Kategori Achiv: Septanm 2018

il est temps de se mettre à l’ouvrage

   Vers le haut de la montagne   
à la cime des arbres
pendent les chiffes colorées
que les rapaces ont dispersés.

A l'affût près des roches moussues
à la source intérieure
le loup guette
le museau frémissant.

Montent de la vallée
le cortège des humains
raclant de leurs souliers cloutés
les cailloux du chemin ferré.

S'arrêtant dans la clairière
ils déposent le fardeau
ce corps mort
sur un tronc d'hêtre brisé.

S'élèvent les chants de l'autre temps
d'ailleurs et d'aujourd'hui
mariage des sons gutturaux
et des plaintes légères
tel un feulement amoureux finissant.

Par dessus la forêt
l'astre solaire explose
écartant les brumes matinales
il redresse les forces inversées.

Il est temps de se mettre à l'ouvrage
de poser les gouttes de rosée sur la feuillée
puis d'allumer le feu de la fertilité
en éclosion d'infini.


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Les petits papiers secrets

 De plumes vertueuses   
 le colibri s'est épris.  
    
 Les yeux se plissent   
 devant la solitude de l'enfance. 
     
 Les poings se serrent   
 s'il n'y a rien à faire de mieux.  
    
 À demeure l'au-delà se recueille   
 quand le temps casse sa pipe.  
    
 À genoux devant la fontaine   
 chaque araignée d'eau purifie.  
      
 En rangée de perles
 le sang de l'œil conte fleurette.   
   
 Le souvenir toujours le souvenir   
 à ne plus avoir de pleurs.
      
 Connaître le don des larmes   
 matrice des connaissances.
      
 Au gré des ans   
 passe l'excès d'amour de soi  
 passe la danse des sottises   
 passe l'histoire fondatrice   
 passent les grandes doctrines    
 passent les blessures   
 passe la nostalgie de l'ailleurs.
            
 Au gré des portes qui se ferment   
 s'ouvre un mutisme tempétueux   
 s'ouvrent nos vies minuscules   
 s'ouvre la nuée des tendresses    
 s'ouvre la nécessité de prendre soin   
 s'ouvre la parfaite adhésion à ce qui est   
 s'ouvre un sens à sa vie.  
    
 À la cloche de l'étude   
 j'ai mis mon tablier gris   
 et sa ceinture bien serrée   
 avec au cou   
 la médaille miraculeuse   
 et ces petits papiers secrets   
 attachés aux bretelles   
 de la culotte en velours côtelé.   

    
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Nos visages enceints

 D'un revers de la main   
 il a convoqué le signe   
 apparu sur l'écorce du hêtre   
 embranchement des tensions   
 d'une poussée verticale   
 alors que le frisson parle   
 au cœur de l'humus foulé   
 par la galoche cirée.  

 Il est des nuits de lune pleine   
 à saupoudrer de fines étoiles   
 le pavement des villes éternelles   
 accrochant à la ramée   
 la chaleur du jour dissipée   
 que rosit les joues fraîches   
 de nos visages enceints. 

 
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Je te tiens tu me tiens

 Je te tiens tu me tiens   
 par la barbichette   
 et ne tiens que vent   
 et boule d'or   
 roulant à fond de ravin   
 vers la cupule des origines.        
    
 Je rêve de te tenir   
 par la barbichette   
 alors que tu dors   
 homme dissipé   
 aux incartades oubliées   
 sans appui sans chemin.    
  
 Le nouvel acte approche   
 le petit enfant rêve dans le sein de sa mère   
 et la question est pesante   
 être couché dans le vide n'a rien valu   
 terrifiant   
 que de regarder en arrière.      
     
 La boule d'or plonge   
 l'écume la recouvre   
 un bruit de rires cumulés   
 monte des marmites de géant   
 l'enclume sonne le dernier rappel   
 brisant l'ordre des choses.      

    
442

Le vieillard aux galoches de vent

 Cette nuit   
 d'avant les chants d'Hildegarde   
 mirador planté dans les herbes folles   
 une pincée de sel à la volée   
 contre la carène des visions.   
   
 La calèche s'éloigne   
 sur la sente pierreuse   
 point de mission en perspective. 
     
 Juste une main tendue   
 dont les doigts se taisent   
 quand passent fraîches   
 les robes à fleurs des demoiselles d'honneur   
 de rires contenues   
 devant le vieillard aux galoches de vent.  

     
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l’ouvert pour l’autre

  L'Ouvert en soi en moi   
l'Ouvert pour l'autre
l'Ouvert à l'autre.

Retournement des yeux
coquillés au reflet de la libre issue
par les yeux de l'animal.

Dès l'enfance
nous fûmes sur le parvis des apparences
le support des remontrances.

A écrire le plein et le délié
de pinacle en chaire sermonnante
à remonter la pente.

Et puis le jour fût pure essence
et les fleurs s'ouvrirent
appel tambourinant des ménestrels.


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