Pas à pas, de voyage en voyage, en l'arène d'un cirque où la roue tourne la rumeur soulève les rideaux de velours. Entrée colorée, barnum bruyant, poussière soulevée du cortège animal les passions de l'âme élevées aux pinacles des temples démantèlent la lente construction de la raison. De sang et de couleurs, les cris furieux des Erinyes ont détruit les paysages de l'enfance ; les lèvres d'argile des sources ont fait place aux buses de ciment, la pierre des protections a été arrachée, les haies ont été abattues, les fossés comblés, le renard argenté ne trouvera plus le centre des offices, un vent mauvais rabat les grumeaux de terre vers les terrasses de pierres sèches, un vieux frêne murmure ses dernières dispositions.
La nuit roucoule, pigeons de l'âme en surplomb des manquements à l'humaine condition ; les mensonges populistes remplacent le chant des poètes, les chenilles des engins de guerre suivent les souliers ferrés des poilus, le ciel s'assombrit, même les arbres sculptés par le vent d'ouest se sont couchés sous la tempête. L'air est fétide, contre le mur des lamentations les papiers de l'envie froissés et forcés aux jointures des pierres couvertes de lichens deviennent chairs pantelantes d'un tsimtsoum aléatoire. Les mains décharnées, hors des poches à l'avenant écorchent l'oubli ; les yeux révulsés clipsent les valeurs de l'esprit, crème sulfureuse maquillée d'un sourire de clown, nos errances dernières sont à portée des crocs. La fureur fait place à la nuit, au silence, enlaidie par les passions de l'âme des combats et des haines ; pommelée par la levée des moissons nouvelles, annonciatrices des renaissances à venir. Il n'est d'herbes officinales que celles du printemps, herbes collégiales du baiser des amants dispersés en quête du grand chambardement, un quignon de pain en fond de sac, l'eau dans le creux de la main. Nous entendrons le son des ricochets, cailloux jetés sur la rivière, à portée des demandeurs d'asile, en sortie d'exil. 513