Categoría Archivos: ar je̲ya 2019

la rose de mai

   Elle s'est glissée   
de lumière ceinte
entre la pierre et le métal
du fenestron rugueux.

Fêlure de l'accueil
jointive pensée
la rose abhorre
la sortie de scène.

Elle est entrée
de l'univers
en l'appendice
d'un toucher doux.

Elle est trait du Souffle
écarquillement
sans larme
sur le féminin de la flamme.

Transparente
biche endormie
elle éclot
elle dispose.



505

Messaline endormie

 Messaline endormie   
 au sein des symphonies   
 la muse lierre de fards parée   
 énucle la face grise de l'ennui.  
    
 Au son des cymbales et des olifants   
 le cavalier de Trencavel   
 éclaire d'une épée de feu   
 la meute qui le dévore.  
    
 Ici point de lanterne   
 point de carabistouilles   
 au gré des passions   
 juste quelque oracle inaugural.  
          
 Demeure le petit homme   
 aux callunes assujetti   
 aimé des dieux  
 à l'immense tendresse   
 destiné à prendre son envol.   
   
 Petit homme   
 petite femme   
 tournent l'horloge   
 pendulant leurs vérités   
 sociales et planétaires   
 à l'ombre d'une vie d’exil.  
    
 Dans cette inextricable toile   
 des meurtris venus à terme   
 rien à dire   
 hormis le silence.     

    ( Céramique de Martine Cuenat ) 

  504

en lisière de forêt

   En lisière de forêt   
la vie
la vie secourable
la vie en offrande
la vie giboyeuse en amitiés
la vie qui se faufile et que rien n'arrête
Un carré de verdure
où poser ses pas
une échancrure si fragile
que le regard même
trace les courbes de l'avenir
Une flaque d'eau
D'avoir marcher
devant soi
vers la nuit
libère l'espoir
de ses convenances
Reste un sillon de lumière
où béance tenante
choir
sans retour arrière
sans pomme de discorde
une corne de tendresse en plein cœur.


503
(sculpture de Martine Cuenat)

Larmes de pluie en godille

 Le chien courait   
 sur le chemin  des bergères 
 entre les fougères accoutumées.    
 
 Navré de devoir frapper   
 un si bel homme   
 à la carotide.  
    
 Maman devant   
 s'était éloignée   
 en simulation d'être pressée de rentrer.

 La pluie se fit cinglante   
 et piquait le visage   
 une brume nous recouvrait.      
 
 La marée était montante   
 on entendait le ressac   
 frapper les dalles de granite. 
     
 La jetée était déserte   
 un marin dans sa petite embarcation   
 godillait ferme   
 vers un cargo   
 ancré entre les jetées du port.  

       ( peinture de GJCG )
  
502
 

au prolongement du jour

   Au prolongement du jour   
quand la nuit se fait profonde
où le navigateur tremble
devant les dangers qui l'assaillent
il y a cette lumière
cet oiseau qui annonce la terre
et le soleil
quand la connaissance est naissance
que le jour est amour
se gonflent les montgolfières
en ascension gracieuse
chalumeaux bruyants
faisant fuir les oiseaux
comme manne au désert
quand la faim nous tenaille.
Mesure-t-on les pas à faire
affaire de temps
affaire de regard
portés en juste place
jusqu'au soir ?


501
(peinture de Manon Vichy)

Écluses ouvertes

 Vivre la toile recouverte de couleurs   
 dans les deux dimensions   
 de l'une à l'autre   
 les brosses brassent l'air   
 coulures aux lanières gouleyantes   
 les signes éclosent   
 sitôt remis en leur origine.        

 Écluses ouvertes   
 la montée des émotions   
 fait vague unique   
 quand l'étrave saccage   
 l'eau et la berge   
 entre les rangées de platanes   
 au vent sifflant   
 sur les bourgeons à venir.      


  500

Le détachement du poète

 Le poète ne se relit pas   
 Il écrit   
 Il ne revient jamais sur ses pas   
 Il s'éprend de l'agitation des foules.    
  
 Il a compris à la fois tout et rien.         
 Le grand détachement.   
   
 L'expression poétique est peu réfléchie   
 Mais elle réfléchit le monde.   
   
 L'extérieur est un puits de mots   
 De maux m - a - u - x   
 À la source des mots.   
   
 Le poète ne sauve pas l'humanité   
 Il essaye de se sauver   
 Lui  
 En ses contorsions existentielles   
 Qui le font s'ouvrir. 
     
 Le poète est un gyrobroyeur   
 Il est le metteur en  mots   
 Des existences autres    
 Présentes ou passées. 
  
 Il est le vers et le fruit   
 Et le bruit   
 Et le verre et l'eau.

      
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