Le gardien se tenait bien droit
Comme un cep de vigne
À la verticale
Sans feuilles ni raisins
Pour faire le malin.
Par devant soi
Penser ou croire ce n'est pas voir
En arrêtant de saisir
En arrêtant de déduire
En s'efforçant toujours.
Être lié aux questions
N'est pas la liberté
Ce serait plutôt la prison
Alors qu'attendre sans forcer
Est appel à qui de droit.
Ouvrez la porte
Ne gardez pas les clés dans la poche
Il y aurait piège
Car le piège c'est le mental
Et le mental c'est aussi la clé pour ouvrir la porte.
Le visage est cadenassé
Alors que la tête est quartier de lune
Aussi les intentions le préoccupe-t-il
Comme l'amour d'un homme est intense
Comme l'amour d'une femme est profond.
La liberté serait d'accepter son destin
Tel le saut de l'ange
Sans effort d'un nuage l'autre
Au cœur de la matrice
En répétant les expériences.
Ses bras sont de cire
Ou de papier mâché je vous dis
Et ses paroles dérangent
Aussi permettons-nous
D'écourter la station debout.
Arrêtons de demander
Pour que la Beauté traverse la vie
Ne serait-ce qu'une seconde
Afin de s'assoir à la table de l'auberge
Devant un repas chaud.
Songer aux choses invisibles
Rend l'homme curieux de la vie des âmes
Lanterne de papier élevée
Devant la page blanche
À la merci d'un courant d'air. ( Piirustus Jean-Claude Guerrero )
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J'attends de l'entrelac
Qu'il se lasse
D'être entre les branches du lilas
Entre l'âme et la contemplation de l'âme
Entre le bas et le haut de la rue Gambetta.
J'attends de l'entrelac
Qu'il sente bon le chèvrefeuille
Qu'il soit utile comme un passage à niveau
Qu'il soit le donateur fou d'un rire éternel
Mais jamais un chat vivant et mort à la fois.
J'attends de l'entrelac
Qu'il délègue à la lumière
Le moyen de sustenter le temps qui passe
D'une rasade de matière noire
Dévolue par un Einstein hilare.
J'attends de l'entrelac
La clé sous le paillasson
Afin d'entrer dans la maison
Pour retirer le gris des murs
Et y coller la toile de Jouy.
J'attends de l'entrelac
De longs rubans de couleurs
Pour faire la fête
Et trouver le trésor caché
Près du fournil où ça brûle.
J'attends de l'entrelac
Un peu de miel dans les cheveux
Pour y glisser langue râpeuse
Du cavalier fou
Caracolant sur une valse brune.
J'attends de l'entrelac
Qu'il me fasse signe
Pour naître encore et encore
Les sabots glissant sur la pente fatale
En me tapotant l'épaule par derrière.
J'attends de l'entrelac
Qu'il prenne vie
Au souffle des mots
Papillons aux ailes légères
Permettant de vaticiner. J'attends de l'entrelac
Ses boutons de bottines
Son lorgnon de la Belle Époque
Le col amidonné de l'Entre-deux-guerres
Et la main de ma mère.
J'attends de l'entrelac
Qu'il m'assigne la direction
Aux entours familiers
Pas trop éloigné d'où je viens
Accompagné d'un solide havresac.
J'attends de l'entrelac
De bonnes nouvelles
De notre monde déchiré
À la merci des matamores
Engagés dans la course à la destruction.
J'attends de l'entrelac
Des rivières rafraîchissantes
Un ciel changeant
Un air respirable
Avec des arbres agités par la brise.
J'attends de l'entrelac
Qu'il capte la ténèbre montante
Afin de disposer le fruit du sycomore
Près du mur d'Hadrien
Que nous avons délaissé.
J'attends de l'entrelac
La coquille sacrée
Qui permettra de rêver
Au coucher de soleil du Finistère
Au visage du père.
J'attends de l'entrelac
Un chant d'oiseau
Me permettant de passer la frontière
Dans le silence et la paix
À livre ouvert.
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