomber
alors qu'elle est partie intégrante de toute fructification .

De tant et tant d'efforts
à considérer le fin du fin de notre parcours de vie
comme étant le bonheur
alors que nous sommes des hommes et des femmes en marche .

De tant et tant d'efforts
à accepter que le soleil se couche
avant que les blés mûrs
ne demandent
en quête de moisson
le retour du père .


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se rejoindre soi-même

 Il faut jeter par dessus bord beaucoup de paresse, mais surtout beaucoup d’inhibition et d’incertitude pour se rejoindre soi-même .

Pour toucher les autres à travers moi, je dois y voir plus clair et je dois m’accepter moi-même.

Depuis des années j’emmagasine, j’accumule dans un grand réservoir, mais tout cela devrait bien ressortir un jour, sinon j’aurai le sentiment d’avoir vécu pour rien, d’avoir dépouillé l’humanité sans rien lui donner en retour .

Tous les problèmes que je traverse et que je tente d’expliquer, me tourmente et appelle en moi solution et formulation. Car ces problèmes ne sont pas seulement les miens, mais ceux de beaucoup d’autres. Si à la fin de ma vie je trouve une forme à ce qui est encore chaotique en moi, j’aurai peut-être rempli ma petite mission.

Tout cela me semble bien prétentieux. Je me sens parfois comme une poubelle tant il y a de trouble, de vanité, d’inachèvement, d’insuffisance en moi. Mais corrélativement il y a aussi une authentique sincérité et une volonté passionnée, presque nécessaire, d’apporter un peu de netteté, de trouver l’harmonie entre le dedans et le dehors pour se rejoindre soi-même .

A la longue il se pourrait que je trouve la paix et la clarté. Mais oui ! C’est maintenant, en ce lieu, en ce monde, que je dois trouver la clarté, la paix et l’équilibre. Je dois me replonger sans cesse dans la réalité, m’expliquer avec tout ce que je rencontre sur mon chemin, accueillir le monde extérieur dans mon monde intérieur et l’y nourriret inversement je dois continuer d’écouter au-dedans de moi – , mais cela est terriblement difficile et c’est pourquoi j’ai ce sentiment d’oppression au-dedans de moi .

C’est alors que je fermais les yeux. Ne plus penser. Je traversais un moment de paix, d’accalmie. Ma foi indéfectible en l’homme ne peut faire en sorte que je me dérobe. Une perspective de cohérence m’appelle. J’ai si tendrement à faire que je ne puis qu’assumer pleinement mon destin et employer mes talents à soulager les maux de mes frères et sœurs .

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par delà la frontière et le mal

La frontière entre le bien et le mal passe entre les deux rives de la rivière. Tout choix d’une rive plutôt que de l’autre ricoche et porte en lui son châtiment et son germe. Le châtiment maintient en enfer ; et le germe, cette force capable de fendre le roc, fissure le cœur. Aussi passons-nous notre vie à tergiverser sur une passerelle .

C’est le passage de l’une à l’autre rive qui reste pur mystère. Nous pourrions penser qu’il existe de chaque côté un abîme par lequel s’opère le passage à une autre dimension. Et peut-être la tentative d’échapper par tous les moyens à cette aspiration, à cette chute vertigineuse est-elle l’origine de nos pires souffrances .

Le refus acharné qu’oppose le connu à l’inconnu, le familier à l’inexploré, oblige le destin à user de violence envers nous .

Pour le foetus dans le ventre de sa mère, la fin du monde se nomme naissance. Nous appelons papillon l’anéantissement de la chenille. Toute vie est un drame cosmique qui ne finit, somme toute, pas si mal .

Passer le pont, c’est changer de nature. Voir autrement, c’est changer sa vision, c’est fissurer sa vision convenue des choses. Qu’il est douloureux de changer d’état. Cela nous fait cligner des yeux, avant de voir plus tard ces états se stabiliser .

Changer de bord brouille le regard que les autres me portent. Aussi de peur de passer pour dément, je me garde d’en parler à quiconque. Mais la vérité est à l’inverse, aussi suis-je sorti du monde qu’hallucine mon époque pour rejoindre une réalité sans temps et sans lieu. Et cette réalité est coulée de lumière, magma fluorecent qu’irisent toutes les nuances du plus sombre au plus lumineux. Et cette palette est piano des couleurs .

Et je l’ai vu comme je vois maintenant par la fenêtre éclater un été au zénith de sa majesté. J’ai vu que la matière n’était que lumière et vibration et Amour, pur Amour, Amour incommensurable .

Et je vois tous ces êtres humains aller quelque part alors qu’ils ne sont jamais partis de nulle part et n’arriveront en nul lieu où ils ne sont déja. Cette immense mise en scène sacrée et absurde me laisse à penser que les hommes sont des dieux quand, entre deux rêves, ils laissent leur regard vaguer sur le monde .

La leçon de cette métaphore de la passerelle entre deux rives est que la vie nous a été donnée, que nous nous devons de mettre le plus d’énergie possible à faire fructifier ce potentiel, le moins d’énergie possible à en souffrir et ne pas s’étonner quand ce qui semble être éternel clignote et disparaît .

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