La poésie au trente et un du mois d’août

La poésie
Une perception globale
Spontanée
Du monde
Du monde en nous.

C’est simple
L’enfant est un poète
Son imaginaire
Le sens qu’il donne aux choses
S’applique à un objet.

Il n’y a pas d’intermédiaire
Entre l’Être
Et ce qui est là
Devant ce qui surgit
En soi.

Hésiode et Homère
Rassemblaient ce qui se disait
En vers
Les aèdes s’accompagnaient de musique
Ils chantaient.

Les dieux
Les hommes
Dansaient devant la flamme
Brandons de feu
Brandis devant le mystère.

Puis nos ancêtres se sont organisés
Pour vendre et acheter
Le faire-valoir a occupé leur esprit
L’écriture et le calcul ont pris date
Le temps et l’espace stigmatisant les rêves.

Il a fallu être précis
Pour ne pas se faire voler
Pour inscrire dans le sang
Le candélabre des âmes
En quête de sécurité.

Les marchands et les juristes
Ont organisé le savoir-faire
Par l’esclavage et l’ostracisme
Vidant les prisons
Pour quelques jeux du cirque.

Il fallait se montrer
Être beau et fort
Pour manier le glaive et la parole
Se soumettre aux puissants
Et aux croyances religieuses d’état.

Tandis que dans les bois
Par les prairies et les rivières
Les montagnes, la mer et les astres
Continuaient de se tenir roide
Le gigantesque cactus-candélabre de la lumière.

C’est alors que l’œuvre s’est donnée à ressentir
Par des mots, une musique, une sculpture, une profération
Un bon moment où trouver beau ce qui exulte
Un vécu de la nature
Un silence hors sens utilitaire.

La poésie est signe
Trace infime d’un rayon de lune
Formes blanches à la tombée du jour
Puissant souffle sur la mer bleue acier
Et qui jamais ne se corompt.

La poésie est de passage
Elle sangle le paquet-cadeau d’une lampée de miel
Devenant cendre en sortie de nuit
Quand au seuil de la caverne
La douleur éblouissante du soleil nous saisit.

La poésie agrandit le champ de la perception
En disjonctant les règles du moment
Elle devient structure
Et par là ses formes affirmées
Permettent la rencontre entre gens cultivés.

C’est ainsi que vint le temps des alexandrins
Avant que n’arrive le souffle nouveau
De la libération des règles de représentation
Avec les opéras et la magnificence
De Heredia, Gauthier et Hugo.

Puis les poètes symboliques
Battirent en brèche les luxuriances de l’extériorité
Pour avec Baudelaire, Verlaine et Rimbaud
Aimanter les métamorphoses de l’âme
En fouillant les ombres de la psyché.

Enfin vint le temps de la libre entreprise
Des surréalistes et de la poésie contemporaine
En brisant les lunettes de la bienséance
Pour ouvrir le vaste champ des styles culturels variés
Afin que le monde rencontre le monde.

Le contraire de la poésie est de la poésie
La parure endocausale et individuelle
Recouvre les règles d’avant
Tout converge vers le champ de la complexité
La chanson crée l’agitation émotionnelle des pensées.

Dès lors en poésie au pays de la poésie
Il n’y aura plus de nantis en poésie
Chacun pourra écosser sa gousse
Pour ajouter au ragout social un sel nouveau
Et d'entrer sur les autoroutes de l'I.A.

Dès lors la poésie est morte
Elle est déboulonnée de son piédestal
Par les assauts du savoir-faire technique
La séduction devient l’outil sécuritaire
Permettant la zénitude.

Mais à bas bruit une poésie est toujours là
Dans les arrières cours de l’information
Chaque personne sensible peut être poète
Au milieu de l’ivraie poussent les blés de l’avenir
Être légitime dépend de croire en soi.

Mais la poésie c’est bien plus que les poètes
La poésie est là sous nos pieds
Dans les petits bouts d’allumettes
De la quotidienneté consciente
Tout autant que dans l’arrachage des habitudes.

La poésie est à table
Dans l’abondance des mets proposés
Dans le hasard de l’attention portée à ce qui est
Dans le sourire de l’enfant
Tout autant que dans les rides du vieillard.

Et les mots jaillissent
Au travers de l’attrape-mouches des sens
Des mots simples
Des concepts arrogants
Il y a de la place pour tout.

Le poète est agi par ce qui est là
Dans cette myriade d’éléments
Qu’il peut décrire et agencer
En une entité mono psychique englobante
Jusqu’à ce qu’épuisement s’en suive.

La prolixité des sources
Propose au poète l’humilité
Dans sa pratique d’artisan du verbe
Lui l’intercesseur des flux sensoriels
Qui partout l’assaillent.

Il est alors mûr
Pour accueillir le fruit unique
De l’arbre de la connaissance
Marbré par la lumière de l’arbre de la sagesse
Pour le déposer à même la terre des origines.

La bogne éclate
Nous accueillons le nectar de l’autre, бити
En émerveillement de ce qui advient
Par l’entremise d’une synchronicité
Frisant l’archétype de la situation.

Le poète se retournant vers lui
Prend alors soin de lui
Sa sensibilité et se vulnérabilité vivifiées
Pour porter la charge impartie
D’être au seuil de son accomplissement.

Être en poésie
C’est prendre soin de soi
Lui le transfuge de la matière devenant énergie
En vibration avec le flux de la vie
De la naissance jusqu’à la mort.

Le souffle est là
Et je le respire
Car c’est la vie qui respire en nous
Cette conscience de la respiration
Œuvrant au va-et-vient de la fidélité à soi.

1644


Le pas de rien

Le pas de rien
Émargé du ciel
Sur les ondes natives.

Entre les nuages
Droit au cœur
Les rives de l’au-delà.

Un pont où faire halte
Au versant du rêve
Toujours recommençant.

L’imprévu
Vu
Impensé.

Au centre le murmure
D’où qu’il vienne
Au profond du cratère.

Ce qui ravit
D’une caresse souple
Le fruit consenti.

Trop plein du vent qui passe
Au crève-cœur d’un jour meilleur
Le germe de l’instant.

L’odeur des sapins
Rompt l’espace
De bubons galactiques.

Au plus fort de l’incarné
De chair et de pierres constituées
Le gouffre à sonder.

À prendre sens
Notre regard
Suscite l’écho.

L’in-accès au délire
Clame le désir
Auquel consentir.

Très loin
Tâtonnant
Le mystère serait-il là.


1643



Un mot pour fixer le jour

Un mot
Pour fixer le jour
Un mot
Si haut
Dans la vasque de verdure.

Tu reprendras le fil de ton chant
Au cadran solaire
Des heures et des heures
Pur silence
À chaque fois inédit.

Au seuil espéré
Le syrinx reste de mise
Dans l’âpre ivresse de l’immensité
Du nid défait
De la vacance.

Et d
'assumer ton chemin
Cette vie vécue et à vivre
D’une rive l’autre
Au bout du bout
Fier arpenteur des landes.

Qu’il soit l’intervalle
D’un autre cri
Au val d’Enfer
De notre ardente déchirure
Laissant cependant circuler l’air.

Et de s’engouffrer
Au détriment des papillons de nuit
Quand s'égraine
À petits coups métalliques
Le tictac de l’horloge.

Accepter ce qui est
À seule fin de durer
Rend les degrés de l’ombre
Aveugles à dévisager
Notre propre face calcinée.

Les monstres rient
Au parti-pris de ce qu’on dit
Quand roussit l’or du couchant
Et qu’un dernier vol d’hirondelles
Éloigne le passé.

Lancer
Cœur battant
Le bâton de vie
Sur la pierre vénérée
Permet l’éveil.

Entre la cime et l’horizon
Passent les nuages
De tout âge
Va-et-vient inaltéré
Traçant le cercle circassien.

Plaire ou déplaire
Le souffle se contracte, se rétracte
Rage née du désaccord
D’avec le gouffre sans fond
Des promesses inaccomplies.

Le mot n’est plus à célébrer
Son infinie résonance paraphe
L’enfant attendu
Au bagad
De nos regards croisés.


1642


Emmenez-moi

Emmenez-moi
J’arrive
Avec des hortensias
Et un CD pour la soirée
Après ce long moment
Passé à vous attendre.

Une frange noire
Sur le front
Et mon corps se délabre
Pour que déjà là
Cette femme hors du commun
Puisse renouer en amitié.

J’ai écrit
Un long moment s’est passé
Nous avions perdu nos sacs
Les charognards avaient dû se servir
Comme d’habitude en tout cas
J’avais trop parlé.

Il faut que je vous dise
Que la solitude me convient
Comme vient en passant
Le temps d’accoutumance pour rien
Comme resserrer le licol du cheval
Foire terminée.

Ce soir
J’arriverai à l’heure
Monterai dans le bus le premier
Aurai ma place assise
Car en aveugle
On ne plaisante pas.

Il chantera
Accompagné par le vuvusela
Je déchanterai
Ma colombe mon aimée
Sans avoir goûté à ta pulpe
Avant d’entrer dans les ordres.

J’aurai préféré
Ne plus te revoir
Chose dites chose faites
Il est impossible pour moi
De rayer de la mémoire
Toute trace de rupture.

J’invente je crée
Les mots saute-mouton s’embrasent
Pendant la libre nuit
Du haut de mon âge certain
Sans écraser une mouche
Sur la table de présence.

Je vous tiens en estime
Vous que j’ai rencontré
Ne serait-ce qu’un moment
En réelle attention
J’ai tendu au milieu du chemin
Le ruban des commémorations.

Je rédigerai la lettre
Celle à donner au facteur
Quand il posera son vélo contre le mur
Puis après le verre de l’amitié comme il se doit
Par ces temps de chaleur
Il ouvrira sans hâte sa sacoche.

À mes lèvres
Ces tartines de groseilles
Acidité recouverte de sucre en poudre
J’ai conclu qu’il fallait partir
Cueillir la framboise
Pour un peu de douceur.

Je baisserai la visière de la casquette
Tiendrai fermement l’œillet de poète
Entre les dents
Sourirai
Une dernière fois
Avant de tourner casaque.

1640

Les fleurs embrassent

Les fleurs embrassent
Du cœur
La flamme
Élargie
Par une odeur de miel.

Âme tambourinaire
Sur le roc de granit
À la lyre grattée
Le pas claquemure
Comme sabots de Noël.

La rivière coule
Et déploie de ses cailloux ronds
La robe de mariée
Vêture de mousse
Des folles nymphes.

Sourire
De tâches de rousseur
Cerises fraîches
Craquantes sous la dent
Pour hirondelles déployées.

Doux regard
De pâquerettes piquetées
La frange blonde
S’est parée de lumière
Dans l’ombre de la fontaine.

À même le feuillage écarté
D’une main diaphane
Fruit saisi
Les lèvres purpurines
Ont murmuré le chant.

Gargouillis d’une source
Aux pieds des bouleaux doux
Une feuille posée sur le ventre nu
S’est offerte
Au caillou blanc de la présence.

Dans la maison d’argile
Point d’ustensiles
Juste la terre battue
Avec près de l’âtre
Un coq de passage.

Traces légères
Des sabots
Ployant la soie des herbes
D'une foulée
De biche assoiffée.

Rose enamourée
Contant sous la feuillée
La venue
De l’amie des clairières
Parée de l’étole de Tréguier.

La nuit parfois
Jouer de la flûte
Provoque larmes et rires
Comme pour dresser sur l’autel
Le préparat du mystère.

Fusse du doigt
Ou de la langue
Une silhouette entrevue
Offre vigueur et joie
Au fusain des astreintes.


1638

Fine danse à l’orée du ciel

Fine danse à l’orée du ciel
Et Finette l’aimait
Ce cadet tout droit venu de Palestine
À conter larmes et morts
Par les ruines accumulées
Poussière à soulever du doigt
Le béton hérissé de ferrailles.

Une couche grisâtre
Couvrait les ruelles étroites
Reflet d’une beauté passée
Hors des moucharabiés
Hornant façades fissurées
Dentelles creuses d’une bouche édentée
Bombifiée par Lucifer.

Quelque morceau de plâtre
Avait permis le tracé d’une marelle
Où des petites filles aux robes déchirées
Virevoltaient princesses messagères
Sur un terre-plein inondé de lumière
Soumis au surgissement de l’alerte
Plongeant les lieux dans un silence odieux.

Soudain un craquement sec
Faisait s’élever des volutes de poussière
Puis des cris et des gémissements
Des crissements de pneu sur la terre battue
Suivis de sirènes hurlantes
Que les murs déchirés faisaient rebondir
Comme ballons de baudruche.

Лице у лице
Les vélos posés contre les palissades
Ils eurent le temps
De contempler l’avancement des travaux
Puis se dire comment ça allait chez eux
S’ils avaient suffisamment à manger
Et que les petits ne pleuraient pas trop la nuit.

Dans les rues désertes
Un vieillard tirait sa misère
D’un pas mal assuré
Avec un grand cabas noir
Pendant qu’un chat couleur sable
Suivait à bonne distance
L’homme au visage baissé.

Une pincée de matière friable
Coulait grise dans une fissure
À l’ombre de ce qui fût une échoppe
Je m’approchais pour voir surgir
La tête d’un reptile
Un tout petit reptile
Balançant sa langue d’un côté l’autre.

Nous avions déjà couvert d’autres lieux
De désolation et d’inimaginables destructions
Sans que notre respiration ne s’épuise
Sans que notre sang brûle
Mais jamais n’avions rencontré de telles souffrances
Que même la maigre végétation sinistrée
Comptait ses dernières traces de verdure.

Plus de muezzin n’appelle à la prière
Du haut d’un minaret
Encore debout mais chancelant
Pendant qu’une ombre traverse la rue dévastée
Enjambant les gravats
En soulevant sa gandoura
D’un geste mesuré.

Plus d’oiseau dans l’azur brûlant
Les rues dégagées au bulldozer
Semblaient des tranchées ouvertes après un cataclysme
Des carcasses de véhicules
Portes défoncées
Étaient de rares touches de couleurs
Dans un univers de fièvre suspendue.

Un chien passa
Semblant pressé de rentrer chez lui

Le museau au raz du sol
Langue pendante
Contournant les blocs de pierre
Queue rabattue sur son corps décharné
Il allait vers le soleil levant.

Quand nous reverrons-nous ?
Quand nos mères se rencontreront-elles ?
Quand notre père se retournera-t-il ?
Quand nos enfants joueront-ils ensemble ?
Quand parmi les cendres
Pourrons-nous construire un campement ?
Où déposer la feuille blanche du poète.


1638

En bord de route

En bord de route
Cette histoire de poule morte
À battre sa coulpe
Devant l’incivilité de l’avoir tuée
Cette poule morte
Gisante dans le fossé.

Quelques jours plus tard
Plumes éparpillées
Ce fût tendre mélopée
En la forêt de Laroussière
Les parents attendant
Le passage de l’épicier.

Se jouer des larmes
Aux Dames-des-églises-romanes
Vêtues de leurs habits noirs
Lapineaux dans l’herbe grasse
Provocant le plaisir
À petits cris de souris grises.

Cuisses ouvertes
Bourgeons turgescents
Entreront dans la danse
Par vie crépusculaire
Un chapelet d’impétrants
Faisant tinter l’angélus.

Ailé élan
Des gentes personnes
Écran superbe
Sous la soupente des amours
À mourir de rire
Quand tête flotte comme un lotus.

Les jeunes filles joignent bols et casquettes
Mains menues
Embrasant le mouchoir rouge
Des rentes menstruelles
Pour qu’un jour
Claque du doigt la flute des vertèbres.

En rond
Ces poupées incassables se redressent
Barbie de réalité feinte
Écartant du hasard
L'indocilité
Des frondaisons de l’à-plomb.

Éludées pommadées
Tenant quelques brindilles
Elles secouent en cadence
Au niveau de l’eau
L’impermanence d’une aurore en crépuscule
Belle Ophélie au demeurant.

La bulle était fine
Pour à la pelle
Recouvrir de terre
Le Miroir
Humiliant la Planèze venteuse
De marques de tendresse.

Au panier plein de victuailles
Au bien-aimé d’une paupière fermée
Rajoutons le vinaigre
À grands coups de marteau
Dans la flaque d’eau
De tant de vies à chérir.

La Dame devint grande
La soie de sa traîne
Frôlant les épineux
Des chaudes journées d’été
À recueillir le suint des bêtes
D’une seringue de bouillie blanche contenue.

Je fis chauffer les fers
Dans le brasero
Pour d’un geste fumant
Infliger la douleur
Sur le sable blanc
Des dunes d'avenir.

1637

Une nuit parfaite

Une nuit parfaite
J’écope une dernière fois
Les marches du palais
Pupille dévorant l’iris
Devant le sang
Déposé à la louche
Sur une mince couche d’ombre.

Fuite stéréoscopique
Des chiens lapent les traces noirâtres
Sous un soleil décollant paupière lasse
Les cils arbustifs d’un regard de rien
Enclavé dans la mangrove
Parmi des singes fripant compulsivement
Les feuilles de bananier.

Narcisses pantelantes à leurs mains terreuses
Les mendiants défilent lentement
Soulevant la poussière des siècles venue
Au son d’une flûte carnassière
Faisant sauter les insectes
D’un bord l’autre
Le long de la sente oblongue.


Prunelles des pruneliers
Aux bassinoires noires de charbon
Saisies en saillie par de raides queues
S’accrochent les chardons
Mirobolants cancrelats
Sapant à coups de serpe
Les tiges fermes des blés mûrs.


De grosses pierres barrent le site
Comme choux à même les galets
Caressant jusqu’à la démesure
Le pelage des chiens roux
J’ouvris la voie
Arpentant dans les étoiles
Les traces scalaires de l’Univers.

Des débris rappelaient le naufrage
D’Ursula aux dents ébréchées
La patronne des récifs
Que le soleil rouge des incendies
Harcela d’un sourire navré
Epaisse couche de brumes
Signée par les mouettes égrillardes.

Culminant par-dessus la futaie
Du tréfonds de la forêt
Un hunier de circonstance
Agitait ses draperies pourpres
En toutes directions
Fomentant méli-mélo
Des jours de colère à venir.

Dégoupillant l’âme
De son œuvre de chair
La voie était tracée
Palpitante
Au retour des basses eaux
Par l’empilement des coquilles
Dégorgeant leur mousse bulleuse.

Cétone écorniflé par le passage d’un crabe
Morsure grandeur nature
La vaguelette
Déplaçait l’algue verte
À la merci des falaises
Tombant telles des serres d’aigle
Sur l’éponge aux poils urticants.

Quelques gouttes de pluie
Coulaient sur la paroi
Abreuvant les ridules de la roche
Posées de toute éternité
Sous l’entrelacs d’une végétation
Admise par mousson d’été
En fin de soirée.

Zygomatiques effleurés
Des doigts fins de la camarde
L’envol des mouettes fût de courte durée
Laissant au ciel clair
La mémoire des roselières
Jadis déposées au sortir de l’aber
Par des mains viellissantes.

Sagacité propitiatoire
Ecologe permissive
Laissant suinter coulures d’esprit
Par monts et par vaux
Saga africa
Face à la tendresse
D’un jeté de nuisette par matin propret.


1636

Roses éclats

Roses éclats
De tremblements
L’ éternel accueil
Colorant de poix
Les portes de chêne
Qu’entraînent en fond de poème
Les plongeurs d’avenir.

J’ouvre le ciel
Je ferme le ciel
S’effacent les pas
Sous une cordée de nuages
Pour en dernière instance
Allumer bougie de l’âme
Au ressaut de la confrontation.

Puisatier
Au regard attendri
Contemplant l’arrêt du train
En rase campagne
De la Mayenne l’élu
Jusqu’au pont de Nantes
J’opérai un tourniquet.

Crépue chevelue
La pensée étranglée
Dans le cœur des horloges
J’ai accepté par dérision
D’allumer le trait de nuit
De noircir le jour
Juste pour un silence.

Un petit bouquet de fleurs des champs
Disposé contre les vibrations
Des étoiles nos sœurs
Errantes passagères
Sitôt écrites
Lettres étranges
Jetées au panier.

S’il te plaît
De me tendre la main
M’oblige à tourner la page
Du grimoire en peau de veau
Pétales de rose jonchant le sol
Comme recueillir l’enfant
Révélé en catimini.

Ta main
Agitée dans une touffeur de vapeur
Egrène le mimosa
À portée d’une enveloppe
Serrée contre ton cœur
Alors qu’une dernière hirondelle
Cligne de l’œil.

J’attendrai de te revoir
Pour lever mon verre
À hauteur de regard
Puis cogner le talon sur l’embarcadère
Quand passe le chant des peupliers
En pleine couvaison
Des chatons de l’enfance.

Enorme écouvillon
Drainant par la soie du sanglier
Les poussières de la veille
Membres repliés
Dans l’alcool de poire
Retour de couches
D’un coup de machette décochée.

Ferme les yeux
Puis ouvre-les
Pour perles de rosée
Couler d’abondance
Rayon de lune cherchant codicille
À suivre rapetassage
D’un linceul chiffonné.

Fleure bon l’échappée vernaculaire
De ton souffle
Foulard autour du cou
Ô femme arc-en-ciel
Mirlitonnant quelque chant
Au déplié élevé de ta voix
De grande tenue cathédrale.

Egalement complices
Une multitude d’êtres affluèrent
Portant hauts les faisceaux de la guerre
Là où tombèrent dans le Trou
Jadis pour faire vite
Les guerriers de l’oubli
Au risque d’aller ailleurs.


1635

Ne pas savoir qui il est

Ne pas savoir qui il est
Ce passé présent
À renaître
Où tout se dit
À hue et à dia
Dans ce monde de syncopes.

La bougie brûle des deux bouts
Et m’éclairent à la fois
L’adieu et le jour qui point
Devant la gargote
Sans regarder en arrière
Sans être le héros magnanime.

Médaille et tout le tintouin associés
Feront reptile d’un bout de corde
Vision sainte
Nourrie d’une maigre chair de lumière
À tout ce qui sied
De vivant sur cette terre.

L’un d’eux se tient
À la pointe
Attelé sans l’être
Juste penché sur l’éperon
Au sein même de toutes choses
Fier de sa prestance.

L’autre, dépourvu de tous principes
Sanglote et personne ne le blâme,
Refusant son corps de sagesse
Il omet de rendre grâce
Pour façonner son cœur
Lèvres pincées à même le charivari.

Un jour viendra
Fait de sang et de peine
À ramer par la traverse
Jusqu’aux terres oubliées
Que suivent à petites bordées
Les marcheurs du douanier.

Pleurez bonnes gens
Devant cette âpre lutte
Qui soudain coquilles rêches
Empilent inconsidérément
Les lieux-instants de vie
De la marée montante.

Filent les mots de messe basse
Sagesse superficielle
Sonnant à la volée
Sur la voie ferrée des frustrations
Que les charges de dynamite
Peinent à soulever.

Se rencontrer
Lune et soleil confondus
Discernant le réel
En grande acuité
Mains jointes
Par la vulcanisation du quotidien.

L’idée de naître
M’est venue par temps de pluie
Et de versatilité
Au creux des goules carnassières
Pincée de sel élégamment posée
Sur le mufle canin.

Passage obligé
Remémorant l’offre principielle
D’avoir à émettre
À l’heure dite
Les dix mille louis d’or
De l’extase en Bretagne.

Et de remettre le couvert
Pour que rien ne se perde
De cette étreinte consentie
Sur le sable blond d’une ultime douceur
Eviscérée par le rostre
D’un catéchumène de circonstance.

1635