L’organiste se marie

Mêlant l'aparté au coup de cymbale   
l'organiste est descendu de son balcon   
pour se joindre à la procession.      
 
Marions-les marions-les   
qu'ils disaient les enfants de la fête   
sous le dais parfumé des roses de Roranches.      
 
Il y avait là le maire et le curé   
pour haranguer de quelques mots   
les enjoyés en complet-veston et robes à fleurs.      
 
M'en dirait-on davantage   
que nenni ma foi   
je reviendrai plus tard.      
 
Mises à l'écart   
quelques bûches sèches au génépi associées   
attendaient leur mise à jour.      
 
N'y tenant plus   
elles firent le tour des associés   
précédées de leur flûtes de champagne   
greffant leurs regards   
aux cintres d'une présence à Soi   
à la naissance du Souffle   
le foudre du stylo haut levé   
devant le lutrin des choses à dire.      
 
 
846

Un visage de terre roux assombri

Un visage   
de terre roux assombri   
posé dans la levée de l'aube   
à même les senteurs de la nuit.      
 
Tu souriais parfois   
et ne pouvais que surseoir au retour   
du cycle des saisons   
manière de calmer nos ardeurs.      
 
Les aigles s’élevèrent   
sans que la brume les enserre   
pour se distraire   
à même les coulures sombres de la roche.      
 
Malignité hirsute   
des acouphènes en proie aux klaxons de la rue   
les pieds cognèrent contre le bord du trottoir   
sans que le jour s'émeuve.      
 
Gardons auprès du temps venu   
la fresque des nuages   
et qu'à l'heure du passage   
la chute soit légère   
en l'appel de la marche des hommes de bien   
offrant leur soutien   
en accueil de soi   
comme il se doit.      
 
 
845


	

Au palais d’hiver des palétuviers

Au palais d'hiver des palétuviers   
une prière juste une prière
pour père et mère.

A la pointe du Raz
il est un ciel

que les maisons basses embarrassent.

Du sol au plafond
en déraison des choses d'hier
passons la serpillière.

Arrimés au prétoire
nous espérons l'apocalypse
les yeux couverts de gypse.

Il est des jours comm
e ça
à compter ceux qui restent
après avoir retourné sa veste.

Une plume d'aigle
sortie de la besace
puis trempée dans l'encrier
inscrit le torrent de la vie
jusqu'aux montagnes
où se mêlent vertiges et tempêtes
du sceau vigoureux
de l'orage en goguette.


844

Adonis printanier

Adonis printanier   
à la pointe du Palastre   
attend pleine lune pour tenir rang.      
 
Se reflète l'astre   
dans le pierrier des retrouvailles   
en joyeuse livrée comme il se doit.      
 
De ses grosses pattes dans l'herbe mouillée   
le Patou de sa voix liturgique   
outrage le rire des amants.      
 
Repliant ses ailes de libellule   
le bâton d'encens entre ses dents   
elle pose l'auréole sur l'épaule du géant.      
 
Sorcière comme une ombre
elle a caressé son ventre
aux broderies de pierres vouées.
 
Mesurons de la gagne à la perte   
les jours et les peines   
aux arbres dédiés par la chèvre des neiges.      
 
Et si le mufle baveux   
du Cerf de Valserine   
fait sienne les humeurs de la ville   
montons d'une clarine   
le son des chants d'autrefois   
pour chariots mis en cercle   
faire vibrer la montagne   
d'un boulgi-boulga de danses de Savoie.      
 
 
843

Les adoux

Des loges du théâtre   
à plonger le regard vers le parterre   
les mouches volent vers les vestiaires.      
 
Les passereaux dans la haie   
bruissent et pépient   
pour nous dire bonjour.      
 
La brume monte de la vallée   
les arbres frissonnent   
les esprits s'éveillent.      
 
Trop tôt !   
les couvertures remontent sous le nez du dormeur   
pour peu que le plein jour vienne.      
 
S'effilochent les rêves   
juste avant de s'effacer   
dans une dernière saveur.       
 
Menons   
par la menine   
les enfants de demain   
vers la crique du torrent   
en bas de chez nous   
là où le Drac opère son retournement   
une protection prospère   
dans les adoux doux d'un gouli-gouli d'amour.      
 
842