J’avais laissé Nadia chez des voisins qui habitaient en haut du lotissement et j’étais arrivé à la clinique juste pour te voir naître. Posé sur la poitrine de ta maman, tu respirais difficilement, le ventre gonflé par une grosse tumeur maligne accrochée à la colonne vertébrale.
Ta vie commençait.
Tu avais trois ou quatre ans. Cela se passait dans l’allée séparant notre bâtiment d’habitation des garages de la rue Nicolas Nicole. Tu avançais en balancier avec tes petits tréteaux de bois à bout de bras. Ton corps était rigidifié par un plâtre qui te recouvrait des pieds au thorax. Tu souriais, toi le grand Bédé comme je t’appelais, et tu m’incitais à reculer encore un peu pour me montrer comme tu marchais bien. Et je te prenais dans les bras et te soulevais.
Tu étais venu nous voir à Marcillat. Nous avions été te chercher à l’aéroport de Clermont-Ferrand en provenance de Marseille. Tu m’avais offert cette sculpture en terre émaillée, une lourde boule avec une noire excavation – incitation à aller fouiller plus avant le profond des choses non dites, et des aspérités pour se défendre d’éventuels prédateurs. મેં લીધું આ ઑબ્જેક્ટ તમારી વેદનાના પ્રતીક તરીકે જે તમે કોઈક રીતે સંચાલિત કર્યું છે અને મને શેર કરવા કહ્યું. ત્યારથી આ બોલ વચ્ચેની કડી તરીકે મારી સાથે છે તમે અને હું. તમે વીસ હતા.
એલિયરમાં ટ્રોનકાઈસનું જંગલ. મેં તને છોડી દીધો ઊંચા વૃક્ષો દ્વારા વિસ્તૃત વિશાળ ગલીમાં આર્મચેરમાં. અમારી પાસે હતુ ઘણા સો મીટર કર્યા પછી હું તમને છોડીને આગળ વધ્યો તમે મને સૂચવ્યા મુજબ એકલા. મારા પગલાંઓ પાછા ખેંચી રહ્યા છીએ … તમે હવે નહોતા આ ! મેં તમને ઘણી મિનિટો માટે ફોન કર્યો. તમે જવાબ ન આપ્યો. ચિંતાતુર, હું તમને આખરે એક નાનકડા માર્ગમાં ગતિહીન જોવા માટે જોતો હતો ના. લાંબી મૌન હતી. ચારેબાજુ હ્યુમસની ગંધ નાચી રહી હતી અમારા તરફથી. પવન ક્રમિક સુગંધના ધાબળો દ્વારા સંવાદ કરે છે. અમે અનુભવાયેલી વસ્તુઓના ડ્રેપમાં હાથથી પકડવામાં આવે છે. ત્યારે મને ખબર હતી કે અમે એક જ બાજુ પર હતા, ભાઈઓ, એક પિતા અને તેનો પુત્ર, સાંભળવું અને જે છે તેનું સ્વાગત છે.
આ છેલ્લા વર્ષોમાંથી મારી પાસે લાંબા સમય સુધી પાછા આવે છે અમે ફોન પર વાતચીત કરી, તમે મારા પુત્ર સિલ્વેન અને મારા પિતા ગેલ જેમ તમે મને બોલાવ્યો. તે તમે આ ક્ષણમાં શું પસાર કરી રહ્યાં છો તે વિશે હતું અને ભૂતકાળની ચોક્કસ ઝબકારો કે જે તમે સ્વાદ સાથે ઉત્તેજિત કરી હતી. શું સારું યાદો. હું હજી પણ તે લાંબી રાતોમાંથી તમારો ભારે, ખેંચતો અવાજ સાંભળું છું. Il n’y avait jamais de phrases toutes faites. Tu étais en recherche d’expression pour que précisément et clairement le parler dise l’essentiel. Et si parfois certains mots dépassaient ta pensée pour se retrouver en équilibre instable entre la beauté et le non sens par rapport à ce qui précédait, c’était pour la bonne cause, celle de l’innovation par rapport à là où tu en étais, toi l’esthète de ce qui s’advient. Et tu étais comme ça, souvent en avant, toi qui physiquement ne marchait pas. Je me souviens de certains thèmes qui revenaient dans nos conversations tels que ceux de la création, de la posture de l’artiste mais aussi de l’amitié et de l’amour – l’amour des corps, l’amour des êtres. Tu aimais les gens. Tu te plaignais rarement et c’était toujours moi qui abrégeait la conversation qui aurait pu durer des heures et des heures.
Et si tu es parti dans cette nuit du 18 au 19 ઓક્ટોબર, c’est pour échapper à ta condition physique d’homme souffrant dont la santé ne faisait qu’empirer, mais c’est aussi pour poursuivre ton œuvre dans l’au-delà d’ici, toi le chercheur d’absolu et de vérité missionné par une force bien plus forte que toi, un appel impérieux que tu pressentais. Tu étais amusé, curieux, intéressé par les sujets que je pouvais évoquer, sujets ayant trait à l’esthétique, à la psychologie et à la spiritualité. Tu avais un humour parfois circonstancié, parfois ravageur, toi le dandy charmeur qui cultivait le bon mot à bon escient et jamais pour faire mal. Toi l’amoureux de la vie en désespoir de ce corps qui te faisait tant souffrir, ton regard perçant aux yeux en amande et ton sourire un rien ironique me clouaient sur la porte des granges pour entrevoir ton âme au travail vers la rédemption de ceux qui étrangement normaux dans leur conformité ne vivaient pas.
D’âme à âme tu es à mes côtés. Quand tu as été délivré de ta tunique de peau c’était quelques heures après le coup de fil que nous t’avions passé afin que tu sois associé aux obsèques de ton grand’père.
Un dernier mot : “pardon”. Sache que je te demande pardon de ne pas avoir été plus souvent présent.
Au revoir Grand Bédé, મારા પુત્ર, Sylvain .
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